Journée mondiale sans tabac: Sommes-nous égaux face au tabac?

SANTE Les risques de cancers varient selon les individus confrontés au tabagisme…

Romain Scotto
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Photo d'illustration d'une fumeuse.
Photo d'illustration d'une fumeuse. — POUZET/SIPA

Il y a ceux qui s’en grillent quelques-unes dans la journée. Et ceux qui descendent un ou deux paquets. Entre ces deux groupes de fumeurs à la consommation différenciée, le risque de contracter un cancer lié au tabac n’est pas forcément démultiplié. A la veille de la journée mondiale sans tabac vendredi, les tabacologues rappellent que les individus ne sont pas égaux face à la cigarette, responsable chaque année de 73.000 décès en France (200 par jour), tandis que neuf cancers du poumon sur dix sont liés au tabac selon la dernière directive européenne sur le sujet.

Cette «injustice» naturelle s’explique en partie par la génétique, comme le démontre une étude publiée récemment par un consortium de chercheurs internationaux. «Le cancer est le résultat d’une multiplicité d’erreurs génétiques. Si on a le gène qui fait qu’on fume plus, qu’on est plus dépendant et qu’on métabolise plus vite la nicotine, on a un profil génétique qui favorise nettement le cancer», indique le Professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue à la Pitié-Salpêtrière.

Aucune règle comportementale universelle

Le spécialiste cite aussi le benzopyrène, un des agents cancérigènes du tabac. Ceux qui ont une capacité à l’évacuer plus vite seraient moins touchés par le cancer et ce, à consommation de tabac égale. Génétiquement, les individus n’ont pas non plus le même degré de dépendance à la nicotine. Certains la stockent plus longtemps que d’autres, ce qui implique une demande moins importante dans le cerveau et donc une consommation inférieure.

Face au tabac, aucune règle comportementale universelle ne peut être établie, enchaîne le docteur Joseph Osman, directeur de l’Office français de prévention du tabagisme. «Chaque cas est spécifique puisqu’il y a trois types de dépendances: physique, comportementale et affective.» Celles-ci induisent généralement des rapports à la cigarette différents. Deux personnes qui fument la même quantité de tabac, de la même marque, pendant un laps de temps égal, ne vont pas développer un cancer en même temps. L’un sera peut-être même épargné toute sa vie, en dépit d'une consommation excessive. «La façon dont on tire sur la cigarette joue aussi beaucoup. Vous en avez un qui tire fort et envoie sa fumée profondément. Et l’autre tire peu de bouffées, en posant sa cigarette sur le cendrier», poursuit le tabacologue.

Les habitants du nord-est les plus touchés

L’âge auquel le fumeur a commencé est également à prendre en compte. Statistiquement, ceux qui ont gouté au tabac avant l'âge de 15 ans sont les plus touchés par le risque de cancers. Idem pour les habitants du nord-est de la France, plus gros consommateurs car proches de la Belgique où ils peuvent s’approvisionner à prix réduits.

Enfin, les femmes ne sont pas plus concernées même si le nombre de fumeuses a explosé ces dernières années. «Elles sont nouvellement touchées car elles ont commencé à fumer plus tard que les hommes», poursuit Osman soucieux de ne pas relâcher les efforts de prévention. A ce sujet, il n'y aura jamais à mégoter.