La ville est-elle polluée par la campagne?
PLANETE Et si le bon air pur de la campagne n'était qu'un mythe...
Zones piétonnes, éco-quartiers, désherbage manuel et ruches sur les toits: les villes seraient-elles devenues un havre écolo à faire pâlir d’envie les habitants des campagnes? Pire, les citadins pourraient-ils un jour accuser les ruraux de polluer leur air? C’est ce qu’Airparif, l’association de surveillance de la qualité de l’air en Ile-de-France, va tenter de savoir avec la campagne de mesure des pesticides présents dans l’atmosphère parisien lancée le 12 août et qui durera une année complète.
Le miel de ville, meilleur que le miel des champs?
Si une première étude réalisée en 2006 avait démontré la présence de pesticides dans l’air urbain, Airparif se garde bien de mettre la charrue avant les bœufs: «Il y a plusieurs usages des pesticides, rappelle Amélie Fritz, ingénieur chez Airparif. Les usages agricoles peuvent avoir un impact sur l’air urbain lorsque les produits sont transportés par le vent, mais il y a aussi des usages urbains pour les jardins particuliers par exemple.» Reste à savoir dans quelle proportion: sachant que 48% du territoire francilien est occupé par l’agriculture, que les jardins privés y sont d’une taille plus que modeste et que la mairie de Paris s’est engagée depuis 2001 dans une «gestion écologique» des espaces verts qui implique une baisse de l’utilisation de produits chimiques, les résultats pourraient ne pas plaire aux habitants des campagnes.
La ville est d’ailleurs devenue un refuge pour les abeilles, qui se payent maintenant le luxe d’habiter les beaux quartiers. Près de 350 ruches ont fleuri dans la capitale, des toits de l’Opéra de Paris à l’Assemblée nationale en passant par les tours de la Défense. Le miel de ville serait même meilleur que le miel des champs, assurent certains, justifiant cela par la diversité des fleurs à butiner dans les parcs, à opposer aux grandes exploitations agricoles en monoculture, et par l’absence de ces fameux pesticides qui sont accusés de provoquer une forte mortalité des insectes à la campagne.
Pots d’échappement contre bidons de pesticides
Attention toutefois, certains polluants pourraient bien remettre en question le mythe de l’abeille heureuse en ville. Quelques études commencent à être menées sur la concentration en hydrocarbures issus de la circulation automobile et de l’industrie dans les miels urbains et des scientifiques ont récemment alerté sur la pollution absorbée par les légumes des potagers urbains.
Car malgré les transports en commun, les centres-villes piétons et les vélos en libre-service, qui permettent aux habitants des pôles urbains d’émettre deux fois moins de CO2 que la moyenne des Français pour se rendre sur leur lieu de travail selon une étude de l’Insee parue en juin 2011, la concentration de véhicules et d’industries sur un espace réduit reste une source de pollution atmosphérique majeure qui se concrétise par des pics de pollution réguliers. Les résultats de l’étude d’Airparif, qui seront communiqués en août 2014, permettront de voir si les efforts écolos des villes ont porté leurs fruits ou si la pollution provient aussi d’outre-périphérique.