Qu’est-ce que la 3-MMC, la drogue de synthèse vendue comme la nouvelle cocaïne en moins cher ?

SUBSTANCE ADDICTIVE D’abord consommée dans le cadre de soirées de chemsex, la 3-MMC est une drogue de synthèse addictive et dangereuse qui se diffuse plus largement dans un cadre festif

Anissa Boumediene
— 
Moins chère que la cocaïne, la 3-MMC est la nouvelle drogue de synthèse à la mode dans les soirées.
Moins chère que la cocaïne, la 3-MMC est la nouvelle drogue de synthèse à la mode dans les soirées. — DHOME/SIPA
  • Apparue au début des années 2010, la 3-MMC est une drogue de synthèse qui a de plus en plus de consommateurs.
  • D’abord consommée dans le cadre de soirée de chemsex, elle attire aujourd’hui de plus en plus de consommateurs.
  • Mais cette substance psychoactive, très addictive, est, comme toutes les drogues, potentiellement très dangereuse, voire mortelle.

EDIT 20 février 2023 : Le comédien Pierre Palmade a été testé positif à la cocaïne après un grave accident de la route le 10 février. A 54 ans, il s’était déjà confié sur son addiction à la drogue lors d’une audition à la police dans une précédente affaire, comme le révèle le JDD. Il évoque notamment la 3-MMC, cette drogue de synthèse.

3-MMC. Un chiffre et trois lettres pour désigner la drogue de synthèse qui s’impose comme la nouvelle reine des soirées : la 3-méthylméthcathinone. Apparue au début des années 2010, elle est présentée comme la nouvelle cocaïne en moins cher, et « suscite une inquiétude grandissante en Europe », rapporte l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT).

Pourquoi la consommation de cette drogue explose-t-elle ? Pourquoi inquiète-t-elle autant les autorités sanitaires européennes ? 20 Minutes fait le point sur cette nouvelle substance addictive et dangereuse.

Quelle est la composition de la 3-MMC et sous quelles formes se présente-t-elle ?

La 3-MMC appartient à la famille des cathinones de synthèse, « un groupe de substances stimulantes chimiquement liées à la cathinone, la principale substance psychoactive de la plante de khat (Catha edulis) », décrit l’OEDT. Elle fait partie des « NPS », les nouveaux produits de synthèse, « des substances psychoactives qui tentent de reproduire les effets de produits illicites existants tels que l’ecstasy/MDMA, les amphétamines, la cocaïne, le cannabis, le LSD », explique Drogues Info Service.

Chimiquement, « la cathinone est similaire à l’amphétamine, indique l’Observatoire européen. Fin 2021, l’OEDT surveillait 162 cathinones de synthèse, ce qui en fait la deuxième plus grande catégorie de NPS (après les cannabinoïdes synthétiques) sous surveillance ».

L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), relève ces dernières années « une diversification des formes proposées » de 3-MMC : « auparavant poudre, puis cristal et désormais comprimés ». Elle peut ainsi être « ingérée, le plus souvent sous forme de parachute (dans une boulette de papier à cigarette), diluées dans une boisson, sniffée, injectée ou pluggée (insérée dans l’anus à l’aide d’une seringue sans aiguille) », détaille Drogues Info Service.

Quels effets recherchent ses consommateurs ?

« Les cathinones sont généralement utilisées pour leurs effets stimulants, entactogènes (elles favorisent le contact) et empathogènes (elles augmentent l’empathie) », relève Drogues Info Service. La 3-MMC procure ainsi « un sentiment d’euphorie, avec une sensation d’énergie, une atténuation de la sensation de fatigue, un besoin incontrôlable de parler, et une sensation d’être plus proche des autres. Elle augmente, la confiance en soi et procure une sensation de puissance », poursuit Drogues Info Service, qui décrit également « une intensification des sensations et, en contexte sexuel, une augmentation de la sensualité et de l’endurance ». Des effets qui se manifestent très rapidement après une prise.

