Quatre Français nagent avec les requins les plus dangereux du monde pour changer leur image

AVENTURE Partis de Brest en 2019, ces passionnés veulent changer l’image du requin mangeur d’hommes grâce à leur série sur YouTube « Lords of the Ocean »

Camille Allain
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En apnée, les aventuriers de Lords of the Ocean ont pu approcher au plus près des requins.
En apnée, les aventuriers de Lords of the Ocean ont pu approcher au plus près des requins. — Lords of the Ocean
  • L’expédition Lords of the Ocean est partie de Brest en janvier 2019 pour traverser l’Atlantique et aller à la rencontre des requins réputés les plus dangereux au monde.
  • Les quatre aventuriers ont plongé sans cage au milieu de ces animaux sauvages que le cinéma mondial a souvent caricaturés. Leur objectif ? Changer leur image.
  • Faute d’autorisation, l’équipe n’a pas pu nager sans cage avec le grand requin blanc.

Les images sont claires, filmées dans des eaux bleues translucides. La musique est douce et on ne voit pas une dent, pas une goutte de sang. Avec leur série intitulée Lords of the Ocean, quatre aventuriers partis à la rencontre des requins les plus dangereux du monde ont réussi leur mission : « changer l’image des requins mangeurs d’hommes et combattre les préjugés cultivés dans les films à sensations ». Partie en voilier de Brest dans le froid d’un mois de janvier en 2019, la jeune équipe a traversé l’Atlantique avant de passer sept mois en mer en Amérique centrale. Elle en ramène une série vidéo – que 20 Minutes a aimé – de huit épisodes diffusée depuis peu sur YouTube dans un format incarné atypique.

Jérôme Bourdillon est un aventurier tiraillé entre la fierté et la déception. « Nous avons été jusqu’où on pouvait. » A la barre de son voilier de douze mètres, ce Brestois de 32 ans a réalisé son rêve : nager avec des requins. Mais son ambition d’évoluer sans cage auprès du grand requin blanc n’a pas pu être assouvie. « Nous n’avons pas eu l’autorisation. Depuis quelques années, même les scientifiques ont du mal à y aller. La nage avec les requins est très lucrative pour certains pays. Ils ne veulent pas prendre le risque de voir des gens y aller en dehors des circuits traditionnels », explique celui qui a imaginé l’aventure Lords of the Ocean.

Pendant son périple, l’ingénieur océanographe a pourtant chaussé les palmes au milieu d’autres requins réputés dangereux pour l’homme. Ni lui, ni son pote d’enfance Benjamin, ni le cameraman Armel, ni la professeure de plongée Cyrielle n’ont été menacés pendant leurs excursions. « Nous voulions montrer que la dangerosité est toute relative. Si on respecte certaines règles, les requins ne représentent aucun danger ».

« Nager avec un requin, ce n’est pas un show »

Sans mouvement brusque, sans d’objet brillant, en plongeant en eau claire et de jour et surtout en gardant leur calme, les quatre amis ont pu évoluer au milieu des imposants poissons. En apnée au milieu du requin bouledogue, au large auprès du requin longimane ou en bouteilles près du requin-tigre ou du grand requin-marteau, les quatre aventuriers n’ont pas capté une seule image de gueule ouverte, souvent utilisée par les films à sensations. « On ne pratiquait pas de feeding, c’est-à-dire qu’on ne les nourrissait pas. Alors oui, parfois on va à l’eau et on ne voit rien, mais ce n’est pas grave. Pour nous, nager avec un requin ce n’est pas un show », ajoute Cyrielle Houard.


Originaire du sud-est de la France, la jeune femme a longtemps vécu au Mexique où elle accompagnait des sorties en plongée au milieu des requins bouledogues. « Changer leur image, c’était déjà mon combat. Ça ne veut pas dire qu’on n’a pas d’appréhension avant d’y aller. Les requins restent des prédateurs, des animaux sauvages. Mais toutes ces plongées m’ont confortée dans l’idée que ce sont des animaux extrêmement tolérants. On arrive dans leur milieu avec des nuisances olfactives et sonores. Pourtant, ils nous tolèrent », explique la jeune femme.

Des requins souvent massacrés

Depuis son retour, le quatuor s’est attelé à dérusher les 10.000 vidéos tournées au large du Costa Rica, des Bahamas et du Mexique. Sans donner de leçon, l’expédition s’attache à informer le grand public des dangers courus par ces grands prédateurs que la Terre se plaît à détester. Une population en déclin souvent victime d’un massacre simplement pour pêcher son aileron.

« Notre satisfaction, c’est de faire rêver les gens. On a pas mal d’écoles qui nous suivaient. Beaucoup d’enfants nous ont dit qu’on avait changé leur image des requins. C’est ça, notre cause », résume Jérôme. Sa petite équipe espère désormais qu’une saison 2 leur permettra d’aller voir le grand requin blanc rendu si populaire par le film Les dents de la mer. Un mythe à déconstruire.