Journée mondiale sans tabac : Bannie de ce campus rennais, la cigarette a de moins en moins d’adeptes

No smoking L’École des hautes études en santé publique a été la première à interdire le tabac sur son site, il y a cinq ans

Camille Allain
A l'occasion de la journée mondiale sans tabac, l'Ecole des hautes études en santé publique avait déployé des ambassadeurs sur son campus, où la cigarette est interdite depuis cinq ans.
A l'occasion de la journée mondiale sans tabac, l'Ecole des hautes études en santé publique avait déployé des ambassadeurs sur son campus, où la cigarette est interdite depuis cinq ans. — C. Allain/20 Minutes
  • A Rennes, l’Ecole des hautes études en santé publique a interdit de fumer sur son campus dès 2018.
  • Cinq ans après son adoption, la mesure fait l’unanimité, même chez les fumeurs, dont certains ont réduit leur consommation.
  • La France compte environ 12 millions de fumeurs. Un chiffre stable qui aurait grimpé sous l’effet de la crise sanitaire.

Voilà cinq ans qu’elle a arrêté. Et à aucun moment, elle n’a songé à replonger. Depuis qu’elle a arrêté le tabac, elle a le sentiment de sentir meilleur, d’être plus propre et d’avoir meilleure mine. Elle, c’est l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes, premier établissement d’enseignement supérieur de France à bannir le tabac, en 2018. Cinq ans après avoir chassé la cigarette de son campus, l’école organisait, ce mercredi, un événement festif dans le cadre de la Journée mondiale sans tabac. L’occasion de célébrer un choix audacieux, qui ne souffre aujourd’hui d’aucune contestation ni remise en question. « On nous a dit que le campus était sans tabac le premier jour. Ma première réaction, c’était de me dire que ça faisait ch… », reconnaît cet élève. La clope à la main, il se plie volontiers à l’interdiction de fumer sur le campus et se rend chaque jour dans l’un des cinq espaces dédiés. « Ça m’a permis de réduire ma consommation. Parfois, j’arrive à m’en passer parce que j’ai la flemme de bouger. »

Cathy Gauvin, infirmière addictologue à la clinique Saint-Laurent, intervient dans l’école chaque lundi pour des consultations gratuites. « En interdisant le tabac, on permet à chacun de réfléchir à sa façon de fumer, d’avoir un regard extérieur sur sa consommation. On peut se demander si cette cigarette est utile », explique la professionnelle de santé. Pour elle, « moins on voit de fumeurs autour de soi, moins on a envie de fumer ».

« Je pense que ça m’a permis de diminuer »

Et le constat est frappant. Sur le campus installé dans le quartier Villejean, on ne croise que de rares fumeurs, cantonnés à des espaces situés loin des bâtiments. Stigmatisant ? « C’est l’impression que j’avais au début, notamment parce qu’on n’était pas nombreux, témoigne un membre du personnel, cigarette électronique à la main. Mais ça a été accepté très vite. Je pense même que ça a joué sur ma consommation, que ça m’a permis de diminuer. »

Dans l’un des abris, nous croisons le chemin d’une « élève directeur ». Comme bon nombre d’étudiants inscrits ici, elle se prépare à diriger un établissement de santé. « Ça m’a clairement permis de diminuer, d’autant que j’habite sur le campus », précise-t-elle. En temps normal, elle aurait grillé « 5 à 6 clopes » le soir après les cours. Avec l’interdiction, elle s’en autorise « une après manger ». D’autres fumeuses croisées sur le campus estiment, quant à elles, que l’interdiction « n’a rien changé » pour elles mais applaudissent l’initiative.



Cinq ans après sa mise en place, ce choix de l’école de bannir le tabac de ses espaces intérieurs comme extérieurs est unanimement salué. « Ça rend le campus plus agréable. Avant, on avait des fumeurs à chaque entrée de l’école, ce n’était pas très agréable de passer dans un nuage », estime une élève de l’EHESP. Pendant leur pause déjeuner, des membres du personnel acquiescent : « Le matin, ça peut te donner la nausée. Tu avais parfois les odeurs qui montaient par la fenêtre, ce n’était pas agréable. » Autre bienfait visible de cette règle : la propreté. « On ne voit pas un seul mégot par terre. Ça aide à tenir le campus propre », estime un groupe d’étudiantes.

« Que l’école soit exemplaire »

L’établissement formant des futurs directeurs d’établissements de santé mise sur cette singularité et espère planter l’idée dans un coin de l’esprit de ses élèves. « A l’époque, le directeur voulait que l’école soit exemplaire. Il voulait leur donner envie de reproduire le même schéma dans leur établissement de demain », explique Marion Ganivet, DRH adjointe de l’école. Avant de bannir la cigarette, l’école avait créé un groupe de travail et sondé ses élèves et son personnel pour connaître son ressenti. « Dès le début, l’acceptabilité était déjà forte. Aujourd’hui, c’est entré dans les habitudes. Et quand on va sur un autre campus, on voit très vite la différence », poursuit la DRH adjointe. De l’autre côté de la route, le tabac n’a pas été banni du campus Villejean occupé par les universités Rennes-1 et Rennes-2. Et le contraste est flagrant.


A Rennes, l'Ecole des hautes études en santé publique a été le premier établissement d'enseignement supérieur à interdire le tabac sur son campus, en 2018.
A Rennes, l'Ecole des hautes études en santé publique a été le premier établissement d'enseignement supérieur à interdire le tabac sur son campus, en 2018. - C. Allain/20 Minutes

D’après une étude publiée ce mercredi par Santé publique France, notre pays compte 12 millions de fumeurs, soit plus de 30 % de la population âgée de 18 à 75 ans. Après des années de baisse, le chiffre est désormais stable, vraisemblablement en raison de la crise du Covid-19 et du stress qu’elle a engendré. Parmi les fumeurs quotidiens, 59,3 % déclarent avoir envie d’arrêter.