Londres va discuter avec EDF de la construction d'une nouvelle centrale nucléaire
ENERGIE Le gouvernement britannique publie ce lundi son «livre blanc» sur l'énergie qui doit aider le pays à atteindre ses objectifs climatiques. Parmi les solutions en vue figure celle de construire une nouvelle centrale nucléaire, sur la côte est de l’Angleterre
Le gouvernement britannique va discuter avec le géant français EDF de la construction d'une centrale nucléaire dans le Suffolk sur la côte Est de l'Angleterre, confirmant ses ambitions dans l'atome, énergie sur laquelle il compte pour respecter ses objectifs climatiques.
EDF, qui renforce ainsi sa position de premier plan dans le renouveau du nucléaire britannique, avait annoncé en mai avoir déposé une demande pour construire cette nouvelle centrale d'une puissance de 3,2 GW et capable de fournir de l'électricité à six millions de foyers.
« Au moins une centrale nucléaire » d’ici la fin de la législature
Les pouvoirs publics n'excluent pas de participer au financement de cette centrale, Sizewell C, qui sera équipée de deux réacteurs EPR, selon un communiqué lundi du ministère des Entreprises dévoilant plusieurs mesures pour verdir l'économie britannique.
Le gouvernement «évalue les possibilités pour permettre d'investir dans au moins une centrale nucléaire» d'ici la fin de cette législature, soit 2024, est-il précisé. Ce projet à Sizewell, évalué selon la presse britannique à 20 milliards de livres (21,8 milliards d'euros), pourrait créer 25.000 emplois, pour sa construction et son exploitation, estimait en mai EDF.
Déjà une centrale en activité à Sizewell
Cette décision «est une excellente nouvelle», s'est félicité Humphrey Cadoux-Hudsonn, directeur général de Sizewell C chez EDF, qui se dit «impatient d'entamer des discussions avec le gouvernement sur un modèle de financement approprié».
Le syndicat britannique Unite a également salué la nouvelle mais prévient que les négociations sont «complexes» et pourraient durer. A Sizewell, il existe deux centrales, Sizewell A ouverte dans les années 1960 et fermée en 2006, et Sizewell B, ouverte en 1995 et encore en activité.
La centrale est conçue comme une quasi-réplique de celle de Hinkley Point située dans le Somerset (Sud-Ouest de l'Angleterre) et devrait être développée comme cette dernière par EDF avec le chinois CGN partenaire minoritaire.
Le communiqué gouvernemental n'évoque pas CGN. Les relations économiques entre Londres et Pékin sont tendues depuis la décision d'exclure Huawei du réseau 5G du pays.
Le nucléaire à l’avenir encore incertin au Royaume-Uni
Hinkley Point C, validée par le gouvernement en 2016, est la seule centrale nucléaire en construction dans le pays. Londres réfléchit à un nouveau modèle de financement pour le nucléaire pour faire porter le coût initial moins fortement sur le promoteur industriel et davantage sur la facture des consommateurs.
Les ambitions britanniques dans l'atome ont en effet été contrariées récemment en raison de l'abandon en septembre par le conglomérat industriel japonais Hitachi de son projet de centrale au Pays de Galles, qu'il estimait trop risqué financièrement, et des interrogations sur l'implication du Chinois CGN dans plusieurs dossiers.
«Nous continuons de penser que l'avenir du nucléaire à grande échelle au Royaume-Uni est incertain, en raison du développement accéléré des énergies renouvelables et des retards observés à Hinkley Point C», préviennent les analystes de la banque RBC. Le nucléaire fournit environ 20% de l'électricité du pays et les pouvoirs publics veulent maintenir cette part afin d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Il y a actuellement 15 réacteurs au Royaume-Uni sur 8 sites.
Mais aussi mini-réacteurs, éoliens en mer, captage et stockage de carbone...
Le gouvernement détaille par ailleurs plusieurs mesures lundi dans un «livre blanc» sur l'énergie pour permettre au secteur d'aider le pays à atteindre ses objectifs climatiques et créer 220.000 emplois durant la prochaine décennie.
Il va installer un fonds de 385 millions de livres (420 millions d'euros) pour développer des mini-réacteurs nucléaires (SMR ou small modular reactors) destinés à des centrales en modèle réduit,projet sur lequel travaille notamment un consortium mené par le groupe industriel britannique Rolls-Royce.
Londres veut aussi quadrupler la production de l'éolien en mer à 40 gigawatts (GW) d'ici 2030 et investir 1 milliard de livres (1,08 milliard d'euros) dans quatre projets de captage et stockage de carbone ainsi que 240 millions (262 millions d'euros) dans la production d'hydrogène.
Un nouveau marché du carbone en création
Enfin, le gouvernement mettra en place au 1er janvier son propre système d'échanges de quotas d'émissions (ETS) qui régit les émissions des industries lourdes et des centrales électriques et quitter celui de l'Union européenne en raison du Brexit.
Pour l'ONG Greenpeace, «il est bien de voir le gouvernement déterminé à s'éloigner des énergies fossiles et à créer des milliers d'emplois verts, mais construire davantage de centrales nucléaires n'est pas la solution», contrairement selon elle aux renouvelables.