« Vous avez la parole » : Xavier Bertrand sort du bois en se posant en recours face au duel Macron-Le Pen

POLITIQUE Le président de la région Hauts-de-France a confirmé qu’il « pensait » à l’élection présidentielle 2022 dans l’émission de France 2 jeudi soir

Thibaut Le Gal
Xavier Bertrand.
Xavier Bertrand. — ERIC DESSONS/JDD/SIPA
  • Xavier Bertrand était l’invité de l’émission « Vous avez la parole » sur France 2 jeudi soir.
  • Le président de la région Hauts-de-France a confirmé qu’il « pensait » à l’élection présidentielle 2022.
  • L’ancien maire de Saint-Quentin a tenté de se démarquer d’Emmanuel Macron.

Xavier Bertrand sort du bois. Discret dans les médias depuis des mois, le président de la  région Hauts-de-France était l’invité de  l'émission Vous avez la parole sur France 2 jeudi soir. Pendant plus de deux heures, l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy,  qui a quitté Les Républicains en décembre 2017, a répondu aux questions des journalistes et débattu avec ses opposants. Avec cet objectif : montrer qu’il pourrait incarner l’avenir à droite.

« L’enjeu est de dire aux gens que le face-à-face entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen n’est pas inéluctable, qu’une autre voie est possible. Il était important de commencer à donner à voir ce que pourrait être la France de Xavier Bertrand », résume son entourage.

Xavier Bertrand travaille son image d'« anti-Macron »

Xavier Bertrand, qui a voté «sans état d'âme et sans ambiguïté» pour Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle, a ciblé le chef de l’Etat lors de l’émission. L’ancien député UMP a jugé la réforme des retraites de l’exécutif « hypocrite, injuste, et dangereuse », et torpillé Emmanuel Macron sur les sujets régaliens. « L’autorité ne serait pas autant bafouée si on avait une véritable politique de droite, la sécurité serait garantie, la justice se ferait respecter, nos maires ne seraient pas en difficulté, et nos pompiers ne seraient pas autant blessés ».

L’ancien maire de Saint-Quentin (Aisne) a tenu à se démarquer du chef de l’Etat, en soulignant son image d’élu de terrain. « Je suis resté provincial, même quand j’étais ministre, tous les week-ends, j’étais Saint-Quentinois, parce que c’est chez moi […] Je ne suis pas passé par la formation type, je n’étais pas du sérail, j’ai souvent senti un regard méprisant. Quand vous êtes au contact des gens […] à portéé d’engueulade, ça permet de ne pas se rendormir ».

Le député LR de l’Aisne Julien Dive, proche du président de la région Nord, force le trait : « Les deux sont opposés dans leur personnalité et leur manière de faire de la politique. Bertrand n’est pas énarque, il n’a pas été banquier d’affaires mais assureur de province. Macron n’a pas eu de mandat local, alors que Bertrand a gravi les étapes seul, élections par élections. Il a plus de chair quand Macron est dans une logique plus comptable ».

« Bertrand a toute sa place dans notre famille », ironise un député LREM

Dans le contexte des «giles jaunes», Xavier Bertrand tente ainsi d’installer un duel entre lui,  «plouc de province» assumé et le « président des riches ». La stratégie vise aussi à cacher les nombreux points communs, sur le fond, entre les deux hommes.


L’ex député UMP a longtemps ménagé le chef de l’Etat, validant par exemple la réforme du Code du travail. Sur le plateau de France 2, il a parfois eu du mal à se distinguer de la politique de l’exécutif, soutenant la privatisation d’ADP ou l’extension de la PMA. « Il n’a jamais fait de louanges à la majorité mais il sait reconnaître quand les choses vont dans le bon sens,  comme la réforme de l’apprentissage par exemple. Il n’est pas dans une opposition stérile », balaie Julien Dive.

Le député LREM Aurélien Taché ironise sur le virage de cet ancien « Macron-compatible », qui se serait même vu proposer Matignon en 2017 : « Bertrand a toute sa place dans notre famille. La droite moderne et européenne peut se fondre dans le progressisme. Mais est-ce qu’il mettra l’intérêt de la nation avant ses propres ambitions ? »

Jeudi soir, l’intéressé ne s’est pas caché. Il a reconnu « penser » à la prochaine présidentielle, précisant toutefois que s’il perdait aux régionales de 2021, il n’aurait pas « le crédit » pour briguer l’Elysée et arrêterait la politique. « Chacun a son tempo. Mais c’est une personnalité qui compte, indique l’ex porte-parole LR Laurence Sailliet, longtemps proche de lui. La droite républicaine doit trouver un candidat à la hauteur pour 2022, car on ne peut pas laisser s’installer un duel Macron-Le Pen ».