Guerre en Ukraine : Ruée dans les pharmacies pour avoir de l’iode mais « ça ne sert à rien »
PEUR Avec le conflit en Ukraine, de plus en plus de patients demandent des comprimés contenant de l'iode. Alors que le médicament est réglementé et seulement accessible dans certaines zones
- L’explosion d’une centrale nucléaire ? Une guerre nucléaire ? Le conflit en Ukraine a fait resurgir certaines peurs au sein de la population française. De plus en plus de personnes demandent en pharmacie des comprimés contenant de l’iode.
- Outre les effets secondaires, cet iodure de potassium conditionné en boîte de dix comprimés n’est pas accessible n’importe où…
- « Leur distribution est bien réglementée », explique le vice-président du conseil régional de l’ordre des pharmaciens dans le, Christian Barth. « Il s’agit d’un stock géré par l’armée et confié à des pharmacies proches d’une centrale, car les comprimés sont seulement accessibles aux personnes qui vivent dans un rayon de 20 km autour d’un réacteur nucléaire. »
Des masques, du gel hydroalcoolique, des vaccins et maintenant… de l’iode. Les pharmacies ont vu les demandes de leurs patients évoluer entre la crise sanitaire et la guerre en Ukraine. Surtout depuis l'attaque de la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d’Europe, la semaine dernière.
« Les gens ne le cachent pas, ils ont peur du risque radioactif », explique un titulaire d’officine à Strasbourg. Dans la capitale alsacienne, plusieurs de ses confrères le confirment : les requêtes se multiplient ces derniers jours afin d’obtenir de l’iodure de potassium. Soit un médicament conditionné en boîte de dix comprimés et pas accessible n’importe où.
« Leur distribution est bien réglementée », explique le vice-président du conseil régional de l’ordre des pharmaciens dans le Grand-Est, Christian Barth. « Il s’agit d’un stock géré par l’armée et confié à des pharmacies proches d’une centrale, car les comprimés sont seulement accessibles aux personnes qui vivent dans un rayon de 20 km autour d’un réacteur nucléaire. »
Dans le Bas-Rhin, il faut donc vivre autour de Fessenheim pour avoir accès à la fameuse boîte blanche et bleue. « Ici, les habitants sont au courant qu’ils ont droit à une boîte par foyer. Ils doivent simplement nous montrer un justificatif de domicile et, pour les nouveaux arrivants, un papier de la mairie », détaille Mylène, de l’unique pharmacie de la ville.
La professionnelle de santé n’a pas remarqué une demande accrue de la part des locaux, plutôt de personnes géographiquement éloignées. « On nous appelle de Colmar, d’Obernai et même d’autres régions de France pour acheter de l’iodure de potassium. Les gens croient que c’est en vente libre comme en Belgique et sont prêts à payer. Mais ça ne sert à rien, on ne peut pas leur en délivrer comme ça… »
« Il n’y a pas lieu d’en prendre de manière préventive »
Surtout que ces comprimés ne sont à ingérer qu’en cas d’accident nucléaire et sur ordre des autorités sanitaires. « C’est pour saturer la glande thyroïdienne en iode et donc la protéger d’iode radioactif. Il n’y a pas lieu d’en prendre de manière préventive », reprend Christian Barth en alertant sur « les risques » liés à une automédication intempestive. « Et ça ne protégera pas de tout en cas d’explosion ou d’attaque nucléaire. Il y aura peut-être d’autres émissions, prolonge Arnaud, titulaire d’officine en centre-ville de Strasbourg. C’est comme si on pensait qu’un casque de moto évitait d’avoir une entorse au genou… »
Lui a également remarqué d’autres dérives dans ses rayons depuis le début du conflit en Ukraine : le report vers des produits qui contiennent de l’iode. « On me demande des compléments alimentaires, des multivitamines, n’importe quoi où on peut en trouver. Sauf que ce n’est pas du tout le même dosage. Il faudrait 400 gélules pour atteindre les 65 milligrammes contenus dans le comprimé d’iodure de potassium. Autant qu’ils mangent un bon plateau d’huître ! »
Dans le même genre, une de ses consœurs conseille, non sans s’amuser de son humour potache, « d’aller plutôt lécher des moules ». « J’ai eu vent de pharmacies où il y avait eu des conflits à cause de tout ça. Ou parfois de la suspicion, comme si on refusait d’en délivrer », reprend le vice-président du conseil régional de l’ordre des pharmaciens. Il se souvient d’un précédent à propos des comprimés d’iodure de potassium. « A l’époque de Tchernobyl ».