Nutri-score : D’après l’UFC-Que Choisir, les biscuits et céréales du petit-déjeuner sont bourrés de sucre et de gras
NUTRITION•Les produits préférés des enfants pour le petit-déjeuner affichent rarement leur Nutri-score, souvent parce que la note serait médiocreAnissa Boumediene
L'essentiel
- L’association UFC-Que Choisir plaide ce mardi pour que l’étiquetage nutritionnel Nutri-score devienne obligatoire en Europe.
- Aujourd’hui, dans les rayons français, seuls 5 % des produits alimentaires affichent leur Nutri-score.
- L’association, qui a passé au crible une trentaine de produits prisés des enfants au petit-déjeuner ou au goûter et ne disposant pas de leur Nutri-score, a calculé leur note et dévoile un tableau nutritionnel très peu satisfaisant, avec des produits ultratransformés, très riches en sucre et en graisse.
Des bombes de sucre et de gras, ultratransformées, qui excitent les papilles des enfants et les rendent accros. Voici, en substance, les caractéristiques nutritionnelles médiocres des produits que les petits affectionnent pour le petit-déjeuner et le goûter, selon l'UFC-Que Choisir. Pourtant, les parents sont vigilants à la qualité des produits qu’ils achètent. Mais entre la course du quotidien millimétré, les goûts de chacun de leurs enfants et les listes d’ingrédients aussi longues et indéchiffrables qu’un parchemin antique au dos des paquets, donner des petits-déjeuners et goûters sains à ses enfants devient une mission difficile à accomplir.
C’est pour y voir plus clair que l’association a passé au crible une trentaine de produits alimentaires que les enfants adorent, mais qui n’affichent pas leur Nutri-score, afin d’évaluer leurs qualités nutritionnelles. Car « deux ans après son introduction officielle, l’étiquetage nutritionnel simplifié Nutri-score n’est présent que sur 5 % des produits vendus en grande distribution », déplore l'UFC-Que Choisir. Mais pourquoi cet indice n’est-il pas plus présent sur les emballages ? Et que cachent ces produits prisés des enfants qui n’affichent pas leur Nutri-score ?
Des étiquettes difficiles à décrypter
« Nous avons procédé à ce test pour dévoiler les qualités nutritionnelles de l’alimentation des enfants, explique à 20 Minutes Olivier Andrault, chargé de mission alimentation et nutrition à l’UFC-Que Choisir. A ce jour, deux ans après son introduction officielle, l’étiquetage Nutri-score n’est affiché que sur 5 % des produits alimentaires. Or, près d’un enfant sur cinq est touché par l’obésité ou le surpoids. C’est pourquoi il faut proposer aux parents un outil utile, facile à comprendre et lisible immédiatement pour qu’ils achètent des produits dont la composition nutritionnelle est affichée en toute transparence ». Déjà en place en France depuis l’automne 2017, mais de façon facultative en raison de la réglementation européenne actuelle, ainsi qu’en Belgique et en Espagne, ce système d’étiquetage est basé sur cinq lettres (A, B, C, D et E) et un code couleurs, du vert au rouge, selon la qualité nutritionnelle de l’aliment.
« L’affichage de l’indice Nutri-score se fait au bon vouloir des industriels, qui ne jouent pas le jeu, regrette Olivier Andrault. C’est pourquoi il faut rendre le Nutri-score obligatoire : aujourd’hui, 82 % des consommateurs n’arrivent pas à lire le complexe tableau d’analyse nutritionnelle obligatoire ». Dans ce flou artistique bien organisé, « trop d’industriels continuent à saturer leurs produits de sucres et de matières grasses » alors que le Nutri-score permet « de faire comprendre en un clin d’œil leur mauvaise qualité nutritionnelle », insiste l’association.
