Attaque à «Charlie Hebdo»: «J’ai tapé le code, ils ont tiré sur Wolinski, Cabu. Ca a duré 5 minutes»
ATTENTAT Les proches témoignent...
«J’ai le souvenir que la conférence de rédaction s’était très bien passée et qu’avant la fin, un type a surgi dans la salle et a arrosé de balles autour de la table.» Laurent Léger, 48 ans, journaliste rescapé de la fusillade dans les locaux de Charlie Hebdo, a livré son témoignage à RTL. «J’ai pu juste me jeter en arrière et me glisser sous une table dans un coin et rester recroquevillé, comme ça».
Ce grand reporter se souvient de la terreur qui s’empare de lui quand il se demande si les terroristes vont ou non «chercher dans tous les recoins» pour trouver ceux qui s’y cachent. «J’ai entendu, après un long silence, que l’un des deux s’adressait à une survivante, à ma consœur Sigolène et il a dit: «On ne va pas tuer les femmes» puis ils sont partis.» «Pourtant, il en a bien tué une dans la salle, notre collaboratrice Elsa Cayat», ajoute-t-il dans Le Parisien.
«Quand je suis arrivé, c’était horrible»
La dessinatrice Corinne Rey, dite Coco, 32 ans, est elle aussi une rescapée. Elle a été directement confrontée aux terroristes. C’est elle qui leur a ouvert la porte du journal. «J’étais allée chercher ma fille à la garderie, a-t-elle raconté à L’Humanité. En arrivant devant la porte de l’immeuble du journal, deux hommes cagoulés et armés nous ont brutalement menacées. Ils voulaient entrer, monter. J’ai tapé le code. Ils ont tiré sur Wolinski, Cabu. Ca a duré cinq minutes».
L’urgentiste Patrick Pelloux, qui tient une chronique dans Charlie, est l’un des premiers à être arrivés sur les lieux, appelé d’urgence par Jean-Luc, le graphiste du journal. «Il faut que tu viennes vite, ils nous ont tiré dessus à la kalachnikov», lui dit Jean-Luc. Pelloux croit à une blague. «Quand je suis arrivé, c’était horrible. Beaucoup étaient déjà partis car ils avaient été abattus comme lors d’une exécution.» Déboussolé, il prévient le président François Hollande. «Je n’ai pas pu les sauver», lui dit-il.
Le dessinateur Willem, 73 ans, était dans le train en direction de Paris au moment du drame. Il venait justement apporter ses dessins à Charlie Hebdo. «Ma femme savait que j’étais dans le train mais, depuis, elle m’appelle sans cesse parce qu’elle est inquiète. Elle voudrait maintenant que j’aie un garde du corps et une surveillance policière. Mais je n’ai pas envie de cela. Ce qui s’est passé hier prouve que les gardes du corps, ça ne protège de rien», affirme-t-il au Parisien.
«Ce local dans lequel je travaillais avec eux, maintenant il y a du sang»
Il se réjouit pour Angélique, la réceptionniste, qui «a elle aussi la vie sauve. Elle était sortie fumer une cigarette», raconte-t-il dans les colonnes du Parisien. Il évoque aussi le dessinateur Riss «blessé à l’épaule. Je ne sais même pas s’il peut continuer à dessiner mais on va tous travailler sur le prochain numéro!», assure-t-il.
L’humoriste Mathieu Madenian devait assister à la réunion à Charlie Hebdo, lui qui avait intégré l’équipe quatre mois plus tôt. Mais sa télévision était HS. «Pendant que ma télé se faisait réparer, je voyais ces messages incroyables qui s’affichaient, mes parents m’appelaient (…). J’ai encore du mal à réaliser, j’ai envie d’appeler Charb (…). C’est un ami qui est parti, que j’aimais profondément. Ce local dans lequel je travaillais avec eux, maintenant il y a du sang», raconte-t-il au Parisien.
Mais déjà, Madenian évoque le prochain numéro de Charlie Hebdo, qui sortira mercredi: «Ca va être compliqué, mais on essayera de se marrer pour montrer qu’ils n’ont pas gagné. Faut tenir, rester debout. Qu’est-ce qu’il aurait fait, Charb? Il aurait dessiné un truc super marrant.» Pelloux ne dit pas autre chose: «On est tous avec notre peine, notre douleur, nos peurs, mais on va le faire quand même parce que ce n’est pas la connerie qui va gagner».