En Chine, la voiture gagne de plus en plus de terrain

TRANSPORTS La croissance chinoise n'en finit plus, y compris celle du taux de motorisation des habitants. Et les forts investissements dans les transports en commun peinent à contrer l'explosion de la voiture…

Mickaël Bosredon
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La Chine a reconnu officiellement pour la première fois mardi être devenue le premier pays du monde en volume d'émissions de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique.
La Chine a reconnu officiellement pour la première fois mardi être devenue le premier pays du monde en volume d'émissions de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique. — Frederic J. Brown afp.com

Au dernier classement IBM des villes les plus polluées, Pékin occupe désormais la première place. Des mesures, comme l’instauration d’un quota d’immatriculation de nouveaux véhicules fixé à 20.000 par mois (soit 65% de moins qu’en 2010) et distribué par tirage au sort, ou l’augmentation du prix du stationnement, ont été prises pour limiter la motorisation des résidents de cette mégalopole de 18 millions d’habitants. Des mesures qui limitent, mais n’empêchent pas la prolifération automobile dans les grandes villes. Une montée en puissance qui gagne l’ensemble du pays.

Le dernier recensement, dont les chiffres viennent de tomber, fait état d’une population de 1,34 milliards d’habitants, indique Jean-François Doulet, responsable du programme Chine à l’Institut pour la ville en mouvement, et auteur du blog Villes chinoises. Il intervenait jeudi 26 mai à une journée-débat organisée par le Certu (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques) intitulée «Mobilités de demain: Chine, Inde et Japon… ?». «La Chine est pour le moment un pays modérément urbanisé, de l’ordre de 50%, et modérément motorisé - à l'exception des grandes villes, avec un taux de l’ordre de 20 pour 1.000 contre 500 pour 1.000 en Europe. Mais le rythme de croissance est phénoménal.» Ainsi, la Chine est devenue en 2009 le plus grand marché automobile au monde, avec 40 millions de véhicules en circulation et un marché d’environ 10 millions de voitures par an. Le taux de motorisation augmente de l’ordre de 30% par an. 80% de ces acheteurs sont des primo-accédants.

Le véhicule électrique ne représentera pas plus de 10 à 15% du marché en 2030

Le Certu souligne cependant que la Chine est aussi un pays qui développe massivement ses transports en commun, notamment dans les grandes villes. A Pékin, la voiture continue de gagner des parts de marché, mais les transports urbains sont devenus le premier mode de déplacement depuis 2005. La ville a fortement investi dans ces infrastructures, notamment à l’occasion des Jeux olympiques. Mais le plus frappant est l’exemple de Shanghai, souligne Jean-François Doulet. Cette ville est passée de 25 à 40 % de part modale en faveur des transports urbains entre 2005 et 2010. Pour les transports en commun, le succès repose sur une innovation, une carte multimodale, sans doute la solution de billetique la plus aboutie au monde. Grâce à cette carte, on peut acheter ses billets pour les réseaux de bus et de métro de Shanghai, mais aussi des villes périphériques. On peut aussi s’en servir pour prendre le taxi et acheter dans certains magasins, et depuis peu elle s’intègre dans les téléphones portables.» Parallèlement, le TGV se développe fortement également entre les grandes villes, les Chinois n’hésitant pas à l’utiliser comme mode de déplacement quotidien.

On estime toutefois que seulement 15% de la population aura accès à un réseau de type métro en 2015. La voiture continuera donc à gagner inexorablement du terrain. A ceux qui pensent que la Chine va devenir le nouvel eldorado du véhicule électrique, Jean-François Doulet rappelle que «les investissements engagés dans ce domaine ne donnent pas vraiment de résultats. Les projections montrent que le véhicule électrique ne représentera pas plus de 10% de parts de marché en 2030. La Chine n’est pas un marché propice à la rupture technologique. De plus, les industriels chinois n’ont pas observé l’émergence d’un marché à l’international. Cela veut dire que le parc de voitures chinois va se constituer en majeure partie avec des véhicules à motorisation classique.»