Vaccination obligatoire: Cinq questions pour comprendre le débat
VACCINS La nouvelle ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a relancé ce vendredi le débat sur la vaccination obligatoire...
Un sujet qui pique… Dans une interview au Parisien, publiée ce vendredi, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn a dit réfléchir « à rendre obligatoire, pour une durée limitée, les onze vaccins destinés aux enfants ». Un débat épineux que 20 Minutes vous aide à comprendre en cinq questions.
Que propose la ministre ?
Aujourd’hui, seuls trois vaccins infantiles sont obligatoires : la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Huit autres (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C) sont toutefois recommandés, notamment en fonction de l’exposition de l’enfant aux risques. Agnès Buzyn souhaite donc les rendre tous obligatoires sur une période limitée, de cinq à dix ans.
Elle rappelle que des enfants continuent de mourir de maladies que des vaccins seulement recommandés pourraient empêcher : la rougeole a notamment causé la mort de 10 enfants depuis 2008. « Le taux de couverture est de 75 % alors qu’il devrait être de 95 % » a-t-elle déclaré dans son interview au Parisien. « On a le même problème avec la méningite. Il n’est pas supportable qu’un ado de 15 ans puisse mourir parce qu’il n’est pas vacciné ».
Pourquoi le temps presse ?
Les trois vaccins actuellement obligatoires font l’objet de trois injections groupées (DTP) avant l’âge de 18 mois. Or depuis 2008, ce « cocktail » n’est plus commercialisé seul, mais accompagné d’autres vaccins recommandés et ainsi vendus plus cher. Une incohérence que le Conseil d’Etat avait relevée en février dernier en donnant au ministère six mois pour la lever.
Trois choix s’offrait alors à la ministre : obliger la commercialisation du DTP seul, supprimer toute obligation vaccinale ou étendre l’obligation. Le ministère a donc opté pour la dernière option, soutenu par plusieurs organisations médicales.
Pourquoi le projet inquiète les anti-vaccins ?
En France, la méfiance ne cesse de grandir sur la supposée dangerosité des vaccins. Selon une étude annuelle publiée en octobre 2016 pour l’organisation des industriels du secteur, seulement 69 % des sondés faisaient confiance aux vaccins. Certains contiennent en effet des adjuvants comme l’aluminium, qui peuvent être cancérogènes.
« La défiance des citoyens envers les vaccins est considérable à la suite de la multiplication des scandales sanitaires à répétition », a indiqué à l’AFP Michèle Rivasi, député européenne EELV. Rappelons le cas emblématique de la campagne de vaccination contre l’hépatite B en 1994. Elle avait fait naître des soupçons de lien avec des maladies neurologiques, telle que la sclérose en plaques. Dix-sept ans plus tard, l’enquête avait débouché sur un non-lieu.
L’association des victimes du vaccin hépatite B (Revahb) a ainsi réagi à la proposition de la ministre : « Imposer 11 vaccinations serait une faute grave ». Le président de l’Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN), Augustin de Livois, considère cette extension des obligations vaccinales comme « un recul sans précédent des libertés ».
« Ce serait une hérésie », a répondu à la ministre dans Le Parisien Jacques Bessin, président de l’Union nationale des associations citoyennes de santé (UNACS). Selon lui, « les vaccins ont des effets secondaires neurologiques, musculaires mal mesurés et parfois irréversibles ». « On ne laissera pas faire », a-t-il scandé.
Quels sont les arguments des pro-vaccins ?
Les pro-vaccins estiment que la méfiance vient avant tout de la désinformation : « Elle a été alimentée par des contre-vérités sans fondement scientifique rigoureux, mais aussi par les incohérences des pouvoirs publics », souligne-t-on à la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).
Dans le sens de la ministre, les pro-vaccins font valoir que la vaccination n’est pas qu’un acte individuel mais également une protection collective, dans le cadre de la transmission des virus. « Dès que l’on parle d’obligation vaccinale cela déclenche des polémiques. Malheureusement il n’y a pas d’autres solutions pour lutter contre la recrudescence des maladies infantiles. C’est un mal transitoire pour un bien sûr le long terme », a indiqué dans Le Parisien le professeur Alain Fischer, président de la concertation citoyenne sur les vaccinations.
Pourquoi certains accusent la ministre de favoriser l’intérêt économique ?
L’achat obligatoire de huit vaccins de plus serait une mine d’or pour les laboratoires pharmaceutiques. La position de la ministre de la Santé face à ces lobbies a d’ailleurs souvent été critiquée. Si Agnès Buzyn n’a aucun lien avec ces laboratoires, plusieurs acteurs de la santé, comme Irène Frachon (Mediator), parlent de « petits arrangements ». La ministre a cependant réfuté ces accusations et déclare « qu’on ne peut pas réduire la question de la vaccination à l’intérêt des laboratoires ».