Documentaire sur le diabète: «C'est une maladie à la fois invisible et très contraignante»

PORTRAIT Le documentaire de Vanessa Gauthier, diabétique, sort ce mercredi sur grand écran…

Oihana Gabriel
Portrait de Vanessa Gauthier, diabétique et documentariste dont le film Pour quelques barres de chocolat vient d'être primé.
Portrait de Vanessa Gauthier, diabétique et documentariste dont le film Pour quelques barres de chocolat vient d'être primé. — Mélaine Vidal
  • «20 Minutes» avait rencontré Vanessa Gauthier, qui a travaillé pendant trois ans pour accoucher d'un documentaire qui dévoile le diabète vécu par des enfants.
  • Elle a promené sa caméra dans une colonie pour enfants diabétiques.
  • Après plusieurs prix, son documentaire arrive dans les salles obscures ce mercredi 13 décembre 2017.

« J’avais peur que ce documentaire remue des choses douloureuses », explique Vanessa Gauthier, 34 ans. Pour son premier film, cette chargée de production dans un studio d’animation a choisi un sujet qu’elle maîtrise bien : le diabète.

Mais attention, . « Mais hors du cadre parental et médical ! », précise la réalisatrice. En effet, elle a planté sa caméra au milieu d’une colonie de vacances où des enfants, tous diabétiques, jouent, cuisinent un gâteau au chocolat ou une balle au prisonnier tout en comprenant mieux leur maladie.

Un documentaire primé

Il lui a fallu trois ans de travail pour accoucher de Pour quelques barres de chocolat. Un documentaire qui devrait atterrir dans les salles obscures en 2017, du moins c’est l’espoir de Vanessa Gauthier. Qui a reçu un coup de pouce :   , qui récompense les œuvres partageant des témoignages de patients.

Une maladie complexe et invisible

Au travers du quotidien et du ressenti d’enfants, on découvre la complexité de cette maladie. « Les diabétiques de type 1 n’ont pas d’insuline, qui permet de transformer le sucre en énergie, résume Vanessa Gauthier. Alors pour leur injecter cette insuline, il faut faire des calculs savants et prendre en compte glycémie, alimentation, sport, stress… C’est une maladie à la fois invisible et très contraignante. L’avantage, c’est qu’on peut tout faire. L’inconvénient, c’est que les gens ne comprennent pas toujours notre fatigue, nos humeurs, nos interdictions. »

« Entre cinq et huit injections d’insuline chaque jour »

Ces témoignages d’enfants qui apprivoisent cette maladie rappellent à Vanessa bien des souvenirs. « J’avais sept ans quand ma mère m’a amené chez le généraliste pour un banal mal de gorge. Je buvais, j’urinais beaucoup et je perdais du poids. Le soir même, j’étais aux urgences et j’y suis restée un mois. J’étais LE cas d’enfant diabétique. D’un coup, je devais me lever à 7h tous les matins pour tester ma glycémie. Tous les aliments devaient être pesés, le chocolat c’était fini. Tout devenait fade. J’avais de deux à dix contrôles de glycémie et entre cinq et huit injections d’insuline chaque jour. »

Cette rigueur, ces calculs savants, elle s’y est habituée. Mais c’est à l’adolescence que le ras-le-bol s’installe. « Je n’en pouvais plus du côté scolaire des contrôles de glycémie. J’ai eu quelques crises de consommation hystérique de chocolat. Et j’ai fait un blocage : je ne pouvais plus rien écrire dans mon cahier de glycémie. C’était la façon la moins dangereuse de manifester ma rébellion », sourit la trentenaire.

« C’est fou le temps qu’on passe à l’infirmerie ! »

De cette expérience, elle hérite le désir de faire parler les enfants diabétiques. Pour elle, ils savent faire preuve de résilience face à la maladie. « Les enfants que j’ai filmés sont unanimes : ce qui blesse, c’est le regard des autres, les moqueries, l’intolérance », reprend la trentenaire. En effet, dans le documentaire, une petite fille explique que ses camarades ont peur d’attraper sa maladie. « Mes copines aussi ne voulaient plus m’approcher », raconte Vanessa. Et comme eux, elle a participé à une de ces colonies pédagogiques organisées par l’ (AJD).

« C’est fou le temps qu’on passe à l’infirmerie ! Cette colonie permet de se sentir moins seul, d’échanger. Et puis ça rassure les parents. » Car l’angoisse des proches fait partie du lourd fardeau pour ces enfants. « Moi j’ai appris à huit ans à me piquer seule. Mieux on connaît sa maladie, plus on est libre », reprend la réalisatrice. Et dans son documentaire, un des protagonistes se réjouit de pouvoir s’injecter de l’insuline seul : enfin, il va pouvoir aller dormir chez un copain…

Une soirée marshmallows

Vanessa semble en paix avec cette maladie. « De toute façon, c’est pour la vie, alors autant en faire un compagnon et non un ennemi. Petite, je me disais qu’une fois adulte, je ne serai plus diabétique. J’en suis revenue. Mais en vingt-sept ans, j’ai vu les choses évoluer. Aujourd’hui, j’ai une sorte de scanner sur le bras qui analyse ma glycémie en continu. Pour moi, c’est une révolution de ne plus avoir à me piquer, d’avoir des données tout au long de la journée. »

Et si les traitements actuels permettent aux enfants du documentaire de faire une soirée marshmallows au coin du feu, ils sont animés par l’espoir d’oublier piqûres et calculs pour de bon. Un jeune garçon confie à la documentariste : « J’ai un message aux scientifiques : essayez de trouver un antidote… pour devenir normal. »