Législatives 2022 : L'union à gauche oblige-t-elle les autres partis à s'unir ?
POLITIQUE Les principaux partis de gauche ont signé un accord pour présenter des candidats uniques sous la bannière « Nouvelle union populaire écologique et sociale » dans les 577 circonscriptions pour les législatives
- Après de longues négociations, les partis de gauche ont négocié un accord pour présenter des candidatures communes dans les 577 circonscriptions.
- Cette alliance des insoumis, communistes, écologistes et socialistes devrait rebattre les cartes pour les législatives de juin prochain.
- L’accord à gauche pourrait pousser La République en marche à solidifier la majorité présidentielle avant le premier tour, tandis que le Rassemblement national et Reconquête ! partiront divisés.
« Un accord historique », selon les signataires. Après d’âpres négociations, les partis de gauche se sont finalement accordés pour les législatives des 12 et 19 juin prochains. La France insoumise, forte des 22 % de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, est parvenue à convaincre écologistes, communistes et socialistes de présenter des candidatures communes sous la bannière « Nouvelle union populaire écologique et sociale » (NUPES) dans les 577 circonscriptions. Cette unité à gauche va-t-elle obliger les autres camps à s’allier pour le scrutin ?
Sur le papier, l’accord permet à la gauche de présenter un seul candidat par circonscription. Pas anodin quand on connaît les règles de qualification aux législatives : faire partie des deux premiers ou obtenir au moins 12.5 % des inscrits (soit environ 25 % si l’abstention est de 50 %) pour se maintenir au second tour. « Sans accord, la fragmentation des voix à gauche aurait rendu la qualification plus compliquée. L’union augmente donc cette perspective même s’il peut y avoir des candidatures dissidentes qui ne respecteront pas l’accord », précise Martial Foucault, professeur à Sciences po. « L’unité change le rapport de force et pourrait créer davantage de triangulaires, avec un bloc de gauche, un bloc centriste et un bloc d’extrême droite », ajoute le directeur du Cevipof.
Vers un renforcement de « la majorité présidentielle » ?
Cette redistribution de cartes devrait entraîner des bouleversements au sein de la majorité présidentielle, selon le chercheur. « La République en marche a désormais la nécessité de s’assurer qu’il y a le moins possible de perditions au centre-droit, limitant notamment les affrontements avec les alliés comme Horizons [le parti d'Edouard Philippe]. L’accord à gauche peut aussi produire une accélération de débauchages des candidats Les Républicains sortants, si ces derniers ont le sentiment que la bannière "majorité présidentielle" leur offre plus de chance d’être élus », ajoute Martial Fourcault.
La tentation macroniste de plusieurs élus LR agite la droite depuis plusieurs jours. Mais la direction du parti a fait savoir qu’il n’y aurait pas d’accord national avec Emmanuel Macron. « Ca fait deux mois qu’on nous annonce que des dizaines d’élus vont rejoindre la majorité, mais on n’a vu personne sortir », balaie le député LR de la Manche, Philippe Gosselin. « Ce n’est pas parce qu’il y a un cartel électoral à gauche qu’il faut une union des droites. Sur le terrain, je ne pense pas que cette alliance change vraiment la donne. La dynamique nationale derrière la figure de Mélenchon ne l’est pas forcément au niveau local », nuance-t-il.
Le Rassemblement national continue de fermer la porte
Eric Zemmour a, de son côté, tenté d’utiliser cette union de la gauche pour enfin convaincre Marine Le Pen de faire alliance aux législatives. « Soit le bloc national s’unit, et dans ce cas-là il pourrait se retrouver au second tour dans 396 circonscriptions et avoir entre 100 et 200 députés. Soit il n’y a pas d’accord et le RN aura seulement 15 députés et il y aura 100 à 150 mélenchonnistes », a tweeté lundi le patron de Reconquête !. Un argument qui n’a pas du tout convaincu le Rassemblement national, qui continue d’ignorer son ex rival. « La gauche, qui est en état de mort cérébrale, tente de sauver ce qu’elle peut sauver avec cet accord, on peut le comprendre. Mais ça ne change rien à notre stratégie : nous aurons des candidats partout », appuie Gilles Pennelle, patron du RN en Bretagne.
Ce refus agace les cadres de Reconquête ! « Jean-Luc Mélenchon a, lui, eu l’intelligence politique de tendre la main à ceux qui l’ont empêché d’être au second tour. Macron tente aussi d’unifier sa majorité, constate Benjamin Cauchy, candidat du parti identitaire dans l’Aisne. De nôtre coté, le RN refuse cette unité pour des raisons passionnées. Cela nous rendra la tâche plus difficile pour le scrutin ».