Seine-et-Marne : Mobilisation contre les « expulsions illégales » devant le centre de rétention administratif

Droit des immigrés Les équipes de la Cimade s’étaient retirées du centre au début du mois d’avril

Romarik Le Dourneuf
Les membres de la Cimade devant le Centre de rétention administratif du Mesnil-Amelot, Le 2 mars 2023
Les membres de la Cimade devant le Centre de rétention administratif du Mesnil-Amelot, Le 2 mars 2023 — Valentina Pacheco
  • L’association d’aide aux personnes réfugiées et immigrées a organisé une mobilisation ce jeudi devant le centre de rétention administratif du Mesnil-Amelot.
  • Elle dénonce l’augmentation des expulsions illégales depuis le début de l’année dans le plus grand centre de rétention de France.
  • Elle demande au gouvernement de rappeler la loi et les droits des personnes à la préfecture et à la direction du centre.

Journée de mobilisation au Mesnil-Amelot. Ce jeudi, des dizaines de personnes ont manifesté devant le Centre de rétention administratif (CRA) de cette commune de Seine-et-Marne à l’appel de la Cimade, l’association d’aide aux réfugiés et migrants.

Une mobilisation qui fait suite au retrait de ses équipes, décidé le 2 février dernier du plus grand CRA de France. « C’est une réaction aux trop nombreuses violations manifestes des droits des personnes », explique à 20 Minutes, Louise Lecaudey, responsable régionale de la Cimade au CRA du Mesnil Amelot.

« Une augmentation effrénée des expulsions illégales »

Initialement présente dans le centre pour apporter une aide juridique aux personnes détenues, l’association veut pointer du doigt les dysfonctionnements de l’administration qui pénalise les immigrés du CRA. « Il y a une augmentation effrénée des expulsions illégales. Déjà huit personnes ont été expulsées depuis le début de l’année, alors même que des recours ont été déposés. »

En effet, les immigrés ne peuvent légalement faire l’objet d’une expulsion si elles ont demandé l’asile ou ont formulé un recours de plein droit suspensif devant la juridiction administrative. Or, selon la Cimade, en plus des cas précédemment cités, d’autres, notamment « protégées par la loi contre le prononcé d’une mesure d’éloignement en raison de leurs attaches familiales » sont concernées par ces mesures d’expulsion.

L’association dénonce également les tentatives d’expulsion vers des pays à risque, le placement en rétention de victimes de violences conjugales et de personnes en situation régulières.

Une gestion des personnes nécessitant des soins problématique

À cela s’ajoute la gestion des personnes présentant des problèmes de santé, notamment psychiatriques, de plus en plus nombreuses à être enfermées dans le CRA. « Beaucoup nécessitent des soins, surtout les personnes qui présentent des troubles psychiatriques et représentent un danger pour elles-mêmes et pour les autres. Elles devraient être hospitalisées plutôt qu’enfermées », ajoute Louise Lecaudey qui cite également des cas de personnes présentant des troubles du discernement qui les empêchent de faire valoir leurs droits.

« Une femme de 58 ans a été mise à l’isolement pendant près d’un mois alors qu’elle était incapable de s’alimenter, dans des conditions qui portent atteinte à sa dignité. Elle s’urinait et se déféquait dessus. Or elle n’a reçu aucun soin. Ce sont ses codétenus qui ont dû la laver. »

Un isolement dont l’administration abuse selon la Cimade, usant de prétextes tels que « troubles à l’ordre public » pour de simples signalements ou gardes à vue, souvent « injustifiées, du simple fait de leur situation ».

Obsession des chiffres et projet de loi

« Le CRA est devenu une zone de non-droit. La préfecture fait ce qu’elle veut, au mépris du droit et de ses devoirs, vitupère la responsable de la Cimade, le gouvernement et le ministère a une obsession des chiffres qui fait se multiplier les OQTF (Obligations de quitter le territoire français - NDLR). »



Ainsi l’association appelle le gouvernement à « rappeler à la préfecture et à la direction du CRA » la loi et les droits des personnes détenues. Une mobilisation qui fait écho à l’annonce par Gérald Darmanin, qui s’est déclaré « favorable » à des amendements qui permettraient de le limiter le regroupement familial dans son projet de loi asile et immigration.

Contactés par 20 Minutes, le ministère de l’Intérieur et la Préfecture n’ont pour le moment pas répondu à nos sollicitations.