Mini-trous noirs, univers parallèles: Que nous prépare le LHC?

PHYSIQUE On décrypte le vrai du faux sur la physique extrême de l’accélérateur de particules du Cern, qui redémarre dans quelques jours…

Nicolas Bégasse
Vue d'artiste d'un trou noir.
Vue d'artiste d'un trou noir. — SIPANY/SIPA

Depuis sa création, l’accélérateur de particules du Cern, le LHC (pour Large hadrons collider), alimente tous les fantasmes. Matière obscure, mini-trous noirs, dimensions cachées: maintenant que sa puissance est doublée et alors qu'il redémarre dans quelques jours, que nous réserve le LHC? On décrypte tout ça avec Etienne Klein, chef du Laboratoire de recherche sur les sciences de la matière du CEA et auteur avec Anna Alter de De quels atomes sommes-nous faits? (ed. Le Pommier).

On a découvert le boson de Higgs

VRAI, MAIS... C’était un des objectifs du LHC, et la grande réussite de sa première phase de fonctionnement. «C’était une bonne nouvelle, d’autant qu'il a exactement les propriétés qui avaient été anticipées», souligne Etienne Klein. Mais le travail autour de cette particule n’est pas terminé, et les connaissances qu’on en a doivent être affinées. «Est-elle unique ou bien a-t-elle des partenaires électriquement chargés? Quel est son couplage avec les autres particules? Des questions restent en suspens...» note le physicien.

Une «matière noire» existe, et on ne la voit pas

VRAI. Avec la découverte du boson de Higgs, on peut dire que le modèle standard est complet. L’objectif du LHC, c’est d’aller au-delà de ce modèle, par exemple en partant à la recherche de la matière noire (ou sombre, ou obscure). «La dynamique des galaxies est telle qu’une matière invisible semble agir sur elle, la matière noire, constituée de particules que nous ne connaissons pas», explique Etienne Klein. On est sûr qu’elle existe… en théorie. Comme avec le boson de Higgs, on aimerait bien vérifier cette théorie. «S’il a de la chance, si la masse des particules de matière noire est dans sa "fenêtre de tir", le LHC pourrait les détecter», avance Etienne Klein. Ce qui nous aiderait beaucoup à comprendre comme fonctionne l’univers.

Des dimensions supplémentaires cachent des univers parallèles

PRESQUE. La physique actuelle a un problème: la gravitation, une des quatre forces fondamentales, échappe au modèle standard. «Elle est à part, mais il faut réconcilier ces forces, les unifier, afin d’être capable de décrire les situations où toutes les forces de la nature se combinent», explique Etienne Klein. Plusieurs théories concurrentes s’y essayent, qui ne fonctionnent pour certaines que si on ajoute des dimensions aux quatre qui forment notre espace-temps. «Repliées sur elles-mêmes, elles sont si petites qu’elles sont indétectables, décrit le physicien. Mais on ne doit pas parler d’univers parallèle: ces dimensions existent dans notre univers, simplement elles sont cachées.» Sauf si le LHC parvient à les détecter.

Le LHC pourrait créer des mini-trous noirs

VRAI, MAIS... Les capacités inédites du LHC ont fait croire à certains qu'il pourrait créer un trou noir qui avalerait la Terre. En 2008, le Cern avait même publié un texte balayant cette possibilité et affirmant que «les collisions produites au LHC ne présentent aucun danger et [qu’]il n’y a pas lieu de s’inquiéter». Etienne Klein confirme: «Des collisions à énergie bien plus haute surviennent dans la nature, par exemple par les rayons cosmiques qui bombardent la Lune.» Le LHC ne ferait donc que reproduire un phénomène naturel. «Même si des mini-trous noirs peuvent apparaître, ils s’évaporent avant d’avaler la matière environnante; la simple existence de la Lune en est une preuve suffisante.»