Et si l’huile de friture vous permettait de faire la vaisselle ?

TOUT SE TRANSFORME La Savonnerie circulaire, une entreprise de Montpellier, commercialise des savons solides et liquides écologiques pour la vaisselle, les sols et la lessive

Nicolas Bonzom
Anne-Cécile Vain et Alliny Ferrera-Naves, créatrice de la Savonnerie circulaire, à Montpellier.
Anne-Cécile Vain et Alliny Ferrera-Naves, créatrice de la Savonnerie circulaire, à Montpellier. — Savonnerie circulaire
  • Anne-Cécile Vain et Alliny Ferrera-Naves ont créé la Savonnerie circulaire, une petite entreprise qui transforme les huiles de friture en produits d’entretien.
  • Les deux cheffes d’entreprise récupèrent les huiles de friture dans les restaurants, et créent dans leur atelier, à Montpellier, grâce à la méthode de la saponification à froid, des savons pour la vaisselle, pour les sols ou pour la lessive.
  • N’ayez crainte : aucune odeur de frites ne résiste à la saponification à froid. Et, de toute façon, de l’huile essentielle de lavande est ajoutée lors de la fabrication.

C’est une vieille astuce de grands-mères, qui refait surface, à l’heure où l’on cherche à ne rien jeter, et à tout recycler. Anne-Cécile Vain et Alliny Ferrera-Naves ont fondé, à Montpellier (Hérault), la Savonnerie circulaire, une petite entreprise qui transforme l’huile de friture en… produits d’entretien. « C’est en lisant un livre qui explique comment faire son savon soi-même, que j’ai découvert que toutes les huiles végétales pouvaient permettre de faire du savon ménager, explique Anne-Cécile Vain. Je me suis documentée, et je me suis rendu compte que cette méthode existait à l’étranger. Et en Corse, aussi. »

Mais elle n’est pas la seule à avoir cette drôle d’idée derrière la tête. En assistant à un cours pour les étudiants entrepreneurs, Anne-Cécile Vain, bien décidée à lancer sa petite boîte pour populariser cette méthode miracle, apprend qu’une autre Montpelliéraine, Alliny Ferrera-Naves, souhaite, elle aussi, monter une savonnerie écolo. Cette autre entrepreneuse ultra-motivée se souvenait, petite, que sa grand-mère, au Brésil, recyclait déjà son huile pour nettoyer sa maison. « On s’est rencontré, et ça a été tout de suite un coup de foudre professionnel !, sourit Anne-Cécile Vain. On était deux, dans la même ville, à vouloir monter ce projet, c’était un pur hasard ! » La Savonnerie circulaire est née.

La technique « ancestrale » de la saponification à froid

« C’est une technique ancestrale, qui existe depuis 4.000 ans, la saponification à froid, poursuit l’entrepreneuse héraultaise. On ajoute à l’huile de friture de la soude ou de la potasse caustique, et on mélange manuellement, ou à l’aide d’un mixeur. Ça crée une pâte à savon. Beaucoup d’industriels pratiquent la saponification à chaud, avec de la soude ou de potasse, puis un rinçage. Ça va plus vite, mais c’est plus gourmand en énergie et en eau. C’est pour cela que l’on a opté pour la saponification à froid. »

La petite entreprise d’Anne-Cécile Vain et Alliny Ferrera-Naves commercialise ainsi des savons solides, pour la vaisselle ou les surfaces, des copeaux pour la lessive et un nettoyant liquide pour le sol. Tous sont aussi efficaces que les produits que l’on trouve dans les grandes surfaces. Mais ceux de la Savonnerie circulaire sont écologiques, et sans risques pour l’environnement, la santé ou les animaux de compagnie. « C’est une formule complètement naturelle », note Anne-Cécile Vain. Et ça, c’est dans l’air du temps. « Nous avons fait une étude de marché, avant de lancer la Savonnerie circulaire, et nous avons constaté que même de grandes entreprises se "verdissent" et essaient de proposer des solutions écoresponsables. Revenir à des choses plus naturelles, c’est une vraie tendance. » 

Par ailleurs, n’ayez crainte : aucune odeur de frites ne résiste à la saponification à froid. Et, de toute façon, les deux jeunes femmes, dans leur atelier, ajoutent de l’huile essentielle de lavande, lors de la fabrication des savons.

De l’huile de friture récupérée chez les restaurateurs

Attention, toutefois, la Savonnerie circulaire fabrique bien des produits pour le nettoyage, et pas pour l’hygiène corporelle. « Il y a eu des produits alimentaires dans ces huiles, et certains pourraient provoquer des réactions allergiques », précise la cheffe d’entreprise. Pour faire tourner leur petite entreprise, les deux jeunes femmes tapent à la porte des restaurateurs, qui sont nombreux à ne pas savoir quoi faire de leurs huiles de friture. Pour l’instant, quatre établissements, notamment le MHB Café, le restaurant du club de handball de Montpellier, ou celui du zoo de Lunaret, fournissent bien volontiers des bidons pleins aux deux entrepreneuses, qui récupèrent leurs matières premières en vélo-cargo. Mais avant de les transformer en produits d’entretien, il y a évidemment une étape essentielle de filtrage, pour éliminer toutes les impuretés que ces huiles peuvent contenir.

La Savonnerie circulaire ne récupère pas, en revanche, les huiles de friture chez les particuliers. Car s’il est assez facile de savoir ce que les restaurateurs ont cuisiné, et d’écarter les huiles qui ne conviennent pas (en particulier celles qui ont servi à cuisiner des crustacés, trop allergènes), dans les familles, la traçabilité sera toujours un peu plus incertaine. Alors, prêts à faire le ménage avec l’huile des frites ?

Le site de la Savonnerie circulaire, c’est ici.