Cancer du sein : La plupart des hommes ne le savent pas, mais eux aussi peuvent être touchés

MALADIE MÉCONNUE Boule dans la poitrine, écoulement sanglant au niveau du mamelon, rougeurs, déformation du sein, douleur... les symptômes sont les mêmes que chez les femmes

Lise Abou Mansour
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Sur les 60.000 personnes touchées chaque année par un cancer du sein en France, 1% sont de sexe masculin.
Sur les 60.000 personnes touchées chaque année par un cancer du sein en France, 1% sont de sexe masculin. — Canva
  • Ce samedi, c'est la Journée mondiale de lutte contre le cancer. Et sur les 60.000 personnes touchées chaque année par un cancer du sein en France, 1 % est de sexe masculin.
  • Les hommes ne sachant pas qu'ils peuvent être touchés par ce type de cancer, ils vont souvent consulter plus tardivement un médecin que leurs homologues féminines.
  • « On diagnostique souvent les hommes à un stade plus avancé de la maladie », explique Ilan Darmon, oncologue radiothérapeute à l’Institut de radiothérapie Hartmann.

Quand on vous parle de cancer du sein, vous avez sûrement en tête l’image d’une femme. Et c'est logique. Il s’agit du cancer le plus répandu auprès de la population féminine. Mais contrairement aux idées reçues, les hommes aussi sont concernés par cette pathologie. Sur les 60.000 personnes touchées chaque année par un cancer du sein en France, 1 % est de sexe masculin. « Les hommes possèdent aussi une glande mammaire, même si elle est beaucoup plus petite, explique Myriam Delomenie, chirurgienne cancérologue à l’Institut français du sein. A partir du moment où il y a cette glande, on peut développer un cancer du sein. »

Les symptômes sont identiques chez les deux genres. Boule dans la poitrine à côté du mamelon, rougeurs, déformation, douleur, écoulement sanglant ou purulent au niveau du mamelon et ganglions sous l’aisselle sont autant d’indices qui devraient mettre la puce à l’oreille. D’autant plus chez les hommes. « Une tumeur débutante peut facilement passer inaperçu chez une femme en raison de son volume mammaire, considère Ilan Darmon, oncologue radiothérapeute à l’Institut de radiothérapie Hartmann. Chez leurs homologues masculins, comme la poitrine est moins proéminente, un nodule sous la peau doit pouvoir se sentir plus facilement. »

Un diagnostic à un stade plus avancé

Mais pour s’alerter, encore faut-il savoir qu’on peut y être sujet. D’après tous les spécialistes interrogés, la grande majorité des hommes ne savent pas qu’ils peuvent un jour être touchés par ce type de cancer. « Les hommes sentant une grosseur au niveau de leur poitrine se disent qu’ils ont dû se donner un coup ou pensent à une inflammation qui va se résorber toute seule », explique Emmanuel Ricard, porte-parole de la Ligue contre le cancer. Leur premier réflexe n’est donc pas de consulter leur médecin traitant mais plutôt de laisser le temps faire son affaire. Sauf que durant cette période, la tumeur se développe. « On diagnostique souvent les hommes à un stade plus avancé de la maladie, témoigne Ilan Darmon. La peau est alors atteinte, signe que la tumeur a déjà bien avancé. »

Le pronostic étant étroitement lié au stade du cancer au moment du diagnostic, les chances de survie des hommes sont plus faibles que celles des femmes. Si neuf femmes sur dix survivent après cinq ans, ce chiffre descend à huit chez leurs homologues masculins, selon Myriam Delomenie. Le risque de récidive est également supérieur chez ces derniers.



Pas de dépistage à grande échelle

Pour permettre un diagnostic plus précoce, la prévention est donc primordiale. Mais si le cancer du sein bénéficie de nombreuses campagnes d’affichage - dont le fameux octobre rose –, de spots télé et autres prospectus dans les salles d’attente de médecins généralistes, les silhouettes masculines n’y sont quasiment jamais représentées.

Contrairement aux femmes, les hommes ne bénéficient pas non plus d’un dépistage organisé systématique. « Les grosses campagnes de dépistage concernent des maladies touchant une grande partie de la population, explique Ilan Darmon. Pour parler de façon très pragmatique, faire un dépistage chez l’homme va avoir un coût de santé publique important pour un rendu assez faible étant donné qu’il concerne peu de personnes. »

Exit donc les mammographies et autres échographies systématiques à destination des hommes. « D’autant plus que les radiations favorisent l’apparition des cancers du sein, explique le porte-parole de la Ligue contre le cancer. Il y a donc plus de risques, pour la population générale masculine, à faire des dépistages systématiques que de bénéfices ».

Une enquête génétique nécessaire

Plutôt que de réaliser un dépistage à grande échelle, Emmanuel Ricard appelle alors à privilégier le suivi personnalisé. Car certains hommes ont plus de risques d’être touchés. Une importante consommation d’alcool, une obésité ou une exposition professionnelle à de hautes températures favorisent l’apparition de la maladie. 

Mais une mutation des gènes BRCA1 et BRCA2, repérable à la suite d'un test sanguin, peut aussi prédisposer au cancer du sein. Si 5 à 10 % des malades féminines possèdent cette mutation génétique, ce chiffre monte à 15 voire à 20 % chez les hommes. « Quand un cancer du sein est détecté chez un homme, une enquête génétique doit être réalisée afin de détecter si une mutation génétique est à l’origine de sa pathologie», explique Myriam Delomenie. Si c’est le cas, les filles ou les sœurs du malade ont beaucoup plus de risques de développer à leur tour la pathologie. Elles devront donc être particulièrement vigilantes et se faire surveiller régulièrement.

Les spécialistes interrogés encouragent à se palper la poitrine afin de détecter une éventuelle irrégularité peut par contre se faire. Et Myriam Delomenie de résumer : « Au moindre doute, consultez. »