Lille : Comment un trentenaire à vu passer trois cœurs dans son corps en trois mois

MEDECINE Après avoir plusieurs mois avec une machine dans l’abdomen, un trentenaire a pu bénéficier d’une transplantation définitive

Mikaël Libert
le cœur artificiel total de la société française Carmat.
le cœur artificiel total de la société française Carmat. — Carmat Aeson
  • Un Lillois de 30 ans a pu bénéficier d’une greffe d’un cœur artificiel total de dernière génération de l’entreprise française Carmat.
  • Cet appareil permet d’attendre l’arrivée d’un cœur humain en réduisant les risques de complications et en augmentant l’autonomie.
  • Le patient a finalement pu recevoir une greffe définitive de cœur après avoir vécu trois mois avec cet appareil.

Trois cœurs en trois mois. Début avril a marqué la fin d’une longue épreuve pour un Lillois de 30 ans, déficient cardiaque, et une grande première française pour le Centre hospitalier universitaire (CHU) de Lille. Le premier a reçu un cœur presque neuf et le CHU a réussi une transplantation inédite.

C’est presque par hasard que ce patient a découvert son problème cardiaque. Lassé de ressentir de terribles crampes abdominales en mangeant, il est allé consulter, fin d’année 2020, un spécialiste. Une initiative qui lui a sauvé la vie : « Nous nous sommes rendu compte que son cœur ne pompait plus du tout. Il a eu de la chance », reconnaît le professeur André Vincentelli, chirurgien thoracique et cardiovasculaire au CHU.

Un cœur artificiel total de dernière génération

Placé sur la liste d’attente des receveurs d’organes, le trentenaire a tout de même dû se faire greffer un cœur artificiel le temps de lui en trouver un humain. « Les délais peuvent être longs en raison de la pénurie puisque en France, la moyenne est de deux receveurs pour un greffon », affirme le professeur. Dans son malheur, le patient a eu de la chance car il aurait très bien pu se retrouver avec l’ancien modèle de cœur artificiel dont les faiblesses provoquent parfois des accidents vasculaires cérébraux (AVC) et qui nécessite de trimbaler un compresseur sur un petit chariot.

« Nous avons pu lui implanter un cœur artificiel total fabriqué par la société française Carmat qui vient d’obtenir l’autorisation de procéder à des essais en France », explique André Vincentelli. Les avantages de ce matériel sont multiples : ses valves biologiques excluent les risques d’AVC et l’appareil est électrique et non pneumatique. Il fonctionne sur batteries que le receveur porte dans un sac à dos lui permettant d’avoir entre 4 et 5 heures d’autonomie. Ce bijou de technologie a un prix : 150.000 euros. Avec l’assistance et la surveillance, mais sans compter l’opération chirurgicale.

Bientôt des cœurs artificiels définitifs ?

Un autre avantage de taille, c’est que le patient peut reprendre une vie quasiment normale après une courte réadaptation cardiaque. « Il ne manque pas grand-chose pour que ce type de cœur soit définitif. Travailler sur la durabilité de la prothèse et résoudre le problème du câble d’alimentation qui traverse l’abdomen », reconnaît le médecin. Lorsque tout cela sera réglé, la greffe traditionnelle n’aura plus vraiment la cote, notamment parce qu’elle nécessite toujours la prise d’un traitement immunodépresseur à vie.

Mais comme on n’en est pas encore là, le patient lillois a finalement reçu un cœur humain, début avril. « Retirer le cœur artificiel et installer le greffon a demandé une équipe nombreuse et pluridisciplinaire. L’opération a duré entre 6 et 7 heures », estime le professeur Vincentelli. Le jeune greffé, lui, va très bien.