Besançon: Des escargots comme outils de mesure de la pollution

ENVIRONNEMENT Un laboratoire CNRS de l'université de Franche-Comté mène une expérimentation avec des gastéropodes...

Alexia Ighirri
Besançon: Des escargots pour mesurer la pollution de l'environnement
Besançon: Des escargots pour mesurer la pollution de l'environnement — Alexas_Fotos / Pixabay
  • Le laboratoire CNRS Chrono-environnement de l’université de Franche-Comté fait appel aux escargots comme bioindicateurs pour évaluer la qualité de l'environnement.
  • « L’escargot est idéalement situé à l’interface entre le sol, les plantes et l’air. Il mange le sol et la végétation, et il possède un poumon dans lequel on peut retrouver des particules ». Les scientifiques peuvent alors, lors des analyses, trouver différentes sources de contamination.
  • Cela permet notamment de développer un outil utile et facilement reproductible servant l’évaluation du risque environnemental lié à la contamination des écosystèmes terrestres.

Il y en a sous la coquille ! Et c’est bien pour cela que le laboratoire CNRS Chrono-environnement de l’université de Franche-Comté fait appel aux gastéropodes. Depuis le début des années 1990 et les travaux de l’enseignante-chercheuse Annette de Vaufleury, jusqu’à nos jours et l’expérimentation menée sous la houlette Frédéric Gimbert, son collègue écotoxicologue au laboratoire de Besançon, qui travaille avec les escargots pour évaluer la qualité de l’environnement.

Pourquoi l’escargot ?

En raison de sa capacité à stocker les informations dans ses tissus. « L’escargot est idéalement situé à l’interface entre le sol, les plantes et l’air. Il mange le sol et la végétation, et il possède un poumon dans lequel on peut retrouver des particules », détaille Frédéric Gimbert. Les scientifiques peuvent alors, lors des analyses, trouver différentes sources de contamination. « Il est capable de concentrer les substances dans son corps, en particulier dans saglande digestive. Plus on laisse l’animal longtemps sur place, plus il va accumuler les substances et va les concentrer dans ses tissus. Des choses qu’on ne peut pas détecter dans les sols parce que présentes à trop petites doses. »

L’escargot devient ainsi un bioindicateur, reflétant la qualité du milieu dans lequel il vit. Plusieurs espèces peuvent jouer ce rôle à condition « qu’il participe au fonctionnement de l’écosystème, qu’il soit présent un peu partout, qu’il soit facile à identifier, à échantillonner, à élever », liste le chercheur.

Comment ça marche ?

Les œufs étant fournis par des reproducteurs, les animaux sont élevés dans la «nurserie» du laboratoire. Une fois arrivés au stade de subadultes (à partir de deux mois), les escargots vont passer un voire deux mois sur le terrain, dans une cage (cylindre en inox). « Il y a généralement trois cages par parcelle, avec une dizaine-quinzaine d’escargots à l’intérieur. Pas plus, pour qu’ils aient tous à manger », poursuit le responsable de l’expérimentation.

Durant tout ce temps, les gastéropodes vont directement prélever et concentrer les substances présentes dans les sols, les plantes ou l’atmosphère… Comme dans les conditions réelles. « Puis on fait des prélèvements réguliers pour des analyses en laboratoire, selon les systèmes les plus éthiques possible, prévient Frédéric Gimbert, par exemple via des prélèvements non-létaux par exemple qui sont l’équivalent de prises de sang. »

Qu’est-ce qui est recherché ?

Grosso modo, les pollutions auxquels l’humain peut être exposé. « Au niveau des substances, soit on peut tout chercher soit on sait d’avance ce qu’on doit chercher », répond l’écotoxicologue. Il cite l’exemple d’un travail mené dans le Nord-Pas-de-Calais, sur le site de Metaleurope, avec la problématique du plomb ou du zinc.
« En Alsace, on a travaillé dans des parcelles viticoles sur les pesticides, avec un système de cages particulier pour que le viticulteur puisse passer dessus », illustre-t-il encore.

Et puis il y a parfois quelques surprises : « Dans certains coins, au milieu de la forêt vosgienne, des indicateurs de risques sont plus élevés qu’à Metaleurop du fait de la présence de déchets miniers anciens, ici du Moyen-Age », glisse le chercheur.

Pour quels objectifs ?

Il y en a plusieurs. En laboratoire, les chercheurs peuvent tester la toxicité de différentes molécules en observant et quantifiant des impacts sur la croissance et/ou l’inhibition de la reproduction des escargots (et donc potentiellement sur les êtres vivants dans leur globalité).

Cette expérimentation, en normalisant l’usage des escargots en bioindication, nous développons aussi un outil utile et facilement reproductible servant l’évaluation du risque environnemental lié à la contamination des écosystèmes terrestres.