Les bars homos en péril

élodie Font
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   En 2007, la célèbre boîte de nuit Le Pulp met la clé sous la porte. En 2010, c'est au tour du Central. Et en 2012 ? Le Troisième lieu (4e), bar emblématique des nuits homosexuelles parisiennes, connaît des difficultés économiques et pourrait fermer ses portes aujourd'hui (lire ci-dessous). Trois lieux mythiques, représentatifs des difficultés auxquelles sont aujourd'hui confrontés les bars communautaires. 

 Se différencier pour exister
Josy en sait quelque chose. Elle a ouvert le plus vieux bar lesbien de Paris, La Champmeslé, en 1979, trois ans avant la dépénalisation de l'homosexualité. A deux pas de la rue Saint-Anne, elle a survécu, non sans mal, à trois ou quatre contrôles fiscaux et à plusieurs fermetures administratives. « Pour moi, la concurrence est trop forte. Deux bars lesbiens et deux boîtes de nuit, ce serait suffisant. » Seulement ? « La clientèle est difficile. Les lesbiennes ne sortent que lorsqu'elles sont célibataires et elles consomment très peu. Vous en voyez souvent, vous, des filles qui paient leur tournée ? »
  Si une poignée de bars homos ferment chaque année, quelques-uns renaissent de leurs cendres. En lieu et place d'un troquet liquidé en plein cœur du Marais, le Spyce est né en décembre 2010. « Rien que dans le quartier, on compte une bonne trentaine de bars gays », raconte Philippe Massière, le directeur artistique. « Pour exister, une seule solution : innover et arriver avec sa propre clientèle. » Autre contrainte, le voisinage, gêné par le nombre de bars au mètre carré. « Nous avons dû investir dans un matériel d'insonorisation très cher. Mais on ne le regrette pas. »
  Cécilia a décidé d'opter pour un pari moins risqué : organiser les soirées GLIT, uniquement féminines, une fois tous les deux mois. La prochaine se déroule ce samedi. « Je ne me retrouvais pas dans l'ambiance des bars lesbiens. Dans un sur deux, on s'ennuie, c'est glauque ! » Preuve, selon elle, que la demande est ailleurs : ses soirées font salle comble. « L'autre souci, c'est le manque d'entraide et de communication entre les tenanciers : parfois il y a plusieurs soirées le même jour, et rien le reste du mois. Dommage ». 

L'ancien Pulp est toujours vide

Le Pulp, c'est l'ex-plus gros QG de filles de la capitale. Le club a fermé ses portes en 2007, au grand dam des lesbiennes parisiennes. Le Pulp était réputé pour ses soirées électro et pour ses DJ, de Jennifer Cardini à Scratch Massive. A l'origine de la fermeture, pas de contrôle fiscal, mais le rachat de l'immeuble par un propriétaire qui ne souhaitait pas garder une boîte de nuit dans son sous-sol. Avec Le Pulp, le dancing L'Entracte avait également mis la clé sous la porte. A l'époque, les filles s'étaient tournées vers Le Troisième lieu.