Manger 100% français à la cantine, c'est possible?

AGRICULTURE Les agriculteurs qui manifestaient ce mercredi à Paris appellent à favoriser l’achat de produits cultivés en France…

Audrey Chauvet
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Une cantine scolaire.
Une cantine scolaire. — "FRED SCHEIBER/20 MINUTES/SIPA"

Au menu de la cantine de Bercy ce mercredi midi: tomates du Maroc, pommes d’Italie et produits d’origine inconnue. Postés devant l’entrée des livraisons du ministère de l’Economie, les Jeunes agriculteurs ont passé au crible les fruits et légumes entrant dans l’antre du «Made in France» pour dénoncer les importations qui causent du tort aux agriculteurs français. Aux côtés de la FNSEA, ils appellent au «patriotisme alimentaire» en réclamant que deux plats sur trois soient cuisinés à partir de produits français dans les cantines publiques.

Plus proche mais plus cher

«On importe de la viande comme le mouton de Nouvelle-Zélande, des fruits comme les pommes du Chili, illustre Jean-Claude Bévillard, chargé des questions agricole chez France Nature Environnement (FNE), qui milite pour une relocalisation de l’alimentation. Il ne s’agit pas de mettre l’Europe en autarcie mais les importations de produits alimentaires devraient être orientées sur les produits tropicaux.» Pas de café ni de thé en France, il faudra donc se résoudre à importer ces produits, mais pour le reste, composer un menu 100% français serait possible: la France est riche en tomates, carottes, maïs, salades, haricots verts, oignons, choux-fleurs… Et les DOM permettent aussi de manger des bananes et des ananas français.

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«Les produits que l’on retrouve le plus souvent en restauration collective sont les frites, les haricots verts, les steaks hachés, les côtes de porc, les cuisses de poulet, les côtes d’agneau, les pommes, le raisin, l’emmental et la bûchette de chèvre, énumère Thomas Diemer, président du syndicat des Jeunes agriculteurs. On peut trouver tous ces produits en France, il n’y a pas de problème de quantité ni de diversité.» Les centrales d’achat préfèrent parfois des produits importés à cause des prix: en été, lorsque les vergers espagnols débordent de fruits, abricots, nectarines et pêches se retrouvent sur les étalages français à un prix deux à trois fois moins élevé que le prix du marché. «Il y a encore des distorsions au sein de l’Europe sur l’utilisation des pesticides et l’emploi de main-d’œuvre à bas coût qui permettent à l’Espagne où aux pays de l’Est d’avoir des coûts de production plus bas», analyse Jean-Claude Bévillard.

Des potagers autour des villes

Pour ne pas faire passer le porte-monnaie avant le patriotisme, «il faudrait que les cantines aient d’autres critères que le coût financier, estime Thomas Dieter. Par exemple, mettre en avant des critères de délai de réapprovisionnement, ajouter des critères d’AOP ou IGP pour certains produits et valoriser notre savoir-faire. Ou encore, pour les structures qui accueillent des enfants, favoriser l’aspect pédagogique en optant pour des exploitations que les enfants pourraient visiter». Pour Jean-Claude Bévillard, il faudrait aussi diversifier la production de chaque région, pour ne pas que les petits Bretons n’aient que du porc et du chou-fleur au menu: «La diversification améliorerait les circuits de proximité, notamment dans les zones périurbaines qui gagneraient à être cultivées.» Avec 6,2 milliards de repas servis par an, la restauration hors foyer pourrait être un levier majeur pour transformer les banlieues en potagers.