Barrage de Sivens: Ce que l’on sait des circonstances de la mort de Rémi Fraisse

ENQUETE Des zones d'ombre entourent encore le décès de l'opposant au barrage tarnais...

W.M.
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Des CRS sur le site du barrage de Sivens , samedi 25 octobre 2014 FRED SCHEIBER/SIPA/
Des CRS sur le site du barrage de Sivens , samedi 25 octobre 2014 FRED SCHEIBER/SIPA/ — SIPA

Le militant anti-barrage de Sivens (Tarn) dont le corps a été retrouvé dans la nuit de samedi à dimanche sur le site a-t-il été tué par les gendarmes? Les causes exactes du décès de Rémi Fraisse, 21 ans, sont encore indéterminées, selon le procureur d’Albi. L’autopsie est prévue ce lundi.

Dans quel contexte a-t-il été retrouvé?

Alors qu’un rassemblement avait réuni environ 2.000 manifestants samedi après-midi sur le site du barrage controversé de Sivens, «une centaine d’opposants violents a voulu en découdre avec les forces de l’ordre», a indiqué le procureur de la république Claude Dérens. Les forces de l’ordre, qui avaient pour mission de protéger l’aire de stockage des engins de chantier, «ont été attaquées en règle par le groupe de manifestants violents, approximativement une centaine, qui jetaient des cocktails Molotov, des engins pyrotechniques et des pierres sur le grillage et à l’intérieur, depuis l’extérieur», a rapporté le procureur.

Comment le corps de Rémi a été récupéré?

Les gendarmes, au nombre de 70, poursuit le procureur, ont «balayé par des torches [le terrain], ce qui a permis de repérer le corps d’un homme gisant au sol». Les forces de l’ordre ont alors chargé les manifestants pour «rapatrier le corps», avant «de lui donner les premiers secours». Ce lundi matin, des traces de sang en deux lignes parallèles, faisant penser à celles laissées par deux pieds traînant sur le sol, étaient toujours visibles à l’endroit où a été extrait le corps de Rémi. Les forces de l’ordre n’ont pas pu faire de relevés de la situation en raison de la poursuite des affrontements.

Quelle est la version des manifestants?

La description de ces événements n’est pas en contradiction avec la version de Ben Lefetey, porte-parole du collectif Sauvegarde de la zone humide du Testet, qui regroupe la majeure partie des opposants au projet de barrage. «Nous ne disons pas que les forces de l’ordre ont tué un opposant, mais un témoin nous a dit que le décès s’était passé au moment d’affrontements. Un témoin dit avoir vu quelqu’un s’effondrer lors d’affrontements et être enlevé par les forces de l’ordre», a-t-il ajouté.

Rémi a-t-il été touché par une grenade?

C’est ce qu’une journaliste de Reporterre écrit sur la foi de témoignages de manifestants ayant participé aux événements dans la nuit de samedi à dimanche. Ainsi, l’un d’entre eux, Camille, raconte: «Il était à trente mètres de moi sur ma gauche. Je l’ai vu se faire toucher alors qu’il y avait des explosions à côté. Ils ont envoyé des grenades explosives, des tirs de flash-ball. Après, cette personne s’est retrouvée à terre. Il y a eu une charge de flics, j’ai chargé aussi, mais je me suis retrouvé tout seul, du côté gauche. Mais tout le monde est arrivé trop tard, ils ont mis en joue ceux et celles qui arrivaient. J’ai vu ce gars à terre se faire traîner par les policiers et on n’a pas pu en savoir plus.»

Ce type de grenades, lacrymogènes ou assourdissantes, utilisées par les forces de l’ordre lors d’opérations de maintien de l’ordre est présenté comme non létal. Le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) a indiqué dans un communiqué de presse qu'il considérait «que les militaires de la gendarmerie ne sauraient être mis en cause sur la seule base de témoignages, parfois anonymes, présentés par certains médias.»

Rémi avait-il bu?

Selon Victor Belle, un militant cité par l'AFP qui a vu le corps inanimé du jeune homme être ramassé par les gendarmes, Rémi était «lucide». «Il n’était pas bourré, il n’était pas défoncé», assure-t-il. L’autopsie du jeune homme doit être réalisée ce lundi après-midi. Les premiers résultats toxicologiques devraient apporter des précisions sur cette question.