Une terre d'accueil pour les gens du voyage en Seine-Saint-Denis
REPORTAGE La commune de Vaujours propose des aires adaptées à cette population...
Il y a quinze jours, le Conseil de Paris donnait son feu vert à la création de deux aires d’accueil pour gens du voyage dans les bois de Boulogne et de Vincennes. Environ un tiers des 5.400 places d’accueil réclamées par la loi existent actuellement en Ile-de-France, pour 40 ou 50.000 gens du voyage, selon la fédération FNASAT. Parmi eux, Robert Sauser et sa famille. Depuis pas loin de dix ans, entre fin septembre et mai, ils vivent sur une aire à Vaujours (Seine-Saint-Denis).
Seuls sur l’aire d’accueil
Robert n’est «pas un gitan complet » contrairement à sa femme. Il se verrait bien vivre dans «un espace en dur» sans pour autant renoncer à sa caravane. Mais de telles zones d’«habitat adapté», mixte, sont rares -moins de dix en Ile-de-France. Son cadre de vie est donc un simple rectangle de terre sur une zone naturelle, à deux pas de la mairie.
Au moins, il savoure de «pas avoir à partager avec des inconnus» avec lesquels la cohabitation est parfois difficile. Ses filles vont régulièrement se doucher dans le gymnase voisin, tôt le matin, pendant que ses gendres, «un Basque et un Nordiste, ferrailleur et peintre», partent travailler, et que deux de ses petites-filles sont scolarisées en maternelle. Il paie 500 euros de charges par mois pour l’électricité, les poubelles et l’eau sur les bornes à incendie. Il n’a pas d’adresse et va chercher son courrier à la Poste, ne perçoit pas d'aide sociale et ne paie pas d’impôt. Il roule en Clio.
Plus envie de bouger
Ce soldeur de 55 ans, qui achète et vend sur les marchés comme son père, n’a plus envie de bouger. «Avant je m’installais où je pouvais, sans prévenir, sous peine de ne pas être accepté. Maintenant, on a notre tranquillité. Je suis bien accueilli par mes “voisins”, qui me connaissent. J’appelle le maire à la fin de l’été pour lui demander si je peux venir.»
Et le maire Dominique Bailly (UDI) lui réserve la place, sous réserve qu’elle soit libre., le temps de l'hiver. Il n’y est pourtant pas obligé, selon le schéma départemental qui prévoit l’aménagement des aires depuis la loi Besson de 2000. «C’est une question de confiance. Il est le référent et tout se passe bien.» Dans la commune, une autre famille a installé sa caravane sur un terrain en zone pavillonnaire depuis vingt ans, sans problème.
Pas d’angélisme pour autant du côté du maire, qui a déjà fait expulser d’autres gens du voyage, «22 caravanes qui n’avaient pas prévenu qu’elles arrivaient et ont forcé le passage».
Mauvaise image
«Certains gens du voyage ont déjà détruit des aires ou ont volé du cuivre dans la région. Cela n’aide pas à changer le regard des habitants sur eux», ajoute-t-il. Marguerite, la femme de Robert, acquiesce et renchérit: «Et les Roms, qui fouillent les poubelles, ça aussi ça donne une mauvaise image». Selon elle, les deux populations sont souvent, à tord, confondues.
Dominique Bailly est aussi le président de la commission des gens du voyage à l’association des maires d’Ile-de-France (AMIF). Il tente de faire évoluer les mentalités des élus et d’améliorer la prise en charge des gens du voyage. Mais créer des espaces « est difficile à cause des règles d’urbanisme et de la densité de la population». «Il faut traiter la question au niveau régional et non départemental», et prendre en compte «la sédentarité de plus en plus réelle des gens du voyage», ajoute-t-il.