Anti-inflammatoires non stéroïdiens et Covid-19 : pas de risque d'aggravation de l'infection

Composé de rhumatologues, d’infectiologues, d’un pédiatre, d’un médecin généraliste, d’un pharmacologue et de pharmaciens, le GRAINS, Groupe de Réflexion sur les AINS, soutenu institutionnellement par le laboratoire GlaxoSmithKline Santé Grand Public, s’est réuni en décembre dernier et a passé en revue une quarantaine d’études internationales portant sur un éventuel lien entre la prise d’AINS /d’ibuprofène et une aggravation de l’infection par le Sars Cov-2. « Les résultats sont tout à fait rassurants », commente le Dr Laurent Grange, rhumatologue (CHU de Grenoble Alpes) et président de l’AFLAR (Association Française de de Lutte Anti-Rhumatismale). « Les études ne montrent aucun risque particulier, la mortalité serait même inférieure chez les patients Covid atteints de polyarthrite rhumatoïde et traités par AINS dans une étude », ajoute-t-il. 

Dans l’effervescence médiatique du printemps dernier, de multiples communications ont suggéré une corrélation potentielle entre l’utilisation d’ibuprofène et l’aggravation des symptômes liés aux infections par le coronavirus SRAS-COV-2. La France est en effet le seul pays à avoir émis une vigilance à l’égard de l’ibuprofène. « Au niveau de l’Europe et des États-Unis, toutes les recommandations vont dans le sens inverse ! », s’agace Yorick Berger, pharmacien parisien membre du GRAINS. La publication, d’une recommandation de l’Agence Européenne du Médicament (EMA) affirmant qu’« il n’existe aucune preuve scientifique d’un lien entre l’ibuprofène et une aggravation de la Covid-19 » n’y change rien. « Le mal était fait », regrette le pharmacien.

Des dommages collatéraux

Résultat, bon nombre de patients chroniques arrêtent brutalement leur traitement anti-inflammatoire. « Les AINS sont des molécules très utiles contre les douleurs liées à l’arthrose ou aux migraines. Elles sont particulièrement intéressantes chez les patients âgés douloureux, car en les soulageant, elles les incitent à se mobiliser. En arrêtant leur traitement par crainte de ce prétendu risque, beaucoup ont vu leur état se dégrader considérablement », illustre Yorick Berger. Sans parler des crises de migraines jusqu’alors parfaitement contrôlées qui ont de nouveau vrillé le crâne des patients sujets à ce mal de tête particulier. Les Français qui recouraient ponctuellement à l’ibuprofène se reportent sur le paracétamol ; quitte à dépasser la dose conseillée pour pallier certaines douleurs, et à s’exposer ainsi à un risque de surdosage.

Un principe de précaution « poussé à l’extrême »

Regrettant un « principe de précaution poussé à l’extrême », le GRAINS plaide pour une réhabilitation des AINS et de l’ibuprofène, « dans le respect des indications et contre-indications connues (insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique, allergie ou asthme liés à la prise d’AINS entre autres) ». « Nos patients sont inquiets. Nous devons les rassurer. Mais pour cela, nous avons besoin d’un discours concordant entre les autorités de santé, les médecins et les pharmaciens ». 

Le groupe de réflexion a parallèlement conçu des outils pour permettre aux pharmaciens et aux médecins de répondre aux questions des patients, grâce à une revue de la littérature et une fiche d’aide à la dispensation. Un Vrai/Faux sur l’ibuprofène est également élaboré pour répondre aux patients. 

Mais dans l’immédiat, l’urgence est de demander aux autorités de santé françaises de suivre les recommandations de l’Organisation Mondiale (OMS) de la Santé et de l’Agence Européenne du Médicament (EMA), qui préconisent toutes deux de prendre en compte toutes les options thérapeutiques pour traiter la fièvre mal supportée et la douleur, y compris l’ibuprofène et les AINS.