Quand les maires de France se font draguer pour leurs parrainages
PRÉSIDENTIELLE u Congrès des maires de France, qui s'est ouvert ce mardi, les élus témoignent de la course aux 500 signatures des petits candidats à l'Elysée...
«Je suis maire depuis trois ans, mais avant j’étais conseillère municipale. Ca change tout d’être la «cible», on ne s’en rend pas compte quand on n’est que conseiller!», témoigne Danielle Goyet, maire de Sainte-Hélène-sur-Isère (Savoie). A quelques mois de la présidentielle, la saison de la chasse au parrainage s’est ouverte pour les candidats à la présidence de la République, et surtout pour les plus petits d’entre eux.
Au 94e Congrès des maires de France, à Paris, environ 7.000 élus se retrouvent jusqu’au 24 novembre. L’endroit idéal pour les petits candidats qui veulent «draguer» les maires, même si les premières demandes de parrainage sont parties depuis longtemps. «Ca a commencé avant l’été, d’abord par mail puis par courrier: les représentants des candidats nous demandent de réserver la signature magique», explique Daniel Level, maire de Fourqueux (Yvelines). Selon les maires, la plupart des petits candidats ont commencé à se manifester dès le printemps. Les demandes de parrainage les plus précoces ont même débuté il y a plus d’un an!
«Ce n’est pas que des âneries»
Qui sont ces petits candidats? On en connaît certains: Christine Boutin, Nicolas Dupont-Aignan, etc. Mais la plupart sont complètement inconnus des élus. «Ce sont des gens que je ne connais pas, de toutes tendances, de tous âges», poursuit Daniel Level. La maire de Sainte-Hélène-sur-Isère abonde: «Pour certains candidats, on se demande: ça existe ce parti? Je lis la plupart de ce qu’ils envoient, il y a souvent des idées justes, ce n’est pas que des âneries», reconnaît-elle. Anne Roger, maire de Fanlac (Dordogne), village de moins de 200 habitants, a la même expérience: «Il y a tout et n’importe quoi, des petits partis connus depuis longtemps ou bien des inconnus avec un projet farfelu.»
Le nombre de ces petits candidats est dur à évaluer, mais une chose est sûre: ils sont nombreux. Même les élus des plus petits villages reçoivent plusieurs demandes de parrainage. «Pour l’instant, j’en suis à une petite dizaine», juge le maire de Fourqueux, qui poursuit: «Il y a de plus en plus de candidats, je le vois depuis 1995 où j’étais adjoint au maire. A cette époque, je n’avais vraiment pas l’impression qu’il y en avait autant.» Maurice Jechoux, maire d’Aumontzey (Vosges), est plus tranchant: «Il y a pléthore de candidats, ça n’est pas sérieux», estime le maire, qui n’offrira son parrainage à personne. «Il y a suffisamment d’élus qui donnent leur signature!»
«Il y en avait trois à l’entrée, je les ai esquivés!»
Ce qui est sûr, c’est que pour obtenir ce parrainage, il faut bien se présenter. Les élus attachent une grande importance à la politesse des candidats ou de leurs représentants, et la plupart des maires n’ont d’ailleurs pas à se plaindre d’incorrections. Même si les conflits peuvent apparaître. «Certains petits candidats veulent une signature tout de suite, sans nous laisser le temps de réfléchir», regrette Bernard Broisin-Doutaz, maire de Glos (Calvados), qui raconte s’être même déjà «fâché». «Parfois les demandes se font par téléphone, même sur le portable, et ça peut carrément devenir du harcèlement: le représentant d’un petit candidat m’appelait deux fois par semaine, pour me relancer. A la fin je lui ai dit: arrêtez!»
Quant aux petits partis qui font l’effort de venir draguer l’élu au Congrès des maires de France, ils ne sont pas forcément mieux vus. «Les représentants des candidats présents à l’entrée, je trouve ça assez choquant. Ils distribuent plein de tracts que les gens jettent, c’est du gaspillage!», juge Bernard Broisin-Doutaz. Maurice Jechoux, lui, n’y va pas par quatre chemins: «Ce matin il y en avait trois qui attendaient les élus à l’entrée, je les ai esquivés!» sourit-il. «C’est classique, avant chaque présidentielle ils sont là.»