Paris : Mathias Malzieu, réalisateur, écrivain, chanteur… et bête de Seine
LE NOUVEAU COURS DE LA SEINE Touche-à-tout, Mathias Malzieu est réalisateur, écrivain, chanteur du groupe de rock Dionysos et… amoureux de la Seine
- Mathias Malzieu vient de sortir Le Dérèglement joyeux de la métrique amoureuse, un recueil de poèmes illustrés par Daria Nelson (éditions de l’Iconoclaste).
- Ce mordu de la Seine s’apprête à acheter une péniche sur le fleuve mythique.
« Plus tu t’approches de la Seine, plus le taux de poésie augmente. » Parisiens, attention ! Si vous croisez la nuit un crooner avec une crinière d’écureuil en vélo électrique, il pourrait bien s’agir de Mathias Malzieu. Le réalisateur, écrivain et chanteur du groupe de rock français Dionysos adore déambuler près des quais. C’est d’ailleurs dans un café de l’île Saint-Louis autour d’un plat de spaghettis que l’on a discuté de poésie, de ses plus belles cuites britanniques et de Michel Platini. De la Seine, un peu aussi.
« C’est le sel de Paris. Le soir, quand je rentre chez moi en skate ou à vélo, je vois les reflets de la ville dans l’eau. Je trouve ça merveilleux », s’amuse-t-il, avec sa barbe rousse et son pull renard. Il y a un an pile, Mathias Malzieu finissait le tournage de son film Une Sirène à Paris, sur le quai d’Orléans, situé juste derrière nous. « La Seine, c’est les ponts : entre la rive droite et la rive gauche, entre l’enfance et l’âge adulte, entre l’imaginaire et le réel… C’est tout ce que j’aime, les ponts ! »
Amoureux de Paname
Mathias Malzieu est un homme poétique. Il aime se jeter dans la foule en concert comme si c’était la dernière fois. Et « raconter des histoires ». Tout le temps. « C’était un enfant très contrasté. Il vivait les choses de manière extrême, comme des montagnes russes. Il pouvait être très triste ou très heureux, explique Lisa, sa sœur. Tout petit déjà, c’était un sorcier. Il transformait l’ordinaire en extraordinaire. Il écrivait en tordant le cou au réel. Il avait une curiosité incroyable. Aujourd’hui encore, il a gardé cette saveur de l’enfance. »
Originaire de la Drôme, où il a pété ses premières guitares et débuté le groupe Dionysos, il monte ensuite à Paris. Son lien avec la capitale se noue ensuite après sa greffe de moelle osseuse et les attentats, qui l’ont profondément marqué. « J’ai passé deux ans avec des gens qui se battaient pour me sauver la vie avec des cellules-souches, du sang de cordon conservé dans de l’azote liquide, et tout. Et là, il y a des mecs qui arrivent avec des flingues et qui tirent sur Cabu, quoi ! C’était comme un bug émotionnel. » Et surtout, cette crue «magique» pendant l’Euro 2016, où les platanes avaient les pieds dans l’eau. Un Paris très cinématographique pour ce noctambule à roulettes. « J’avais l’impression de vivre dans Ponyo de Miyazaki. Il y avait des canards au milieu de la route qui grillaient des sens interdits. C’était d’une poésie folle. »
Bienvenue au « Flower Burger »
Tellement mordu de la Seine, qu’avec Daria, son amoureuse, il s’apprête à acheter une péniche, qu’ils vont appeler le « Flower Burger », du nom du bateau-bistrot installé sur les quais dans son film Une Sirène à Paris. « J’avais peur de l’humidité dans une péniche, mais je me suis laissée guider », lance la photographe de 27 ans, qui nous rejoint pour un thé. Mathias Malzieu envisage même d’acheter un paddle gonflable géant pour huit personnes et de passer le permis bateau pour prendre l’apéro sur le fleuve avec ses copains. En dessous de la Tour Eiffel illuminée, son ami Cali ne sera pas le dernier à trinquer : « Je ne suis pas du tout étonné. Il m’aurait dit qu’il allait acheter un château en Écosse ou construire une fusée pour aller sur la Lune, j’y aurais cru. C’est quelqu’un de magique », confie le chanteur.
Mathias Malzieu a gardé son âme de Peter Pan. Le voilà enfin propriétaire du vaisseau du Capitaine Crochet, le rêve d’une vie. Toutes ses économies vont y passer. « Je signe dans quelques jours. Il y a deux mois de travaux, mais j’espère y entrer au printemps. À l’intérieur, je vais faire une salle de ciné avec un projecteur et des fauteuils. » De son appartelier de 35 mètres carrés, il va désormais vivre dans le « 21e arrondissement », qui désigne tous ceux qui vivent sur l’eau à Paris : « C’est comme une cachette. Je suis à 10-15 minutes de la Tour Eiffel et j’ai l’impression d’être dans le Bayou. Ça m’excite à fond. »
Métamorphose en bord de Seine
« Il nous a même dit que l’on aurait un endroit pour répéter avec le groupe. Cette péniche, il l’a achetée autant pour lui que pour Daria, sourit Babet, la violoniste de Dionysos. Elle est arrivée comme une surprise, comme une fée. » Ces deux-là se sont rencontrés il y a un an aux Deux Magots, le bar préféré de Boris Vian, lors de l’anniversaire du centenaire de son idole à Saint-Germain-des-Prés. Au bord de la Seine, ils se sont échangés l’un de leurs premiers baisers. De cette union est né Le Dérèglement joyeux de la métrique amoureuse, un recueil de poèmes illustrés par des collages photos de Daria. L’histoire vraie d’un coup de foudre entre une fée à l’accent russe et « un apprenti-poète qui fait la vaisselle ». Le tout pimenté par les textes courts érotico-comiques du leader de Dionysos. Les deux amoureux ont même enregistré une chanson, intitulée Morning Song sur leur vie commune.
« Mathias vit ce qu’il écrit. C’est une évidence que ce qu’il va vivre sur le "Flower Burger" va l’inspirer pour de nouvelles créations », assurent Cali et Babet. Le chanteur de Dionysos prépare d’ailleurs deux nouveaux livres. Avec la même veine de conteur-rockeur.
20 secondes de contexte
La série « Le nouveau cours de la Seine » a été réalisée par une promotion de neuf étudiants en alternance de l’école de journalisme de Paris ESJ-Pro, sous la direction de leurs formateurs et de l’équipe de 20 Minutes. Les sujets brossent la relation changeante entre Paris et son fleuve, dont l’image est bouleversée par l’amélioration constante de la qualité de l’eau.