Assurance-chômage: On décrypte la valse à trois temps du gouvernement
EMPLOI Les déclarations du ministre de l'Economie ont relancé la polémique sur l'assurance chômage chez les socialistes et au sein de l'exécutif...
Une valse à trois temps. François Hollande et le gouvernement ont semblé jouer des partitions différentes ces derniers jours sur la réforme de l'assurance-chômage. Lundi dernier, Manuel Valls estime que la question du montant et de la durée de l’indemnisation chômage devait «être reposée». Tollé à gauche, le président recadre son Premier ministre. «Il y a suffisamment de sujets pour que nous soyons bien occupés et que nous montrions que nous faisons des réformes utiles à l'emploi». Dont acte.
Dimanche, pourtant, tombe l'interview d'Emmanuel Macron au JDD. «Il ne doit pas y avoir de tabou ni de posture. L'assurance-chômage est en déficit de 4 milliards d'euros [...]Il y a eu une réforme, elle est insuffisante», annonce le ministre de l'Economie.
«Cacophonie» ou «ballon d'essai»?
Les socialistes ne savent plus sur quel pied danser. «C'est la cacophonie, s'agace Marie-Noëlle Lienemann. A chaque annonce de Standard and Poor's, le gouvernement se sent obligé d’annoncer des "pseudo-réformes" structurelles qui visent à démanteler notre modèle social, développe la sénatrice socialiste de Paris. Notre politique est un bouchon au fil de l'eau, il faut une clarification».
«C’est incompréhensible», renchérit Yann Galut. «Le chef de l’Etat nous dit "c’est terminé, la question sera tranchée par les partenaires sociaux en 2016" et deux jours après le ministre de l’Economie le contredit». Le député socialiste du Cher s’interroge. «Est-ce de l’amateurisme de la part d’Emmanuel Macron qui débute dans ses fonctions? Ou un ballon d’essai pour préparer les esprits?»
Rassurer Bruxelles
L'interview aurait été relue à Matignon et à l’Elysée, explique l'entourage du président au Parisien. Pas de dissonance, donc. «Il y a un double discours. Valls et Macron parlent à Bruxelles, Hollande et les socialistes parlent aux Français», lâche un député socialiste. La stratégie? Donner des gages à la Commission européenne, au moment où le gouvernement doit présenter son budget 2015, déjà très critiqué à Bruxelles. Peu importe, les crispations socialistes. «Le prix à payer serait plus fort encore si demain le budget était retoqué», prévient ce député. «Le gouvernement a fait le choix de la moins mauvaise solution».
L'agacement des socialistes
«L’interview de Macron est un couac. Ce qui en ressort, c'est le manque de communication au sein du gouvernement», analyse Philippe Moreau Chevrolet, fondateur de l'agence de communication MCBG. «Que l’exécutif essaye ensuite de faire croire qu'il savait, c’est logique, on est dans une stratégie de damage control [limiter les dégats]».
La négociation sur l'assurance chômage «viendra le moment venu» mais «pas immédiatement», assure l'Elysée ce lundi. Voulue ou non, la dissonance ne passe pas chez les socialistes. «Aucun débat n'est interdit, mais celui-là est malvenu. Nous venons tout juste de négocier une convention sur l’assurance-chômage», note le député de Seine-et-Marne, Olivier Faure.
«Le Premier ministre doit se rende compte que ces déclarations sont ravageuses à gauche. Repousser les tabous, à la hussarde, va encore plus nous démobiliser et donner de l’oxygène aux frondeurs», prévient Yann Galut, qui ajoute, fataliste. «Ces quinze derniers jours, on avait réussi à stabiliser le débat. Si on veut exploser notre camp, continuons comme ça».