Lille : Un gros aimant à 12 millions qui permet de scruter le cœur des atomes

Infiniment petit C’est à Lille, dans les locaux du CNRS, qu’est installé l’un des 7 spectromètres à résonance magnétique nucléaire de 1.200 MHz du monde. Un appareil hors du commun aux multiples applications

Mikaël Libert
Le spectromètre RMN 1.200 MHz du CNRS de Lille.
Le spectromètre RMN 1.200 MHz du CNRS de Lille. — M.Libert / 20 Minutes
  • Le CNRS de Lille vient d’inaugurer son spectromètre à résonance magnétique nucléaire de 1.200 MHz.
  • C’est le seul en France et l’un des 7 en service dans le monde.
  • L’appareil sera utilisé dans l’étude des matériaux ou de la biologie pour des applications médicales ou industrielles.

Percer les secrets de la matière. La plupart des gens s’extasient lorsqu’on leur offre un beau vélo, un bijou ou une PS5. Les scientifiques du CNRS et de l’université de Lille, eux, sont comme des gosses devant un gros aimant. Bon, il faut avouer que ce n’est pas n’importe quel aimant et que leur nouveau joujou, le spectromètre RMN 1.200 MHz, ils l’attendaient depuis plus de dix ans. C’est gros, cher et compliqué, certes, mais les applications devraient apporter de significatives avancées dans de nombreux domaines tels que la santé ou la connaissance des matériaux.

Restons à notre place, il n’est pas question ici de se lancer dans des explications hautement scientifiques sur le fonctionnement du spectromètre à résonance magnétique nucléaire (RMN) inauguré officiellement, mercredi, sur le campus de l’Université de Lille, à Villeneuve d’Ascq. Pour faire simple, cela fonctionne sur le même principe qu’un IRM, appareil notamment utilisé en médecine. Les noyaux d’atomes composant l’échantillon disposé dans l’appareil tournent autour d’un champ magnétique très intense généré par un gros aimant. Le RMN mesure la fréquence de rotation de ces noyaux, permettant de caractériser l’environnement des atomes et de déterminer la structure de la molécule qu’ils composent.

Fouiller les matières inertes ou biologiques

Ce qui change par rapport aux RMN puis puissants ? « Avec son champ magnétique 600.000 fois supérieur à celui de la terre, l’appareil permet d’étudier des matériaux de plus en plus complexes dans des quantités de plus en plus faibles », explique Olivier Lafon, responsable scientifique du projet RMN 1.200. « Grâce à sa résolution très élevée, nous aurons désormais des certitudes quand il fallait parfois nous contenter d’hypothèses », ajoute Dominique Massiot, président du conseil scientifique d’Infranalytics, la Fédération de recherche du CNRS.


Le pupitre de commande du spectromètre RMN 1.200 MHz du CNRS de Lille.
Le pupitre de commande du spectromètre RMN 1.200 MHz du CNRS de Lille. - M.Libert / 20 Minutes

Mais concrètement, ces dix ans de développement et ces millions d’euros d’investissement vont-ils changer votre vie ? « Observer de manière plus précise l’environnement des atomes dans les matériaux ou dans les molécules biologiques devra nous permettre de proposer des solutions à diverses problématiques environnementales, énergétiques ou de santé », insiste Olivier Lafon. Dans le domaine des matériaux, par exemple, développer des plastiques biodégradables, des matériaux pour batteries et panneaux solaires. Dans le domaine de la santé, avancer dans le traitement de maladies liées à l’âge, comme alzheimer, les maladies chroniques et les infections bactériennes ou virales. L’équipement sera aussi ouvert aux industriels, moyennant finances, parce qu’il faut bien rentabiliser cette grosse bête qui consomme tout de même 2.500 litres d’hélium par an.