Quand les maires de France se font draguer pour leurs parrainages

PRÉSIDENTIELLE u Congrès des maires de France, qui s'est ouvert ce mardi, les élus témoignent de la course aux 500 signatures des petits candidats à l'Elysée...

Nicolas Bégasse
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A l'entrée du Congrès des maires de France, les représentants des petits candidats draguent l'élu. A Paris, le 22 novembre 2001.
A l'entrée du Congrès des maires de France, les représentants des petits candidats draguent l'élu. A Paris, le 22 novembre 2001. — N. Bégasse/20minutes

«Je suis maire depuis trois ans, mais avant j’étais  conseillère municipale. Ca change tout d’être la «cible», on ne s’en  rend pas compte quand on n’est que conseiller!», témoigne Danielle  Goyet, maire de Sainte-Hélène-sur-Isère (Savoie).  A quelques mois de la présidentielle, la saison de la  chasse au parrainage s’est ouverte pour les candidats à la présidence de  la République, et surtout pour les plus petits d’entre eux.

Au 94e Congrès des maires de France, à Paris,  environ 7.000 élus se retrouvent jusqu’au 24 novembre. L’endroit idéal  pour les petits candidats qui veulent «draguer» les maires, même si les  premières demandes de parrainage sont parties depuis  longtemps. «Ca a commencé avant l’été, d’abord par mail puis par  courrier: les représentants des candidats nous demandent de réserver la  signature magique», explique Daniel Level, maire de Fourqueux  (Yvelines). Selon les maires, la plupart des petits candidats  ont commencé à se manifester dès le printemps. Les demandes de  parrainage les plus précoces ont même débuté il y a plus d’un an!

«Ce n’est pas que des âneries»

Qui sont ces petits candidats? On en connaît  certains: Christine Boutin, Nicolas Dupont-Aignan, etc. Mais la plupart  sont complètement inconnus des élus. «Ce sont des gens que je ne connais  pas, de toutes tendances, de tous âges», poursuit  Daniel Level. La maire de Sainte-Hélène-sur-Isère abonde: «Pour  certains candidats, on se demande: ça existe ce parti? Je lis la plupart  de ce qu’ils envoient, il y a souvent des idées justes, ce n’est pas  que des âneries», reconnaît-elle. Anne Roger, maire  de Fanlac (Dordogne), village de moins de 200 habitants, a la même  expérience: «Il y a tout et n’importe quoi, des petits partis connus  depuis longtemps ou bien des inconnus avec un projet farfelu.» 

Le nombre de ces petits candidats est dur à  évaluer, mais une chose est sûre: ils sont nombreux. Même les élus des  plus petits villages reçoivent plusieurs demandes de parrainage. «Pour  l’instant, j’en suis à une petite dizaine», juge le  maire de Fourqueux, qui poursuit: «Il y a de plus en plus de candidats,  je le vois depuis 1995 où j’étais adjoint au maire. A cette époque, je  n’avais vraiment pas l’impression qu’il y en avait autant.» Maurice  Jechoux, maire d’Aumontzey (Vosges), est plus  tranchant: «Il y a pléthore de candidats, ça n’est pas sérieux», estime  le maire, qui n’offrira son parrainage à personne. «Il y a suffisamment  d’élus qui donnent leur signature!»

«Il y en avait trois à l’entrée, je les ai esquivés!»

Ce qui est sûr, c’est que pour obtenir ce  parrainage, il faut bien se présenter. Les élus attachent une grande  importance à la politesse des candidats ou de leurs représentants, et la  plupart des maires n’ont d’ailleurs pas à se plaindre  d’incorrections. Même si les conflits peuvent apparaître. «Certains  petits candidats veulent une signature tout de suite, sans nous laisser  le temps de réfléchir», regrette Bernard Broisin-Doutaz, maire de Glos  (Calvados), qui raconte s’être même déjà «fâché».  «Parfois les demandes se font par téléphone, même sur le portable, et  ça peut carrément devenir du harcèlement: le représentant d’un petit  candidat m’appelait deux fois par semaine, pour me relancer. A la fin je  lui ai dit: arrêtez!»

Quant aux petits partis qui font l’effort de venir  draguer l’élu au Congrès des maires de France, ils ne sont pas forcément  mieux vus. «Les représentants des candidats présents à l’entrée, je  trouve ça assez choquant. Ils distribuent plein  de tracts que les gens jettent, c’est du gaspillage!», juge Bernard  Broisin-Doutaz. Maurice Jechoux, lui, n’y va pas par quatre chemins: «Ce  matin il y en avait trois qui attendaient les élus à l’entrée, je les  ai esquivés!» sourit-il. «C’est classique, avant  chaque présidentielle ils sont là.»