Régionales : En Paca, Marine Le Pen prône « l'alternance » et cible Emmanuel Macron
REPORTAGE La présidente du Rassemblement national espère bien faire basculer cette région dans son escarcelle pour lancer au mieux sa campagne présidentielle
- Marine Le Pen était en déplacement ce jeudi aux côtés de Thierry Mariani, soutenu par le RN pour les régionales en Provence-Alpes-Côte-d'Azur.
- La responsable a accusé Emmanuel Macron d’avoir joué le « marionnettiste » dans l’alliance entre le sortant LR Renaud Muselier et LREM.
- Cette nationalisation du scrutin pourrait pousser les opposants du RN à lui faire barrage en vue du second tour, en Paca comme dans d’autres régions.
De notre journaliste dans le Var,
Au port du Brusc, ça s’agite. Sous un soleil timide, une poignée de militants scrutent impatients l’arrivée de voitures noires. Marine Le Pen descend tout sourire, arborant une étonnante paire de lunettes à verres fumés. Nouvelle étape dans la dédiabolisation du parti ? « Un problème à l’œil », évacue-t-elle d’emblée. A ses côtés, Thierry Mariani, tête de liste soutenu par le RN pour les régionales en Provence-Alpes-Côte-d’Azur mais non encarté, est plus discret dans son costume noir. A trois jours du premier tour, la présidente du mouvement vient soutenir dans le Var l’ancien ministre sarkozyste, transfuge de LR, donné gagnant devant le président sortant de droite, Renaud Muselier.
« Le gouvernement organise l’abstention », dénonce Marine Le Pen
Un café à l’entrée du marché, quelques selfies, et Marine Le Pen frappe. « Cette campagne va aboutir à une véritable alternance. Il y a beaucoup à faire, la région est sous la direction de Monsieur Muselier, le bonnet d’âne des régions françaises ! Thierry Mariani va offrir l’excellence », lance-t-elle. Ce mercredi matin, le hameau de Brusc n’a jamais aussi mal porté son nom : rien ne vient bousculer la quiétude du port de plaisance. Marine Le Pen déambule lentement entre les étals, distribue ses tracts aux curieux, sans jamais être embêtée, si ce n’est pas la nuée de caméras qui l’entourent.
David Rachline, maire RN de Fréjus, se confie, à l’écart, sur les craintes de de l’abstention les 20 et 27 juin. « Nous pouvons emporter cette région, mais il faut mobiliser. La venue de Marine est importante pour cette raison car elle incarne notre leadership et, dans l’esprit des gens, elle évoque l’élection présidentielle », assure l’élu local de Paca, où la candidate FN était arrivée en tête au premier tour en 2017 avec 28% des voix. « J’en appelle à la mobilisation et je suis frappée de constater que le gouvernement organise l’abstention, enfonce la présidente RN. Rien n’a été fait pour informer les Français de cette élection, aucun clip, aucune information spécifique. Je pense qu’ils espèrent que l’abstention les sauvera, mais ils ont tort ! »
« Le marionnettiste, c’est Macron »
Le déplacement en Paca n’a rien d’anodin. L’alliance entre La République en marche et Renaud Muselier, le président LR sortant, permet d’attaquer directement le chef de l’Etat. « Les électeurs de droite ont compris qu’ils ont été trahis. La liste est devenue de plus en plus celle de LREM », tranche Thierry Mariani, trois heures plus tard en conférence de presse à Toulon, dénombrant « 38 personnes qui soutiennent ouvertement Monsieur Macron ». Marine Le Pen ajoute la formule : « Le marionnettiste, c’est Macron. Monsieur Muselier est entre les mains de Macron. Cette liste est une magouille électorale. »
L’enjeu est crucial pour Marine Le Pen, qui souhaite faire d’une éventuelle victoire régionale un marchepied pour sa campagne présidentielle l’an prochain. « L’alternance est une nécessité. Ce désir de mettre en œuvre une autre politique, on la ressent partout. Paca est notre plus grande chance de victoire, mais d’autres régions peuvent être gagnées. Nous sommes en têtes dans six régions et le reste en deuxième position », assure-t-elle, alors que parti a de bons espoirs aussi en Bourgogne-Franche-Comté, dans les Hauts-de-France et en Centre-Val de Loire. « Au niveau des communes, on a fait la démonstration qu’on fait du bon travail. Faire ça à plus grande échelle serait un point positif et mettrait à mal les faux procès en incompétence », résume David Rachline, réélu au premier tour en 2020.
Mais en 2015, les « fronts républicains » avaient empêché le Front national de l’époque d’emporter une victoire. En nationalisant la campagne, Marine Le Pen pourrait pousser un peu plus la constitution de ces nouveaux « barrages » anti-RN, en Paca comme dans d’autres régions. « Ce front anti-Rassemblement national participe à la clarification de la ligne politique française. Au lieu de faire leurs coups en douce, ils le font au grand jour », balaie-t-elle. Mais à dix mois de l’élection présidentielle, un nouvel échec aux régionales révélerait les limites de sa stratégie de normalisation entreprise depuis plusieurs années.