«J'ai souffert de phobie scolaire pendant des années»

TEMOIGNAGE En ce jour de reprise des cours après les vacances de la Toussaint, certains enfants ne retourneront pas en classe, pétrifiés par la peur. Une phobie scolaire dont a souffert Maeva...

Delphine Bancaud
Illustration d'une collégienne désemparée
Illustration d'une collégienne désemparée — DURAND FLORENCE/SIPA

Ce lundi a sonné la fin des vacances de la Toussaint. Mais certains élèves n'ont pas pu franchir la porte de leur établissement, victimes de phobie scolaire. Un mal qui a touché Maeva, 20 ans, il y a quelques années.«J'ai souffert de ce mal pendant des années», confie-t-elle.

Tout a commencé un mois après sa rentrée en seconde dans un lycée de Valence. «Un matin, je me suis réveillée avec la nausée. Et les jours suivants, j'étais sujette à de grosses crises d'angoisse. J'avais chaud, je pleurais, je n'arrivais plus à prendre le car pour aller au lycée», se souvient la jeune fille. Ses parents décident alors de l'accompagner en voiture. Mais rien n'y fait. «Je n'arrivais pas à descendre de la voiture. Mes parents ont tout essayé: la manière douce, la manière forte, le chantage. C'était pire, car je me sentais oppressée et je culpabilisais», confie-t-elle. De guerre lasse, les jours où sa détresse de Maeva est trop manifeste, ses parents la confient à sa grand-mère.

Certains jours, la jeune fille arrive quand même à franchir la porte d'entrée du lycée. «Mais je passais alors ma journée à l'infirmerie»,se souvient Maeva. Alertée, l'équipe pédagogique essaye de comprendre l'origine de son mal. «Tout le monde s'est montré compréhensif, mais ça n’a pas suffi. J'étais incapable de parler de mon mal, j'avais trop honte». Elle est d'autant plus désemparée qu'elle-même ne comprend pas d'où proviennent ses angoisses. «La seule chose dont je suis sûre avec le recul, c'est que j'avais peur du regard des autres élèves. J’avais un grand manque de confiance en moi: je trouvais les autres filles plus jolies, plus drôles, plus intelligente que moi. Et enfant, j'ai souvent eu peur de me séparer de mes parents. Est-ce que tout cela était lié?», s'interroge-t-elle. Pourtant Maeva n'a jamais eu de difficulté scolaire. Bonne élève au collège, elle avait aussi beaucoup d'amis.

Une renaissance progressive

Pour lui venir en aide, ses parents l'emmènent chez le pédopsychiatre. Un échec. «Le courant ne passait pas entre nous», déclare-t-elle. A la Maison des adolescents, elle entame un travail en profondeur avec un thérapeute qui l'a fait avancée. Mais au bout de quelques mois d'absences répétées, le proviseur finit par lui demander de quitter le lycée. «Les cours du Cned, c'est difficile à suivre lorsque l'on se sent mal. Je n'ai donc pas réussi à rattraper mon retard». Maeva se souvient aussi du désarroi de ses parents: «ils ne savaient plus quoi faire et ils culpabilisaient». L'année suivante, ils tentent de l'inscrire à l'internat. «Mais dormir en dehors de la maison, ce n'était pas envisageable pour moi». Peu à peu, la jeune fille s'isole: «Mes amis ne comprenaient pas ce dont je souffrais et comme je n'étais pas plus éclairée, les liens se sont coupés», confie-t-elle.

Maeva est finalement hospitalisée à Grenoble où elle intègre l'unité soins-études. La bonne solution pour elle. «J'y suis restée deux ans. J'allais beaucoup mieux car je côtoyais des adolescents qui rencontraient le même problème que moi. J'ai enfin retrouvé du lien social», raconte-t-elle. Maeva finit par décrocher son bac et entame des études de sociologie à l'université, tout en habitant en collocation avec une amie. Aujourd'hui, elle prépare le concours d'éducateur. «Cette histoire de phobie scolaire est derrière moi. Elle m'aura appris la tolérance et m'aura fait grandir plus vite», raconte celle à qui l'avenir sourit désormais.

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