« Reusss », un « La La Land » dans la cité
COMÉDIE MUSICALE La série musicale « Reusss » suit les rêves et les désillusions de trois jeunes femmes dans une cité
- Reusss, comédie musicale en 10×20 minutes, est disponible ce vendredi sur France TV Slash.
- Cette série raconte les rêves et les désillusions de trois meufs inséparables, Hanane (Inès Ouchaaou), Maissa (Assa Sylla) et Ambre (Charlie Loiselier) qui vivent dans la même cité.
- La productrice de la série raconte la genèse de ce projet un peu fou.
Une série qui dépoussière le genre ! Reusss, comédie musicale en 10×20 minutes, disponible ce vendredi sur France TV Slash, raconte les rêves et les désillusions de trois meufs inséparables, Hanane (Inès Ouchaaou), Maissa (Assa Sylla) et Ambre (Charlie Loiselier) qui vivent dans la même cité, près de Sète. Comment est né ce projet de série un peu fou ?
« Sened Dhab, le directeur de la fiction numérique de France Télévisions, voulait une comédie musicale. J’avais vu à la Villette le spectacle musical de Catherine Regula, intitulé Place des mythos, qui m’avait beaucoup touché. Cela racontait la cité avec beaucoup d’authenticité et de sincérité, et en même temps de joie et d’énergie vitale. Je l’ai donc contactée », raconte la productrice de Reusss, Elizabeth Arnac, que 20 Minutes a rencontré à Séries Mania où les comédiennes de Reusss ont été sacrées meilleures actrices en compétition française.
Une série inspirée par une pièce de théâtre
« Je travaille en banlieue et dirige une compagnie de théâtre. J’ai écrit cette pièce de théâtres avec des jeunes. Ce que je retrouve dans la série, c’est que ces jeunes qui vivent et habitent là ont des difficultés, mais sont soleils, ont de l’énergie et une volonté de s’en sortir », poursuit Catherine Regula, la cocréatrice de Reusss avec Jérôme Larcher.
Reusss, qui veut dire « sœurs » en verlan, démarre le jour des résultats du bac d’Hanane, Maissa et Ambre. La série raconte l’été qui va suivre, probablement le dernier ensemble avant de rentrer dans l’âge adulte. Un été semé d’embûches, entre petits amis foireux, parents envahissants et dealers menaçants. Des galères qu’elles vont chanter et danser au fil des épisodes comme dans un film de Jacques Demy. « Chacune a une problématique personnelle, Hanane, parcours sup et le déterminisme social par le lycée, Maissa, le fait d’être soutien de famille, Ambre, avec ses parents et leurs présupposés de ce qu’est la réussite », résume Elizabeth Arnac.
« On était un peu écrasé par les références, confie la productrice. Moi, c’était West Side Story parce qu’il y a cet univers urbain extrêmement violent où il y a une jeunesse magnifique qui risque de se perdre en mettant son énergie où il ne faut pas. C’est le grand danger de la cité, une violence à laquelle on la pousse parfois. Et, bien évidemment, Jacques Demy puisque en France, c’est la référence ultime. »
Une banlieue colorée à la Demy
« On avait envie d’une cité très vivante. On a choisi la banlieue de Sète où il fait très beau, où la mer est là, d’un bleu pétant », souligne la productrice. Si la série rappelle l’œuvre de Jacques Demy, c’est aussi à cause de ses couleurs éclatantes.
Reusss a été tournée sur l’île de Thau, un nom paradisiaque qui désigne un territoire artificiel, construit en 1968 pour répondre aux besoins d’une population dite modeste, devenu un quartier dit populaire.
« La banlieue de Sète se situe sur une presqu’île ! C’est une ineptie qui raconte la folie de ces ghettos. Il n’existe qu’une seule route par laquelle on entre et sort. La ville, communiste pendant longtemps, a voulu désenclaver, donc il y a un nombre de bus assez exemplaire, mais cela reste une excroissance à l’extérieur de la ville… Cela raconte les volontés d’urbanisme politique des années 1960-1970, on les a mis à part », analyse la productrice.
Des chansons écrites en chœur
La musique a été confiée au rappeur Proof. « Il a un registre hip-hop affirmé, mais on l’a encouragé à utiliser une palette assez large allant du hip-hop au R & B, en passant par le slam ou la variété. Il y avait l’idée d’avoir plusieurs registres. Pour la scène d’ouverture, celle des résultats du bac, on est dans un registre de comédie musicale assez classique par exemple », commente la productrice.
L’emplacement des parties chantées a été défini dès l’écriture du scénario. « Ce sont les moments d’exaltation des sentiments », estime Elizabeth Arnac. Et d’expliquer le processus de création des chansons : « Les scénaristes se sont amusés à écrire des chansons, mais ils savaient que cela ne resterait pas. Les paroliers de Prooof se les sont réappropriés pour que cela colle avec la rythmique des mélodies ». Sous ces parties chantées inventives et réjouissantes, un thème plus grave et assez peu abordé dans la fiction française : la difficile émancipation des filles en banlieue. « Leur environnement social et leurs familles respectives sont un handicap à leur propre envol », conclut Catherine Regula.