«Dry January»: Supprimer l'alcool en janvier, c'est vraiment bon pour la santé?

ALCOOL Alors que cette année 2019 vient de débuter, beaucoup de Britanniques se lancent dans le défi du Dry January, soit dire adieu à l'alcool sous toutes ses formes pour un mois...

Oihana Gabriel
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Illustration d'un verre d'eau. En janvier, certains se lancent dans le défi zéro alcool. Une bonne idée pour votre santé?
Illustration d'un verre d'eau. En janvier, certains se lancent dans le défi zéro alcool. Une bonne idée pour votre santé? — Pixabay
  • Après les excès et coupes de champagnes des fêtes de fin d'année, le moment douloureux des bonnes résolutions arrive en ce début 2019.
  • Depuis 2013, certains Britanniques s'adonnent au Dry January, un défi qui consiste à ne pas boire une goutte d'alcool pendant un mois.
  • Un break très bon pour la santé, aussi bien à court terme, pour sa peau, son poids et son sommeil qu'à long terme car une étude prouve que les challengers en ont profité pour limiter leur consommation d'alcool le reste de l'année.

Après les fêtes et excès de fin d’année, ça y est, c’est l’heure des lendemains qui déchantent. Et il est possible que votre foie et votre balance vous fassent la gueule. Comme souvent en ce début d’année, de nombreux Français vont prendre de bonnes résolutions qu’ils tiendront au mieux quelques semaines… Mais certains pourraient regarder du côté de la Grande-Bretagne où depuis 2013 des millions de Britanniques s’adonnent au « Dry January », comprendre « Janvier sobre ». Une campagne invitant, notamment sur les réseaux sociaux, à refuser pendant un mois entier toute goutte d’alcool. Et si ce petit break était une excellente idée pour votre santé ?


Des effets positifs rapides pour la peau, le poids et le sommeil

On manquait jusqu’ici de données scientifiques pour savoir si un seul mois par an d’abstinence pouvait être réellement bénéfique sur le long terme. Mais grâce à l’équipe du docteur Richard de Visser de l’université de Sussex, on sait désormais que participer au « Dry January» a plusieurs impacts positifs sur votre santé. En effet, sur les 1.700 challengeurs de ce défi sans alcool en 2018, suivies par ces chercheurs, 71 % ont amélioré la qualité de leur sommeil, corollaire évident, 67 % ont gagné en énergie et 57 % en concentration. Autre bénéfice à court terme et esthétique cette fois, 58 % ont perdu du poids et 54 % déclarent avoir une meilleure peau.


Des bénéfices concrets et rapides qui peuvent servir de déclencheur et d’encouragement. « Il n’est pas évident de faire de la prévention sur l’alcool, car il faut des décennies d’exposition pour que le risque devienne majeur sur la santé, souligne Jean-Michel Delile, psychiatre et président de la Fédération Addiction. Quand on dit à un jeune : "Il va falloir ralentir sur l’alcool sinon dans trente ans, vous risquez un cancer de l’œsophage", c’est peu efficace ! Alors que perdre du poids rapidement, retrouver un sommeil et une peau de meilleure qualité, voilà des effets valorisants et des indicateurs repérables. »

Arrêter de boire, vraiment ringard ?

Mais c’est aussi au niveau symbolique que ce défi relayé sur les réseaux sociaux porte ses fruits. L’étude révèle également que 71 % de ces Britanniques se sont rendu compte qu’ils pouvaient s’amuser sans alcool. Une vision positive de l'abstinence assez rare aujourd'hui, où l'on dénigre facilement celui qui commande un Perrier citron... Celui qui refuse un verre pourrait désormais passer de pisse-froid à branché… « Ce "janvier sec" ne diabolise pas l’alcool ou les consommateurs, reprend le Dr Delile. On peut reprendre la consommation dès février ! Cette approche de soutien, de prise de conscience, mais pas de prohibition peut intéresser des usagers qui ne se reconnaissent pas dans l’alcoolisme et encore moins dans l’abstinence. Quelle que soit la réduction d’alcool, il y aura des effets bénéfiques sur la santé. »

Lesquels précisément ? Difficile à dire… « Dans le domaine de l’alcool, le modèle dominant du traitement comme de la recherche, c’est l’abstinence définitive, donc ça n’intéressait pas tellement les chercheurs de se pencher sur les conséquences d’un mois de break », explique le directeur du Comité d'Étude et d'Information sur la Drogue et les Addictions. 

Limiter les risques de certaines maladies

Mais cet impact positif pour les buveurs occasionnels comme quotidiens est confirmé par le Pr Didier Samuel, hépatologue : « C’est toujours une bonne idée de mettre son foie au repos, surtout après les excès de fin d’année, souligne le médecin et auteur de La crise de foie n’existe pas. D’autant que le foie récupère assez vite d’une alcoolisation temporaire. »

Que se passe-t-il quand le foie doit transformer foie gras-champagne-saumon-bûche en peu de temps ? « En surmenage, il se retrouve dans l’incapacité de détoxifier l’organisme, d’éliminer la graisse, synthétise l’hépatologue. Remettre les compteurs à zéro lui permet de refaire son travail dans de bonnes conditions. » Et donc de limiter le risque de cirrhose et autre maladie du foie gras, en pleine explosion.

« Chez les alcooliques chroniques, quand ils arrêtent de boire leurs tests hépatiques s’améliorent en quelques semaines seulement », insiste le Pr Didier Samuel.

Effets sur la consommation d’alcool à long terme

Autre conséquence encore plus intéressante, participer au « Dry January » invite à limiter sa consommation d’alcool… toute l’année ! En effet, 800 de ces Britanniques qui ont participé au « Janvier sec » outre-Manche ont assuré en août 2018 avoir limité bières et autres verres. Elles ont bu de l’alcool 3,3 jours par semaine en 2018 contre 4,3 avant. Sans pour autant se noyer dans le binge-drinking : elles ont été ivres 2,1 fois par mois contre 3,4 avant, toujours selon la même étude.

« Cette pause et cette expérience réussieS encouragent donc à réfléchir à sa relation avec l’alcool, s’enthousiasme Jean-Michel Delile. Ceux qui arrivent à maintenir cette abstinence reprennent confiance en eux-mêmes pour limiter les consommations par la suite. On le voit dans le soin, se définir des objectifs atteignables est très efficace. »

Ce petit break aura d’autant plus d’effets positifs sur votre corps s’il est suivi d’une réduction après janvier. « Le foie ne souffre pas seulement pendant les fêtes, mais surtout de la consommation régulière d’alcool, rappelle le Pr Didier Samuel. C’est pourquoi j’encourage les personnes qui boivent régulièrement à se limiter, par exemple essayer de boire un jour sur deux ou trois soirs par semaine. »