212 défenseurs de l’environnement tués en 2019, un record
COMBAT La moitié des meurtres se sont produits dans seulement deux pays : la Colombie, avec 64 victimes, et les Philippines, avec 43 morts
C’est une année noire pour les défenseurs de l’environnement. Au prix de leur vie, un peu partout dans le monde, ils se battent contre la déforestation, les mines ou des projets agro-industriels : au moins 212 défenseurs de l’environnement ont été tués en 2019. Surtout, ce chiffre constitue un nouveau record, selon l’ONG britannique Global Witness dont le décompte a débuté en 2012.
Des chiffres sous-évalués
Leaders autochtones, rangers chargés de protéger la nature ou militants ordinaires… Le bilan annuel publié mercredi surpasse le précédent record de 2017 où 207 morts avaient été enregistrées. Et comme chaque année, « nos chiffres sont presque certainement sous-évalués », avertit Global Witness.
En 2019, la moitié des meurtres se sont produits dans seulement deux pays : la Colombie, qui avec 64 victimes se classe largement en tête dans une Amérique latine qui représente deux-tiers de ce décompte macabre, et les Philippines, avec 43 morts. Dans les deux pays, comme dans le reste du monde, les représentants des peuples autochtones (40 % des tués en 2019) qui vivent au plus près de la nature « subissent un risque disproportionné de représailles » lorsqu’ils se battent pour défendre « leurs terres ancestrales ». Par exemple aux Philippines, Datu Kaylo Bontolan, leader du peuple Manobo, a été tué lors d’un bombardement aérien en avril 2019 alors qu’il luttait avec sa communauté contre un projet minier.
Avec 50 morts, les mines sont d’ailleurs le secteur le plus meurtrier pour les défenseurs de l’environnement. L’agro-industrie arrive ensuite, avec 34 militants tués en s’opposant à des exploitations d’huile de palme, de sucre ou de fruits tropicaux, en grande partie en Asie. Le combat contre l’exploitation forestière a de son côté fait 24 victimes, une augmentation de 85 % par rapport à 2018.
Défendre la forêt peut aussi coûter la vie en Europe, continent pourtant le moins touché par les meurtres de défenseurs de l’environnement. Ainsi en Roumanie, où l’une des plus importantes forêts primaires d’Europe est victime d’exploitation sauvage, le garde forestier Liviu Pop a été abattu en octobre après avoir surpris des bûcherons illégaux. Un mois plus tôt un autre était tué d’un coup de hache à la tête.
Quelques victoires tout de même
Si, dans le contexte d’une reconstruction d’un monde post-Covid plus vert, la protection des militants environnementaux est « vitale », l’ONG souligne au contraire une « intensification des problèmes » : « les gouvernements à travers la planète, des Etats-Unis au Brésil ou à la Colombie et aux Philippines, ont utilisé la crise pour durcir les mesures draconiennes pour contrôler les citoyens et revenir sur des règles environnementales durement acquises ».
Malgré ce sombre constat, l’ONG se réjouit des quelques victoires remportées par ces militants « courageux », « preuve de leur ténacité ». Comme celle des Indiens waorani en Amazonie équatorienne où la justice a suspendu l’entrée sur leurs terres de l’industrie pétrolière. Toutefois, il ne faut jamais se réjouir trop vite : sur ce dossier le gouvernement a fait appel.