« Ces usagers définissent les effets de la 3-MMC comme une combinaison de ceux de la cocaïne, de la MDMA et des amphétamines et soulignent leur adaptation aux sociabilités festives », rapporte l’OFDT. La 3-MMC a ainsi pour but « de lever les inhibitions, d’augmenter le plaisir », poursuit l’Observatoire français. Depuis le début des années 2010, sa consommation était observée « presque exclusivement parmi des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) dans des contextes mêlant sexualité, le plus souvent en groupe, et consommation de produits psychoactifs de synthèse », ou chemsex. Les cathinones font d’ailleurs partie des produits les plus utilisés pour le chemsex.

Comment expliquer l’explosion de sa consommation ?

Ces dernières années, la consommation de 3-MMC dépasse le cadre du chemsex pour se diffuser plus largement dans le monde de la nuit et en dehors des communautés HSH. En cause, une facilité d’accès qui favorise sa démocratisation. « La 3-MMC fait l’objet, depuis le milieu des années 2010, d’une vente en livraison à domicile auprès de chemsexeurs, par des vendeurs qui la proposent via certaines applications de rencontres gay, souligne l’OFDT. Depuis 2019, des réseaux structurés et hiérarchisés, vendant habituellement cannabis, cocaïne, MDMA et s’adressant à une clientèle plus large et diversifiée, proposent ponctuellement de la 3-MMC ».

Une drogue d’autant plus facile à se procurer qu’elle coûte bien moins cher que la cocaïne : à partir de « moins de 10 euros le gramme », selon l’OFDT, soit « bien en deçà de la cocaïne [dont le prix oscille entre 70 et 80 euros le gramme]. Nombre d’usagers interrogés mettent ainsi en avant l’attractivité financière de la 3-MMC, cette dernière étant parfois présentée à ce titre comme une alternative à la cocaïne ou, plus rarement, aux amphétamines ».

Résultat, cette drogue de synthèse inonde le marché européen : « Au total, 3.300 kg de ces poudres de cathinone ont été saisis en 2020, dont 750 kg de 3-MMC », pointe l’OEDT. Des poudres qui « semblent désormais être fabriquées en Inde et importées en Europe » à l’échelle industrielle, ajoute-t-il. Un constat inquiétant pour l’OFDT, pour qui « la diffusion des usages de la 3-MMC est un phénomène marquant de 2020 », pourtant caractérisée par le confinement lié à la pandémie de Covid-19.

Quels sont les risques associés à cette drogue de synthèse ?

A l’instar des autres substances psychoactives, la 3-MMC est associée à un risque élevé d’addiction : « La faible durée des effets et la forte anxiété qui suit les prises provoquent un fort craving (envie irrépressible de consommer à nouveau), qui favorise une consommation compulsive, alerte Drogues Info Service. La consommation régulière de cathinones entraîne l’usager à augmenter les doses consommées pour obtenir les mêmes effets. Et à l’arrêt, l’usager ressent des troubles dépressifs importants qui peuvent durer plusieurs semaines. »

En outre, la consommation de cette drogue de synthèse peut notamment causer des « maux de tête, nausées et vomissements », ajoute Drogues Info Service. Ainsi qu’une sensation de « nez qui brûle et qui coule (lié au sniff), les extrémités froides et bleutées, des troubles de l’érection et des convulsions ». La phase de descente « peut être très désagréable, elle se traduit par un état d’épuisement dû aux insomnies, une anxiété importante, voire de la paranoïa, des fourmillements » ou encore « une augmentation du rythme cardiaque ».

Mais la consommation de 3-MMC peut aussi être fatale. Des cas d’infarctus du myocarde, de défaillance d’organes et d’overdoses ayant entraîné la mort ont été rapportés. Au total, l’OEDT recense 27 décès liés à la consommation de 3-MMC en Europe​.