Des céréales aussi grasses qu’un croissant au beurre
Si l’étiquetage Nutri-score était obligatoire, que liraient les parents de manière bien lisible sur l’emballage des biscuits et autres céréales dont raffole leur progéniture ? « Ils verraient que la majorité des produits du petit-déjeuner écopent seulement d’un D, à l’instar des Frosties ou des Trésor, soit le même score qu’un croissant au beurre, répond Olivier Andrault, de l’UFC-Que Choisir. Cela ne signifie pas qu’il faut bannir ces produits de l’alimentation des enfants, mais qu’ils doivent être consommés occasionnellement, et en petites quantités ».
Mais qu’y a-t-il dans les céréales pour qu’elles soient aussi grasses que des viennoiseries ? « Les céréales du petit-déjeuner ont un nom trompeur, qui laisse penser aux parents qu’ils vont donner un produit sain à leurs enfants pour le petit-déjeuner, décrypte le Dr Laurent Chevallier, médecin nutritionniste et coauteur de Alors, on mange quoi (éd. Fayard). Il faudrait plutôt parler de "succédanés de céréales", tant les céréales brutes sont ici ultratransformées, chauffées à haute température et bourrées de sucre et d’additifs chimiques. L’alternative saine, c’est le pain au levain du boulanger, mais si les enfants sont attachés à leurs céréales, alors mieux vaut opter pour du muesli bio sans sucre ajouté, c’est ce qu’il y a de plus sain dans cette catégorie de produits ».
Les biscuits du goûter : de très mauvais élèves
Et au rang des produits alimentaires les plus plébiscités par les enfants, les biscuits pour le goûter sont les plus mauvais élèves. « Ils sont ce qu’il y a de pire sur le plan nutritionnel : tous les produits testés sont notés D voire E, indique Olivier Andrault. Les Prince de Lu, ou les Savane de Brossard, sont aussi gras et sucrés qu’un beignet au chocolat. Et les biscuits fourrés Pepito Pockitos, notés E, sont encore pires : le sucre et les matières grasses représentent deux tiers de leur poids », avertit Olivier Andrault. Un cocktail de sucre et de graisse que l’on retrouve fréquemment dans les biscuits préférés des enfants, « parce que les industriels y ajoutent beaucoup de gras et de sucre pour rendre leurs produits addictifs pour les enfants. Ajoutez à cela une boisson à base de jus concentré, de sucre et d'additifs, et c’est ce qu’il y a de pire sur le plan nutritionnel. Ces produits sont une bombe à retardement : les enfants y sont accros, et cela risque encore d’augmenter l’obésité chez les petits, et donner des générations d’adultes touchés par les conséquences de ce surpoids : diabète, maladies cardiovasculaires et cancer, énumère le nutritionniste. Donc, au quotidien, la boisson à privilégier est l’eau, et le meilleur goûter se compose d’un fruit frais, et de deux carrés de chocolat avec du pain ».
Toutefois, pour le médecin nutritionniste, « le Nutri-score n’est pas complet, puisqu’il ne prend pas en compte la présence d’additifs ou d’acides gras trans, et ne précise pas clairement la fréquence à laquelle les produits peuvent être consommés en fonction de leur note. Mais c’est toutefois une avancée positive ». Ainsi, poursuit Olivier Andrault, de l’UFC-Que Choisir, « si le Nutri-score était affiché, les parents écarteraient beaucoup de ces aliments industriels destinés aux enfants, assure Olivier Andrault. Et cette pression des consommateurs, qui pèse déjà, pousserait davantage à revoir la composition de leurs produits pour proposer des recettes plus saines ». L’association appelle ainsi l’opinion publique à se mobiliser en signant la pétition d’initiative citoyenne européenne www.pronutriscore.org. Lancée en mai par plusieurs associations de consommateurs européens pour demander à la Commission européenne de rendre obligatoire le Nutri-score, elle a rassemblé pour l’heure environ 80.000 signatures. « Les pouvoirs publics ont failli, notamment sous le poids des lobbies de l’industrie agroalimentaire, commente le Dr Laurent Chevallier. Donc, pour améliorer les choses, il faut en passer par des mouvements citoyens ».