Un crâne préhistorique révolutionne l'histoire de l'évolution

SCIENCES Le fossile, retrouvé en Géorgie, est vieux d'1,8 million d'années...

20 Minutes avec AFP
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Un fossile de crâne a été retrouvé en Gérogie, à Dmanisi.
Un fossile de crâne a été retrouvé en Gérogie, à Dmanisi. — GEORGIAN NATIONAL MUSEUM / AFP

La découverte du fossile d'un crâne vieux d'1,8 million d'années   paraît indiquer que les lointains ancêtres de l'homme appartenaient à   une seule espèce, conclut jeudi une recherche qui vient alimenter le   débat parmi les paléontologues sur l'histoire de l'évolution humaine.

Contrairement aux autres fossiles connus du genre Homo,  ce crâne  bien préservé mis au jour à Dmanisi, en Géorgie, comprend une  petite  boîte crânienne, une longue face et de grandes dents, précisent  les  chercheurs, soulignant qu'il s'agit de l'ancêtre le plus ancien de   l'homme découvert hors du continent africain.

Des différences au niveau de l'apparence

Les différentes lignées auxquelles se réfère la  paléobiologie, comme  l'Homo habilis, l'Homo rudolfensis et l'Homo  erectus, ne différaient  en fait selon les auteurs de ces travaux que par  leurs apparences.

La mâchoire appartenant au crâne de Dmanisi a été trouvée  cinq ans  avant le reste du crâne, le plus massif jamais découvert sur  le site de  Dmanisi en partie excavé et qui fait dire aux chercheurs  qu'il  s'agissait d'un mâle.

Sur ce site, les chercheurs ont aussi mis au jour quatre  autres  crânes d'hominidés ainsi que divers animaux et plantes  fossilisés, et  quelques outils de pierre.

Un «état de préservation exceptionnel»

Fait sans précédent, ces vestiges se trouvaient tous au  même endroit  et datent de la même période, ce qui a permis de comparer  les traits  physiques de plusieurs ancêtres de l'homme moderne qui ont  coexisté.

«Leur état de préservation est exceptionnel, ce qui fait  que de  nombreux aspects inconnus du squelette d'hominidés peuvent être  étudiés  pour la première fois chez plus d'un individu», a expliqué lors  d'une  conférence de presse téléphonique David Lordkipanidze, directeur  du  musée national géorgien à Tbilissi.

«Si le fossile de la boîte crânienne et de la face de ce  crâne  avaient été trouvés séparément et à différents endroits en  Afrique, ils  auraient pu être attribués à des espèces différentes car ce  crâne est  le seul découvert à ce jour à réunir de telles  caractéristiques», a  souligné Christoph Zollikofer de l'Institut  d'Anthropologie de Zürich  (Suisse), un des co-auteurs de cette  découverte parue dans la revue  américaine Science.

Un grand visage protubérant

Outre la petite taille de son cerveau, environ un tiers  de celle  d'un homme moderne, le crâne découvert avait un grand visage   protubérant, une forte mâchoire avec de longues dents et des arcades   sourcilières épaisses.

Avec leurs différentes caractéristiques morphologiques,  les fossiles  de Dmanisi ont été comparés entre eux et à divers autres  fossiles  d'hominidés trouvés en Afrique remontant à 2,4 millions  d'années et à  d'autres mis au jour en Asie ou en Europe vieux d'1,8 à  1,2 million  d'années, précisent ces paléontologues.

«Les variations morphologiques entre les spécimens de  Dmanisi  n'excèdent pas celles trouvées parmi les populations modernes de  notre  propre espèce ou parmi les chimpanzés», souligne le professeur   Zollikofer.

Une seule espèce à cette période

«Comme nous constatons un type et une gamme de variations  semblables  dans les fossiles d'hominidés africains il est raisonnable  de penser  qu'il n'y avait qu'une seule espèce à ces périodes en  Afrique», a-t-il  poursuivi. «Et comme les hominidés de Dmanisi  ressemblent beaucoup à  ceux d'Afrique, et notamment aux premiers à avoir  divergé de  l'Australopithèque -la célèbre Lucy-, nous pouvons penser  qu'ils  appartiennent bien tous à la même espèce», a-t-il conclu.

Ces conclusions vont à l'encontre d'autres recherches récentes dont celle publiée en août 2012 dans la revue britannique Nature.

Les analyses d'une face, d'une mâchoire inférieure  complète et d'une  partie d'une seconde mâchoire inférieure découvertes  entre 2007 et  2009 au Kenya ont alors conduit les chercheurs à conclure  que ces  fossiles confirmaient que deux espèces distinctes d'Homo erectus  (Homo  habilis et Homo rudolfensis) ont co-existé en Afrique il y a près  de  deux millions d'années.

«Très sceptique»

Le paléobiologiste Bernard Wood, professeur à  l'Université George  Washington, s'est ainsi déclaré «très sceptique»  jeudi des conclusions  de l'analyse des crânes de Dmanisi.

Il a expliqué à l'AFP que la méthode retenue par les  auteurs ne  prend pas en compte d'autres différences importantes entre  les  spécimens, dont entre autres les mandibules.

Selon lui, ce crâne sans précédent dans ses caractéristiques «pourrait bien être en fait celui d'une nouvelle espèce d'hominidé».