Relaxe pour un prêtre de la Loire qui héberge des sans-abri
JUSTICE Le prêtre est poursuivi parce qu'il accueille des sans-abri dans une église de Saint-Etienne...
Le tribunal de police de Saint-Etienne a relaxé mercredi un prêtre de Saint-Etienne à la retraite accusé d’enfreindre un arrêté municipal en hébergeant des sans-abri dans une église de la ville. La justice a estimé que le droit à l’hébergement d’urgence relevait de la «liberté fondamentale».
Après avoir rejeté les nullités soulevées par la défense de l’ecclésiastique, le juge Henry Helfre a retenu les «motifs de nécessité invoqués, qui peuvent justifier son attitude par la sauvegarde d’un intérêt supérieur». Il s’est appuyé sur le Code de l’action sociale et des familles et sur une décision du Conseil d’Etat de février 2012 ayant «érigé le droit à l’hébergement d’urgence au rang d’une liberté fondamentale». «Il est paradoxal que l’Etat poursuive aujourd’hui le père Riffard pour avoir fait ce qu’il aurait dû faire lui-même», écrit le magistrat.
Le parquet dénonce un «appel d’air en faveur des filières d’immigration clandestine»
Si la puissance publique n’a pas les moyens de satisfaire la demande d’hébergement d’un sans-abri, elle doit déléguer ce devoir à toute autre personne morale ou physique en capacité de l’accueillir, a encore fait valoir le magistrat. Le juge a également cité une directive européenne de janvier 2013 qui permet «d’assouplir les normes de sécurité» pour ce type d’accueil.
Dénonçant «l’appel d’air en faveur des filières d’immigration clandestine créé par cette situation», le représentant du parquet, André Merle, avait requis une condamnation correspondant à 239 fois une amende de 50 euros, pour ne pas avoir respecté un arrêté municipal de février 2013 ordonnant l’arrêt de l’hébergement dans ce bâtiment qui ne respecte pas toutes les normes de sécurité pour l’accueil du public.
Accueilli par des applaudissements
Le jugement a été accueilli mercredi par les applaudissements d’une vingtaine de supporteurs du septuagénaire. Ce dernier a estimé qu’il était «important qu’il y ait eu un débat de fond sur la question, pas uniquement sur les aspects juridiques» du non-respect d’un arrêté municipal. Il était reproché au père Gérard Riffard, 70 ans, de mettre à la disposition de personnes en attente d’un hébergement, un local paroissial de l’église Sainte-Claire, dans le quartier de Montreynaud, classé en zone de sécurité prioritaire.
Des demandeurs d’asile venus de RDC
Interrogé par l’AFP, le prêtre relaxé a indiqué que la salle paroissiale, implantée dans un quartier dont la population est majoritairement d’origine maghrébine, «compte à ce jour 50 adultes et 14 enfants scolarisés, certains restent 15 jours, d’autres y sont depuis un an et demi». Vis-à-vis de ces demandeurs d’asiles, qui pour la plupart sont des Africains originaires de RDC, le père Riffard a estimé que «le tribunal a reconnu que l’Etat devait prendre ses responsabilités».
Le parquet fera appel
L’évêque de Saint-Etienne, Mgr Dominique Lebrun, a indiqué dans un communiqué qu’il se «réjouit de cette décision de justice (…) qui reconnaît que l’état de nécessité prime sur d’autres normes». «Avec le père Gérard Riffard, je souhaite qu’un climat d’apaisement et de dialogue se développe à la suite de cette décision de justice», a ajouté l’évêque de Saint-Etienne.
Interrogé par l’AFP, le procureur de la République de Saint-Etienne, Jean-Daniel Regnauld, a annoncé que le parquet ferait appel de cette décision.