Tarn-et-Garonne : Comment la canicule a accentué l’impact des rejets radioactifs de la centrale de Golfech
NuclEaire Une étude indépendante réalisée par le laboratoire CRIIRAD et des associations comme Sortir du nucléaire montre que la contamination de la flore aquatique s’est accentuée entre juin et août, en raison de la baisse du débit de la Garonne
- Une étude de la Criirad, un laboratoire indépendant, montre que les plantes situées en aval de la centrale de Golfech contenaient entre les mois de juin et août 2022 un taux de tritium, un isotope radioactif, quatre fois plus important.
- Pour les associations antinucléaires, la canicule et les bas débits de la Garonne ont un impact sur les effets des rejets radioactifs de la centrale sur l’écosystème de la Garonne.
- EDF Golfech, contacté par 20 Minutes, n’a pas souhaité commenter cette étude, indiquant uniquement que la réglementation en matière de rejets dans l’environnement était respectée.
Les rejets radioactifs de la centrale nucléaire de Golfech dans la Garonne sont régulièrement pointés du doigt par les associations, notamment le réseau « Sortir du nucléaire » ou Stop Golfech. Il y a deux ans, une précédente étude du laboratoire indépendant de la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad) montrait que le tritium et le carbone 14, retrouvés dans des plantes aquatiques, avaient des taux trois fois et quatre fois plus élevés en aval qu’en amont de la centrale de Golfech. Même s’ils restaient en dessous des normes réglementaires.
Deux ans plus tard, les militants antinucléaires font le même constat, analyses à l’appui. Mais ils mettent aussi en évidence l’impact que peuvent avoir les conditions climatiques sur la concentration de ces rejets retrouvés dans la flore de la Garonne au cœur de l’été dernier. Quand les précédentes analyses avaient été réalisées à l’automne, à un moment où les eaux de la Garonne sont plus hautes.
« Ce que nous avons pu démontrer par cette étude, c’est qu’entre le prélèvement réalisé au mois de juin et celui fait en août, la contamination s’est accentuée du fait des conditions de débit de la Garonne et du stade de développement de la plante aquatique. C’est un paramètre que nous n’avions jusqu’alors pas étudié, et qui montre bien que lorsque la Garonne a un pouvoir de dilution plus faible en raison d’une quantité d’eau moindre, on a une contamination plus importante des plantes aquatiques », souligne Marion Jeambrun, responsable d’études à la Criirad.
Quatre fois plus de tritium entre juin et août
Entre le prélèvement du mois de juin et celui d’août, quatre fois plus de tritium ont ainsi été prélevés dans les plantes aquatiques en aval de la centrale, à 1,3 km du point de rejet, alors qu’en amont son niveau est toujours resté inférieur à la limite de détection. Et pour le carbone 14, ce taux est en hausse de 40 % entre les deux périodes, assurent aussi les associations qui présentaient leur rapport ce jeudi.
Mais cela reste en dessous des valeurs maximales réglementaires, comme le rappellent certains militants pro nucléaires sur les réseaux sociaux. Dans son rapport de décembre sur les données relatives à la surveillance des rejets et de l’environnement de la centrale nucléaire de Golfech, EDF présentait d’ailleurs des taux de tritium sur l’année 2022 bien en deçà des limites fixées par la réglementation. Sollicité par 20 Minutes, le producteur d’électricité n’a pas souhaité commenter cette étude.
« Ils font des analyses beaucoup plus loin que leur point de rejet. Ces rejets ne disparaissent pas, tout ce qui est déversé dans notre environnement ne fait que s’accumuler et finit par devenir une composante des organismes vivants. Ces effluents, ce sont des résidus du fonctionnement normal de la centrale. L’industriel stocke ces effluents qui sont radioactifs un temps, mais au bout d’un moment il faut bien les déverser et quand il n’y a plus assez d’eau parce qu’il y a la sécheresse et la canicule, ce qui va se produire de plus en plus souvent en raison du réchauffement climatique, la dissolution est beaucoup moins importante », insiste Laure Barthélemy du réseau « Sortir du Nucléaire ».
Cette dernière rappelle que de récents rapports ont pointé l’insuffisance des connaissances sur les effets de l’exposition interne au tritium. « Quand on boit de l’eau qui contient du tritium ou quand on mange des poissons ou des végétaux qui en ont incorporé dans leurs cellules, on ne connaît pas les effets de l’exposition durable à long terme », insiste la militante. Pour elle, le tritium se retrouve parfois dans les eaux potables des communes qui se trouvent en aval de la centrale de Golfech.
Son association demande aux autorités de contrôle de mettre en place un suivi plus régulier et indépendant, mais aussi que ces effets « soient étudiés de manière objective ».