Réforme des retraites : Moins de Mélenchon, plus « démocratique »… A quoi pourrait ressembler « l'Acte 2 » de la Nupes ?
RENOUVEAU Après les divisions stratégiques pour s’opposer au projet de loi du gouvernement, l’écologiste Sandrine Rousseau a appelé à une alliance « plus claire et démocratique »
- L’examen du projet de loi de réforme des retraites à l’Assemblée nationale a pris fin vendredi soir après deux semaines de discussions intenses.
- L' « obstruction parlementaire » de La France insoumise, qui a refusé de retirer ses milliers d’amendements pour pouvoir discuter de l’article 7, a été vertement critiqué par les élus socialistes, écologistes et communistes.
- Face aux divergences stratégiques, Sandrine Rousseau a appelé à un « Acte 2 » de la Nupes. Mais à quoi pourrait-il ressembler ? On fait le point sur les différentes hypothèses, et sur leurs probabilités.
Après deux semaines intenses à l’Assemblée nationale, les débats sur la réforme des retraites ont pris fin vendredi dernier à minuit. Les députés n’ont pas eu le temps d’examiner l’article 7 sur l’âge de départ à 64 ans. En cause : le temps parlementaire limité et les milliers d’amendements maintenus par la France insoumise, malgré les demandes de retrait des syndicats et de leurs alliés de la Nupes, qui espéraient bien mettre en difficulté l’exécutif sur le cœur de sa réforme.
Cette divergence stratégique a fait émerger des critiques sur le fonctionnement de la coalition et posé la question de son avenir. « Nous devons maintenant passer à un acte 2 » de la Nupes, a lancé lundi sur Public Sénat la députée EELV de Paris, Sandrine Rousseau. A quoi cela pourrait-il ressembler ? 20 Minutes s'est posé la question.
Scénario 1. Une Nupes « émancipée » de Mélenchon
Jean-Luc Mélenchon a mis le feu dans les rangs de gauche de l’Hémicycle (où il ne siège plus), jeudi dernier, en jugeant « incompréhensible » le choix stratégique de ses alliés d’en finir avec l’obstruction. De quoi agacer plusieurs parlementaires de la Nupes, qui verraient bien l’omnipotent tribun un peu moins présent à l'avenir.
« Il faudra que Mélenchon accepte de ne pas être celui qui dicte sa stratégie à tout le monde », peste-t-on dans l’entourage du communiste Fabien Roussel. « La Nupes doit s’émanciper de Mélenchon. On n’a pas besoin de son avis pour élaborer notre stratégie collective », abonde un député socialiste, qui ajoute : « Il a tenté un coup de force, mais ça laissera des traces au sein même des insoumis. Son autorité en sort fragilisée ».
Car dans la foulée du fameux tweet, un vote interne au sein du groupe LFI a confirmé la stratégie d’obstruction pour la dernière journée de débats... mais la décision ne s’est jouée qu’à une voix près. « On pourrait croire que Mélenchon a repris la main, mais si on élargit la focale, c’est une victoire à la Pyrrhus : il ne fait que 50/50 dans son propre groupe, cela montre que son influence est en chute libre », avance Julien Bayou, député EELV de Paris. Suffisant pour imaginer des bouleversements à venir ?
Probabilité : 4 % Malgré les critiques, Jean-Luc Mélenchon reste le patron incontesté de LFI, plus grande force politique de la Nupes, et la personnalité la plus connue à gauche. La probabilité d’une émancipation reste donc faible et fait d'ailleurs sourire Antoine Léaument, député LFI d’Essonne, proche de l’élu de Marseille. « Que veulent-ils ? Prendre le contrôle du Twitter de Mélenchon ? »
Scénario 2. Une Nupes plus « claire et démocratique »
A l’image de Sandrine Rousseau, plusieurs élus de la Nupes souhaitent « faire en sorte qu’il y ait une coordination qui prenne des décisions avec quelque chose qui soit beaucoup plus clair et démocratique ». En clair : ne pas laisser les insoumis décider seuls dans leur coin des stratégies de la coalition. « L’isolement de Mélenchon vis-à-vis de ses partenaires laisse un sentiment de gâchis…, soupire un proche de Fabien Roussel. Il y a un contraste fort entre l’unité des syndicats et la Nupes. Il faudrait s’inspirer de l’intersyndicale, qui parle de manière unie, sans écraser personne ».
Arthur Delaporte, député du Calvados et porte-parole du groupe PS, abonde, mais préfère reporter le débat : « Certains ont choisi de s’exonérer du cadre commun. On ne pourra pas éviter la réflexion sur notre cadre de discussion et nos formes de coopération. Mais pour l’instant, notre attention doit se focaliser sur le mouvement social ».
Probabilité : 20 %. Là encore, les élus PS, EELV et PCF sont d’accord pour appeler à plus de collégialité dans les décisions stratégiques. Mais côté LFI, ces interrogations ne semblent pas vraiment entendues. « On est d’accord pour faire un acte 2, un acte 3, 4 ou 5 de la Nupes… Il n’y a jamais de problème avec le fait de discuter davantage pour dissiper les incompréhensions », dit Antoine Léaument. « Mais est-ce que pour autant, on diminue l’autonomie de chacun ? Nous ne sommes pas d’accord. D’autant que ce sont nos alliés qui ont refusé de faire un groupe unique Nupes à l'Assemblée en juin dernier ».
Scénario 3. Une Nupes qui implose
Malgré les divergences stratégiques, l’hypothèse de voir la coalition imploser dans les prochaines semaines semble plus qu’incertaine. Car les partis de gauche entendent bien rester unis pour mener la bataille contre Emmanuel Macron et son gouvernement. « Le désaccord tactique a existé, et personne ne cherche à le dissimuler. Mais il n’a pas empêché la coordination politique sur le message principal : nous voulons que le gouvernement retire sa réforme des retraites », rappelle Arthur Delaporte. « Malgré tout, c’est d’abord le gouvernement qui sort perdant de la séquence à l’Assemblée en ne marquant pas de points sur sa réforme et avec une contestation toujours aussi forte, qui s'exprimera encore le 7 mars », ajoute Julien Bayou.
Probabilité : 1 %. Personne au sein de la gauche ne remet aujourd’hui en cause l’existence de la coalition. « L’acte 2 » de la Nupes pourrait donc bien ressembler comme deux gouttes d’eau... à « l’acte 1 ». Du moins jusqu’à la fin de la bataille contre la réforme des retraites. C'est le Scénario 4, où rien ne bouge vraiment (probabilité 75 %).