VIDEO. Insight Mars: Une nouvelle mission spatiale pour soulever le capot de la planète Mars
ESPACE Cette nouvelle mission décolle le 5 mai avec l’ambition de poser un sismomètre à la surface de la planète rouge. L’enjeu ? Mesurer les tremblements de Mars pour en savoir un peu plus sur sa composition. Cocorico : ce sismomètre est en grande partie français…
- Si tout se passe bien, l’engin Insight quittera la Terre le 5 mai prochain. Direction mars où il devrait atterrir six mois plus tard avec pour mission de nous permettre de mieux comprendre la composition interne de la planète rouge, une grande inconnue à ce jour.
- L’atterrisseur embarque avec lui un sismomètre qui, pendant deux ans, mesurera les ondes sismiques que provoquent les mouvements du sol martien afin d’en visualiser l’intérieur et peut-être de comprendre pourquoi elle s’est éteinte.
- Insight est une mission de la Nasa mais la France est pleinement impliquée. Mieux, le CNES est le maître d’œuvre du sismomètre, l’instrument principal de la mission.
« Nous savons que Mars a une croûte, un manteau et un noyau dont nous avons de très fortes raisons de penser qu’il est liquide, décrit Philippe Logonné, responsable de l’équipe planétologie et sciences spatiales de l’ Institut physique du Globe de Paris (IPGP). Mais une fois qu’on a exprimé cela, on a à peu près tout dit de nos connaissances sur la structure interne de la planète Mars. »
Soulever le capot de la planète rouge
De quoi laisser sur sa faim. De quoi surtout donner la furieuse envie de soulever le capot de la planète rouge et de sonder ce qui se passe à l’intérieur. C’est tout l’objet de Insight Mars, nouvelle mission spatiale du programme Discovery de la Nasa, la seule prévue sur Mars en 2018. L’enjeu est de poser pour la première fois sur la planète rouge un sismomètre, un instrument de mesures des ondes sismiques que provoquent les mouvements du sol martien. Le tout pour étudier la structure et la composition interne de la planète.
Le lancement est prévu le 5 mai depuis la base de lancement de Vandenberg, en Californie pour une arrivée planifiée six mois et demi plus tard, vers novembre. Une fois l’atterrisseur Insight posé et les instruments déployés, la sonde spatiale devrait collecter des données durant deux ans.«Nous ne conaissons pas bien l'activité sismique sur mars, mais nous comptons mesure une cinquantaine de séismes par an, précise Philippe Logonné.Une vingtaine devraient être utilisables, en particulier les dix plus forts.»
Si l’agence spatiale américaine est aux manettes d’Insight Mars, la France est malgré tout de la partie. Mieux, le sismomètre appelé SEIS (Seismic experiment for interior structure)*, l’instrument principal de cette mission est français. L’IPGP en avait la responsabilité scientifique tandis que le Cnes (Centre national d’études spatiales) a assuré la maîtrise d’œuvre coordonnant les différents acteurs européens impliqués dans la construction de l’événement.
« Une cathédrale de technologie »
Pas une mince affaire. Francis Rocard, responsable du programme d’exploration du système solaire au Cnes, parle de trois décennies de recherche et de « la ténacité de Philippe Logonné pour mettre un sismomètre sur Mars ». Une saga ponctuée d’embûches et de multiples tentatives. Francis Rocard en évoque seize avant celle d’Insight Mars, en comptant celles de faire atterrir un sismomètre sur la Lune.
C’est que le défi technologique est immense comme pour tout instrument qu’on projette de faire fonctionner sur Mars. La construction du SEIS en est une nouvelle preuve. « C’est une cathédrale de technologies, assure Franck Poirier, le président de Sodern, la société val-de-marnaise qui a réalisé l'essentiel des pièces du sismomètre. Il est capable de détecter des déplacements de l’ordre du diamètre d’un atome d’hydrogène. Ses mécanismes sont hautement miniaturisés pour permettrequ’ils soient emmenés dans l’Espace. Plusieurs pièces de SEIS mesurent 68 nanomètres. C’est 1.000 fois plus petit que le diamètre d’un cheveu.. »
La sphère de titane, sous laquelle sera disposé le sismomètre, est l’autre prouesse scientifique d’Insight Mars. « Pour protéger les instruments des poussières martiennes, des températures extrêmes et de son atmosphère hostile, il fallait que cette sphère puisse enfermer le SEIS sous un vide réglé au centième de millibars », poursuit Franck Poirier.
Comprendre pourquoi Mars s’est éteinte
Mais le jeu en vaut la chandelle, promet Philippe Logonné. « Depuis 1889, la sismologie est parvenue à sonder peu à peu la composition de la Terre et en 1969, elle faisait ses débuts sur la Lune, précise-t-il. Nous en connaissons désormais l’intérieur. La taille des noyaux, la structure des manteaux, l’épaisseur de la croûte. Sur Terre, nous savons même voir des courants de convection qui nous permettent de mieux comprendre la tectonique des plaques et l’évolution de la Terre. »
Ces connaissances ne sont pas vaines. « S’intéresser à la structure interne des planètes, c’est aussi se demander pourquoi certaines sont habitables et d’autres non », reprend Philippe Logonné. C’est tout l’enjeu d’Insight Mars : écouter battre le cœur de Mars « pour comprendre comment elle s’est formée et pourquoi elle s’est éteinte, détaille le scientifique. Et même, en comparant avec les données que nous avons sur la structure interne de la Terre, comprendre pourquoi la nôtre abrite la vie. »
* Pour être précis, le SEIS est composé de trois sismomètres à large bande.