VIDEO. Journée de l'eczéma: Comment la danse aide Marjolaine à soigner ses plaies
PORTRAIT A l'occasion de la 4e Journée de l'eczéma samedi, Marjolaine Héring, qui souffre d'un eczéma sévère, propose un atelier de danse-thérapie...
- Marjolaine Héring souffre de cette maladie de peau depuis sa naissance avec de lourdes conséquences.
- Membre de L'Association française de l'eczéma, elle propose aux patients et à leurs familles de découvrir la danse-thérapie.
- Avec Julie, lors d'un atelier la semaine dernière, elle explore comment mettre en mouvement des émotions et créer à partir de son vécu.
Une chaise, une veste, la B.O. de La Leçon de Piano et beaucoup d’imagination. Dans une petite salle en sous-sol de la rue de Maubeuge, dans le 9e arrondissement de Paris, Marjolaine guide Julie dans cet atelier de danse-thérapie avec douceur et grâce. « Avec la tête, on va explorer tout l’espace autour de soi, le reste du corps doit rester détendu », explique Marjolaine Héring.
« Je suis allergique à tout mon environnement »
Cette quarantenaire proposera pour la Journée de l’eczéma samedi un atelier de danse-thérapie* à l’hôpital Saint-Louis. Souffrant d’un eczéma très sévère depuis sa naissance, Marjolaine a appris à vivre avec les crises de démangeaisons, les plaques et les multiples contraintes dont la liste s’est allongée avec les multiples allergies et l’asthme. « Je suis allergique à tout mon environnement : pollens, animaux, certains aliments, synthétise Marjolaine. Et il n’est pas toujours évident de trouver le facteur déclenchant d’une crise. Ce qui provoque une hypervigilance : je dois faire attention aux produits cosmétiques, d’hygiène, aux aliments, aux destinations de vacances pour éviter les pays trop humides ou trop chauds… »
Regards et conseils usants
Si Marjolaine continue à traverser des crises d’eczéma et suit un traitement à vie, cette maladie « n’est plus aujourd’hui un handicap, car au bout d’un moment on adapte son hygiène de vie ». Ce qui est plus difficile, c’est de supporter le regard des autres. « Surtout quand l’eczéma se déclenche sur des parties visibles du corps, mains et visage, déplore Marjolaine. Parce que c’est une maladie qui se voit, les gens se permettent de faire des commentaires, de donner des conseils, sans doute bienveillants, mais au quotidien, c’est usant ! Et puis les clichés sont encore bien ancrés, il y a encore des gens en 2018 qui pensent que l’eczéma est contagieux ou lié à un manque d’hygiène ! »
Passion danse
Mais ce qui a aidé la jeune femme à faire la paix avec son corps, c’est la danse. Et sa passion se lit sur son CV : depuis ses 5 ans, elle explore classique, contemporain, moderne, danse-théâtre, tango… « A chaque type de danse, j’ai trouvé un impact sur ma façon de vivre avec la maladie, souligne Marjolaine. J’ai commencé le classique enfant, à une époque où j’étais très repliée sur moi-même. Pour la première fois, on me regardait avec bienveillance, je faisais quelque chose de beau avec mon corps. A l’adolescence, la danse contemporaine m’a apporté une liberté, je pouvais exprimer par la danse ce que je taisais verbalement. » Quant au tango, c’est le toucher, le contact qui « l’a aidé dans sa vie relationnelle ».
Une maladie qui a guidé ses choix
Ce bien-être, cette créativité qui soulage, elle a voulu les partager. « J’ai fait beaucoup de choix par rapport à ma maladie, et là c’est une étape de plus », résume-t-elle. Frustrée par la faible offre pour les personnes souffrant d’eczéma côté maquillage, elle se spécialise pendant ses études en pharmacologie sur les cosmétiques. Puis suit une formation en art-thérapie pour une reconversion progressive. « Dans le dessin, on a un intermédiaire pour s’exprimer : le crayon. Avec la danse, on met son corps en mouvement, c’est encore plus puissant. L’objectif, c’est de symboliser, de travailler sur son vécu pour libérer des émotions dans un cadre bienveillant et thérapeutique. Ce travail personnel permet de mettre à distance, d’universaliser, d’esthétiser une émotion. »
Improviser pour avancer
Dans le petit studio de danse, c’est en effet l’élève et sa créativité qui mène la danse. Après un échauffement énergique, Julie doit improviser en se servant d’une veste qui aurait appartenu à un être cher. Puis interpréter une chorégraphie en se glissant dans la peau d’une sorcière. « Cela ne t’inspire pas ? Tu préfères la vamp ? », sourit Marjolaine.
« J’ai cette expérience de la maladie, de la thérapeutique médicale par mon métier de pharmacienne et de la danse, que j’ai eu envie de mettre au service des autres », reprend Marjolaine. Mais aussi cette empathie que beaucoup de patients qui souffrent d’une pathologie chronique recherchent et développent. Julie ne souffre pas d’une maladie de peau, mais a eu envie, à la sortie d’un hiver difficile, de retrouver un peu d’énergie. Pari réussi si l’on en croit l’immense sourire de cette institutrice, ravie par cette sixième séance de danse-thérapie. « Je suis allée voir beaucoup de psys, mais c’est intéressant au lieu de remuer le passé de travailler et exprimer autrement ces émotions pour mieux avancer ». De quoi encourager tous ceux qui voudraient retrouver un élan vital d’entrer dans la danse.
*Inscriptions gratuites et obligatoires dans la limite des places disponibles : contact@associationeczema.fr. Et beaucoup d’autres événements organisés à Paris, Bordeaux et Lyon .