Coronavirus : Quelles sont les personnes les plus vulnérables face au virus ?

EPIDEMIE Le nouveau coronavirus a fait plus de 3.000 morts dans le monde, dont 4 en France

Oihana Gabriel
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Un test de température en Thaïlande, il y a eu le premier mot le 1er mars 2020.
Un test de température en Thaïlande, il y a eu le premier mot le 1er mars 2020. — Yuttachai Kongprasert / SOPA Ima
  • Le Covid-2019 a fait 3.200 morts en trois mois, mais chacun n’est pas aussi vulnérable face à l’épidémie.
  • Si cette nouvelle maladie semble moins sévère que les dernières épidémies (Sras, Mers...), elle est plus virulente sur les personnes âgées et/ou déjà malades que sur les enfants et les personnes en bonne santé.
  • Mais les analyses de ces premières tendances restent prudentes, car on a encore peu de recul et d’informations précises sur le profil des malades et des personnes décédées.

Le bilan de l’épidémie de coronavirus a dépassé les 3.200 morts ce mercredi (à l’heure où nous publions cet article). Un chiffre qui évolue chaque jour. Et qui ne cesse d’inquiéter dans le monde entier. Mais ce virus, moins sévère que les dernières épidémies (Sras, Mers, Ebola…) ne s’attaque pas à tout le monde de la même façon.

80 % des cas sont bénins

Tous les spécialistes appellent à la plus grande vigilance. Car nous n’avons que des informations parcellaires et évolutives sur ce nouveau coronavirus, et un recul de seulement deux mois. Ce qui semble se dessiner, c’est que ce coronavirus reste peu mortel : entre 1 % et 3 % des malades en moyenne en décèdent. C’est dix fois plus que la grippe saisonnière. Mais moins que les précédentes épidémies liées à un coronavirus : 34,5 % pour le Mers (syndrome respiratoire du Moyen-Orient) et 9,6 % pour le Sras (syndrome respiratoire aigu sévère).



« Il faut rappeler que dans 80 % des cas, ce coronavirus prend une forme bénigne », rassure William Dab, médecin et ancien président de la Direction générale de la santé. Autre nuance : il est possible qu’un certain nombre de personnes soient porteuses du virus, mais sans symptôme, ou souffrent d’un simple rhume qui ne sera pas diagnostiqué comme un Covid-2019. Dans ce cas, il y aurait en réalité beaucoup plus de personnes infectées… et un taux de mortalité plus bas.

Les personnes âgées plus touchées

L’analyse la plus complète à ce jour, publiée le 17 février par les autorités chinoises, puis le 24 février dans la revue médicale américaine Jama, montre que le taux de mortalité augmente nettement avec l’âge. Dans cette étude, sur près de 45.000 cas confirmés, le taux moyen de mortalité est de 2,3 %. Jusqu’à 39 ans, le taux de mortalité reste très bas, à 0,2 %. Puis il passe à 0,4 % chez les quadragénaires, 1,3 % chez les 50-59 ans, 3,6 % chez les 60-69 ans et 8 % chez les 70-79 ans.

Les personnes âgées de plus de 80 ans sont les plus à risque, avec un taux de mortalité de 14,8 %. Hors de Chine, on trouve aussi de nombreuses personnes âgées parmi les victimes. En France, trois des quatre patients décédés avaient plus de 80 ans (le quatrième avait plus de 60 ans). « Il semble, en l’état actuel, que la dangerosité augmente avec l’âge, confirme Jean-Philippe Santoni, pneumologue à la Fondation du souffle. Avec une nette aggravation chez des sujets qui ont plus de 60 ans et un risque de décès beaucoup plus élevé chez des sujets de 80 ans et plus. » Ce qui n’étonne pas tellement les chercheurs. Dans toutes les épidémies, de grippe notamment, les personnes âgées sont les plus à risque, notamment parce que les défenses immunitaires diminuent avec l’âge. « Ces personnes vulnérables doivent connaître et respecter les mesures barrières, conseille le pneumologue. Se laver les mains 5 à 6 fois par jour, ne pas voir les petits-enfants s’ils sont malades ou s’ils reviennent d’une zone à risque, éviter les poignées de main et les embrassades, aérer leur logement deux fois par jour et bien nettoyer les poignées de porte. »

Les malades plus vulnérables

Autre facteur qui joue dans l’équation : « Les personnes âgées sont aussi la tranche de la population où les maladies cardio-vasculaires, les cancers, les maladies respiratoires sont les plus nombreuses », poursuit le pneumologue. Pour William Dab, ces profils sont plus larges : « les patients cardiaques, ceux qui suivent un traitement immunosuppresseur en cas de cancer ou de sida, et les patients atteints d’une broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) sont les plus à risque ». D’ailleurs, lundi, l’association France BPCO a alerté dans un courrier le ministre de la Santé : « Le Covid-19 fera en priorité des dégâts chez les BPCO, tout simplement parce qu’un déficient respiratoire est la première victime affectée par une maladie respiratoire. »

D’autres maladies peuvent jouer un rôle : le diabète, l’asthme ou l’hypertension augmentent les risques. Si le taux de mortalité, toujours selon cette étude chinoise, atteint 7,3 % chez les personnes diabétiques, 6 % chez les patients ayant de l’hypertension et 5,6 % pour ceux qui souffrent d’un cancer (5,6 %), il tombe à 0,9 % chez les personnes en bonne santé.

Les enfants moins touchés ?

Une spécificité qui semble en revanche étonner les médecins, c’est que peu d’enfants soient atteints par ce Covid-2019, et que les cas semblent peu sévères, pour le moment du moins. Encore selon l’analyse chinoise, seulement 1 % concernait des enfants de moins de 9 ans.

« C’est une différence épidémiologique notable par rapport à la grippe, qui s’attaque aux moins de 20 ans avec parfois des complications importantes, notamment chez les nourrissons, relève Jean-Philippe Santoni. Il est possible que les enfants aient une immunité plus robuste et plus récemment acquise au travers de contaminations d’autres coronavirus. Car ce Covid-2019 fait partie d’une grande famille de coronavirus responsables des rhumes saisonniers. » Peut-être, aussi, que les petits sont moins testés pour ce nouveau virus, car beaucoup d’entre eux traversent l’hiver la morve au nez…

Une différence hommes/femmes ?

Certains estiment aussi que le virus s’attaque davantage aux hommes qu’aux femmes. Alors qu’ils représentent 51,4 % des cas confirmés dans cette étude chinoise, ils pèsent pour presque deux tiers des décès (63,8 %). Prudence, répond William Dab, qui rappelle que les hommes sont « davantage soumis aux maladies cardio-vasculaires. »

Pour certains observateurs, ce léger décalage pourrait être lié au fait que les hommes fument davantage que les femmes (dans certains pays). Or, le tabac est également un facteur de risque. une étude chinoise menée sur 1.099 patients a en effet démontré que 12 % des patients infectés et fumeurs sont décédés ou sont passés par la réanimation, contre 5 % des non-fumeurs. Une fragilité tout aussi remarquable pour la grippe ou les pneumonies… Peut-être que les fumeurs les plus angoissés y verront l’occasion d’éteindre leur dernière cigarette ?