Rennes : Église, SNCF, armée… Reste-t-il des terrains en friche à exploiter ?

Nouvelle vie Pour ne pas consommer le foncier agricole, la ville se tourne vers ses terrains abandonnés qui se font de plus en plus rares et de plus en plus chers

Camille Allain
A La Courrouze, d'anciennes friches militaires ont été rachetées par Rennes Métropole pour être transformées en un nouveau quartier dédié à l'économie sociale et solidaire.
A La Courrouze, d'anciennes friches militaires ont été rachetées par Rennes Métropole pour être transformées en un nouveau quartier dédié à l'économie sociale et solidaire. — C. Allain/20 Minutes
  • A Rennes comme dans la plupart des métropoles françaises, le foncier disponible est devenu très rare.
  • Pour éviter de consommer du foncier agricole, la capitale bretonne négocie avec l’armée, l’Eglise et la SNCF, qui ont souvent des terrains en friche à céder.
  • Le problème de ces rachats, c’est qu’ils coûtent très cher à la collectivité, la poussant à construire plus haut pour équilibrer l’opération.

Ils sont le dernier espoir des municipalités. Délaissés pendant des années, voire des décennies, les terrains en friche sont devenus des biens très demandés dans les villes jouissant d’une forte attractivité. Contraintes de ne plus s’étaler pour préserver le foncier agricole, les collectivités sont toutes confrontées au même défi : se reconstruire sur elles-mêmes. Il existe deux solutions. Démolir des bâtiments ou des quartiers vieillissants pour y installer du neuf. Ou bien explorer les friches urbaines. Membre du club des villes les plus attractives de France, Rennes a déjà exploité le filon depuis des années en se rapprochant de puissants alliés souvent très riches en foncier qui ne sert pas à grand-chose : la SNCF, l’armée et l’Église.

La dernière acquisition en date illustre bien les relations étroites nouées entre ces partenaires de business foncier. Après avoir envoyé Euro-Shelter sur la friche de PSA à la Janais, la métropole rennaise a pu racheter les hangars abandonnés à la Courrouze au Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) qui en était resté propriétaire même après la fin de ses activités d’arsenal militaire. Ici, c’est un lieu dédié à l’économie sociale et solidaire qui va sortir de terre. Mais aussi des immeubles qui accueilleront environ 190 logements nichés à deux pas du nouveau métro. « Avec le zéro artificialisation nette, les enclos militaires et religieux sont devenus de formidables opportunités pour les villes », reconnaît Sébastien Sémeril, vice-président de Rennes Métropole au développement économique.



Dans le quartier champignon de la Courrouze, bon nombre d’acquisitions foncières ont été réalisées auprès de l’armée. Alors que dans le quartier tout aussi champignon de Baud-Chardonnet, c’était avec la SNCF que la métropole négociait. « Pendant longtemps, l’armée a voulu réduire son foncier et nous le rétrocédait. A la Courrouze, on parle quand même de 120 hectares. Mais elle n’est plus vendeuse maintenant », regrette Marc Hervé, adjoint à l’urbanisme à la ville de Rennes. Le projet de vente de la caserne Foch, en plein centre-ville, a notamment été abandonné par l’administration militaire qui souhaite y loger ses effectifs grandissants, notamment dans la cyberdéfense.

Dix millions d’euros… Au lieu de 5.000 !

La ville aurait pourtant bien aimé récupérer cette emprise de 7 ha mais elle n’en fait pas non plus tout un plat. « On ne manque pas de projets. On discute avec la SNCF pour Solférino ou l’ancien technicentre. On doit aussi échanger avec les universités qui ont pas mal de foncier à Beaulieu. La vraie question, c’est surtout de savoir à quel prix on achète », résume le fils de l’ancien maire de Rennes. A la Courrouze, la métropole a déboursé 3,5 millions d’euros pour s’offrir quatre hectares de terrains qu’il faudra dépolluer et parfois déconstruire. « Quand on achète du foncier agricole en Bretagne, on est plutôt autour de 5.000 euros l’hectare. Quand on est sur des friches, c’est plutôt 1.000 euros du mètre carré. » Faites le calcul et vous constaterez qu’à ce prix, l’hectare « non agricole » se négocie autour des 10 millions d’euros à Rennes. « L’économie n’est plus la même. Pour trouver l’équilibre, nous n’avons pas d’autre choix que de construire un peu plus haut », rappelle l’élu socialiste, qui sait que la hauteur crispe les habitants.


A Rennes, certains quartiers champignons comme Baud-Chardonnet ont investi des friches. Désormais, c'est dans des quartiers déjà habités que les constructions se font. Et ce n'est pas toujours simple.
A Rennes, certains quartiers champignons comme Baud-Chardonnet ont investi des friches. Désormais, c'est dans des quartiers déjà habités que les constructions se font. Et ce n'est pas toujours simple. - C. Allain / 20 Minutes

La « bonne nouvelle » avec les friches, c’est qu’elles sont bien souvent déjà équipées en réseau d’eau, d’électricité et en voirie. Des investissements en moins à réaliser pour les collectivités qui veulent y implanter des logements. Même si l’équilibre de l’opération reste toujours très précaire. Le prix à payer pour préserver l’autre foncier.