Réforme des retraites : Non, ce n’est pas le gouvernement qui peut modifier les pensions des sénateurs

FAKE OFF Ce sont les sénateurs eux-mêmes qui peuvent décider de modifier les règles de leur régime de retraite

20 Minutes Fake off
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Le gouvernement ne peut pas modifier les règles des retraites des sénateurs. Seuls les sénateurs peuvent le faire.
Le gouvernement ne peut pas modifier les règles des retraites des sénateurs. Seuls les sénateurs peuvent le faire. — STEPHANE DUPRAT/SIPA
  • Deux poids, deux mesures ? Un tweet sous-entend que le gouvernement laisse subsister le régime spécial des sénateurs, alors que le projet défendu par Elisabeth Borne prévoit la suppression de plusieurs régimes spéciaux.
  • Le gouvernement n’est pas compétent pour décider des règles des régimes de retraite des députés et des sénateurs : ce sont les parlementaires eux-mêmes qui en décident.

Le gouvernement laisserait-il sciemment de côté les régimes spéciaux de retraite des parlementaires, alors qu’il veut en faire disparaître d’autres, comme celui de la RATP, dans son projet de réforme des retraites ? C’est ce que sous-entend, à tort, un tweet du compte Brèves de presse. « L’exécutif veut supprimer plusieurs régimes spéciaux, lit-on dans ce message publié le 24 janvier. Interrogé en audition à l’Assemblée nationale sur le régime de l’Assemblée et du Sénat, le ministre du Travail s’est montré étonnamment plus souple. C’est une décision qui relève de leur bureau, a-t-il expliqué, sans en dire plus… »


Le gouvernement n'est en effet pas compétent pour modifier les régimes de retraite des députés et des sénateurs. Ce sont les Bureaux de l'Assemblée et du Sénat, des instances chargées des règles internes de ces deux assemblées, qui en décident.
Le gouvernement n'est en effet pas compétent pour modifier les régimes de retraite des députés et des sénateurs. Ce sont les Bureaux de l'Assemblée et du Sénat, des instances chargées des règles internes de ces deux assemblées, qui en décident. - Capture d'écran Twitter


Le député Renaissance Sacha Houlié a dénoncé une « fake news », en précisant que le régime spécial de retraites des députés avait disparu en novembre 2017.

FAKE OFF

Le gouvernement n’a effectivement pas la compétence pour modifier les règles des retraites des députés et des sénateurs. Ce sont les parlementaires eux-mêmes qui en ont la capacité, plus précisément le Bureau de l’Assemblée nationale et celui du Sénat. Ces deux instances, composées de députés et de sénateurs, ont pour objet de régir « l’organisation et le fonctionnement interne » de l’Assemblée et du Sénat.

Les députés ont modifié à plusieurs reprises les règles de leur retraite. En novembre 2017, le Bureau a « aligné le régime de retraite des députés sur le droit commun », selon le site de l’Assemblée nationale*. Le régime complémentaire, qui était facultatif, a été supprimé. Les pensions des députés suivent désormais les mêmes règles que celles des fonctionnaires. Cette pension est de 683,38 euros net par mois, au bout de cinq ans de mandat.

C’est le changement de majorité à l’Assemblée nationale qui avait amené cette réforme. Lors de sa campagne, Emmanuel Macron s’était engagé à supprimer les régimes spéciaux des parlementaires. Les députés macronistes, en majorité absolue à l’Assemblée nationale en 2017, ont appliqué la promesse. Le Sénat, où les élus Les Républicains (LR) sont restés majoritaires lors des élections de 2017 et 2020, ne l’a pas fait. Un élu LR veut toutefois modifier les règles du Sénat : Le Figaro relate que le député Pierre-Henri Dumont a déposé un amendement au projet de réforme des retraites défendu actuellement par le gouvernement pour supprimer ce régime spécial. Son amendement a été déclaré irrecevable.



Les sénateurs ont donc toujours leur propre caisse de retraite, qui a elle aussi été réformée à plusieurs reprises. Ceux qui sont nés après le 1er janvier 1955 peuvent faire valoir leurs droits à partir de 62 ans. Ce droit à la retraite est « destiné à pallier la rupture subie dans la carrière professionnelle [des sénateurs] du fait de leur élection, et à leur garantir un revenu de retraite », justifie le site du Sénat. Ce système est financé par les sénateurs.

Dans son projet de réforme des retraites, le gouvernement prévoit de laisser subsister quelques régimes spéciaux, tels que ceux de l’Opéra de Paris ou de la Comédie Française. Interpellé à ce sujet, Olivier Dussopt s’en est justifié, arguant de la « difficulté de pratiquer ces métiers, par exemple la danse, au-delà d’un certain âge ». Le ministre a également justifié du maintien du régime spécial des marins-pêcheurs, avançant que cette profession « est l’une des plus difficiles et, malheureusement, des plus exposées au risque de décès en activité ».

* Contactés par 20 Minutes, l’Assemblée nationale et le Sénat n’ont pas donné suite à nos sollicitations.