Primaire à droite: «On ne comprend pas»... Au QG de Juppé, les militants sonnés par la défaite

REPORTAGE « 20 Minutes » était avec les militants d’Alain Juppé lors de l’annonce des résultats de la primaire de la droite et du centre ce dimanche soir…

Laure Cometti
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Une militante émue après la défaite d'Alain Juppé au second tour de la primaire de la droite le 27 novembre 2016, à Paris.
Une militante émue après la défaite d'Alain Juppé au second tour de la primaire de la droite le 27 novembre 2016, à Paris. — Patrick KOVARIK / AFP

C’est un peu la chronique d’une défaite annoncée. Avant l’annonce des premiers résultats de la primaire de la droite et du centre, les militants et sympathisants d’ Alain Juppé, « stressés », voulaient « y croire jusqu’au bout ». Certains « espéraient un miracle », mais le cœur n’y était plus vraiment ce dimanche soir dans la grande salle louée dans le 15e arrondissement de Paris pour l’occasion. Les premiers chiffres du dépouillement ont l’effet d’une « claque » pour les juppéistes, déjà sonnés par le premier tour : le maire de Bordeaux est distancé de 34 points par François Fillon (selon les résultats de plus de 90 % des bureaux de vote, à 23 h).

« Un immense gâchis pour la France »

Dans la salle, il y a un silence à l’annonce des résultats, puis un « oh ! » de déception. Les militants n’imaginaient pas perdre avec un tel écart. « On s’y attendait un peu, mais c’est pas pareil quand ça arrive », lâche un proche du candidat.

Pour Parvine, c’est « un énorme sentiment de tristesse, d’autant que c’est sûrement son dernier combat politique », déplore cette quinquagénaire. « C’est un immense gâchis pour la France, c’est notre dernier gaulliste humaniste », renchérit Marie, qui regrette une campagne « ternie par les calomnies contre Alain Juppé ». Tous les militants interrogés par 20 Minutes ce dimanche soir évoquent ce sujet, blâmant en partie les accusations de complaisance avec l’islam politique qui ont circulé sur leur champion.

Juppé accueilli sous les vivats

« Cette semaine était affreuse, on s’en est pris plein la gueule », peste Gauthier, un verre de vin rouge à la main. Avec les Jeunes avec Juppé (ou « Péju » comme il est écrit sur leur t-shirt), il a tracté jusqu’au dernier moment. Un peu plus loin, un jeune homme aux yeux rougis se fait réconforter par d’autres militants avant d’être assailli par les caméras.

Vers 21 heures, Alain Juppé monte à la tribune, sous les vivats. Visiblement ému, le maire de Bordeaux félicite son adversaire et remercie ses soutiens. Aux plus jeunes, il lance : « Continuez à porter l’idée de la France que nous avons partagée, une France apaisée et réconciliée ». Un message d'« espérance » (l’un des autres mots-clés de sa campagne) qui n’aura toutefois pas trouvé d’écho dans cette primaire de la droite et du centre.


Le maire de Bordeaux achève son très bref discours par un bain de foule, tout aussi rapide, avant de quitter le QG. «Il était digne, son discours m'a ému», lâche une militante.

« Faire moins de 35 %, c’est horrible »

Amer, un membre de l’équipe de campagne, déplore un « aveuglement » et du « gâchis ». « Nous n’avons pas assez mis en avant nos idées innovantes ». Dans la salle, l’heure n’est pas encore aux analyses ou questions, même si on cite le statut initial de favori, qui a pu jouer en sa défaveur, ou la focalisation sur Nicolas Sarkozy alors qu'« on n’a pas vu venir Fillon, ou trop tard ». Déçus, les juppéistes interrogés par 20 Minutes se rangent toutefois derrière François Fillon, qui a d'ailleurs appelé au «rassemblement» dans son discours de victoire.

Pour l’heure, les militants accusent le coup. « Oh la la, 33 % ! » Mathieu blêmit alors que les résultats se précisent, au fil du dépouillement. « Faire moins de 35 %, c’est horrible, c’est très dur. On ne comprend pas. Il va falloir qu’on se pose des questions, qu’on essaie de comprendre », tergiverse le jeune homme.

« Ce soir, on va boire du bon bordeaux », l’interrompt une jeune fille. « Et demain, on va impulser des idées modernes, on créera un think tank », lance-t-elle, tandis que les premières notes de Don’t Stop me Now (« Ne m’arrête pas maintenant ») de Queen retentissent. Les sourires et les selfies remplacent peu à peu les larmes, même si « le réveil sera dur demain », prédit, la voix blanche, Johann, 23 ans.