Coronavirus: Mic-mac autour de l’annulation des loyers HLM à Bobigny
LOYER A la mi-avril, la mairie annonçait que les loyers de 4.000 familles vivant dans des HLM allaient être annulés. Une mesure impossible à réaliser selon l’organisme public
- Il y a une semaine, la mairie de Bobigny annonçait que le loyer d'avril de 4.000 familles vivant en HLM serait annulé. L'office public affirme de son côté que cette mesure est impossible à réaliser.
- La mairie a néanmoins demandé la tenue d'un conseil d'administration extraordinaire sur la question.
Pour les quelque 4.000 familles concernées, la missive qu’elles s’apprêtent à recevoir fera assurément l’effet d’un coup de massue. Alors que le 16 avril, la mairie (UDI) de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, annonçait la suppression pure et simple des loyers du mois d’avril pour les locataires vivant dans ses HLM, l’office public de l’habitat (OPH) a rédigé un courrier à l’attention de ces familles pour leur indiquer qu’une telle mesure était impossible à mettre en œuvre. Mais la municipalité persiste dans son projet. Retour sur cet imbroglio.
Une mesure inédite
Le 16 avril, alors que les inquiétudes grandissent sur les conséquences économiques du coronavirus pour les familles les plus précaires – notamment en Seine-Saint-Denis, le département le plus pauvre de France – la mairie de Bobigny annonce avoir pris la décision d’ annuler « l’ensemble des loyers du mois d’avril » pour les locataires de l’office HLM. Soit près de 4.000 familles. « Une part conséquente de la population balbynienne est composée de bénéficiaires de minima sociaux, de personnes sans-emploi ou de précaires tirant leurs revenus de "petits boulots". Le Covid 19 et le confinement ont donc eu des effets conséquents sur l’équilibre économique de nombreuses familles », indique le communiqué.
La mesure est inédite : si d’autres bailleurs sociaux ont pris les devants pour venir en aide aux plus démunis, la plupart procèdent au cas par cas. L’office public Seine-Saint-Denis Habitat a, par exemple, mis en place une « cellule sociale » destinée à aider les ménages en difficulté en rééchelonnant ou reportant les paiements des loyers pour les plus démunis.
Qui va payer ?
Dans son communiqué, la mairie explique avoir « travaillé avec l’office public de l’habitat de Bobigny » sur ce projet et s’engage à prendre à sa charge « 50 % » du manque à gagner, soit 800.000 euros. Le reste incombera donc à l’OPH dont la « dette de près de 15 millions d’euros laissée par l’ancienne équipe municipale est aujourd’hui résorbée », précise la mairie. Si la mesure nécessite d’être votée par le conseil municipal et le conseil d’administration de l’office HLM, ces étapes semblent être de telles formalités que le conditionnel n’est jamais employé.
Le bailleur social n’est pourtant plus sous la tutelle de la mairie depuis le 1er janvier 2019. « Cette annonce, qui est du ressort du seul conseil d’administration de l’OPH et non de la ville comme elle l’a précisé, n’a actuellement pas de base juridique et fragiliserait la structure financière de l’OPH », affirme de son côté, Jonathan Berrebi, président de l’OPH dans le courrier daté du 29 avril adressé à ses locataires. Le bailleur, qui se dit en « plein redressement », estime que « les équilibres financiers précaires » ne permettent pas l’exonération des loyers. L’organisme rappelle néanmoins que des mesures individuelles peuvent être mises en place.
Bras de fer
La tension est montée d’un cran ce jeudi après-midi avec la réponse cinglante de la mairie qui a réaffirmé ses intentions. « Cette exonération sera bien présentée en conseil d’administration de l’OPH, seul organe capable de prendre une telle décision. Il ne s’agit donc absolument pas d’un effet d’annonce », indique le communiqué. Mardi, dix administrateurs du conseil d’administration, parmi lesquels le maire sortant de Bobigny, Stéphane de Paoli et le candidat de la majorité, Christian Bartholomé (arrivé en deuxième position lors du premier tour des élections municipales en mars), ont réclamé la tenue de ce conseil extraordinaire portant exclusivement sur cette question.
Sur le fond, la position avancée par la mairie n’a pas changé : la municipalité affirme que la subvention de 800.000 euros au bénéfice de l’office HLM sera votée au mois de juin et enjoint l’OPH à prendre à son compte la même somme compte tenu des « économies réalisables ». Un véritable bras de fer auquel assistent impuissant les locataires.