Incinérateur de Vaux-le-Pénil: Les victimes de la dioxine obtiendront-elles gain de cause?
JUSTICE L'agglomération de Melun Val-de-Seine était poursuivie pour mise en danger de la vie d'autrui...
Quatorze ans d’instruction, 165 plaignants et une montagne qui accouche d’une souris ? Ce mardi, la 31e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris doit rendre son jugement dans l’affaire dite de l’incinérateur de Vaux-le-Pénil, en Seine-et-Marne, qui oppose l’agglomération de Melun à des riverains.
Créé en 1974, cet incinérateur d’ordures ménagères a, pendant près de trente ans, recraché au-dessus des jardins et des toits qui se trouvaient sous les vents dominants de l’installation des fumées dont les taux de dioxine (un polluant organique très toxique), étaient plus de 2.200 fois supérieurs à la norme. Impossible à moderniser, le site avait fermé en juin 2002.
Une dizaine de riverains morts du cancer, selon les parties civiles
Mais, pour les victimes et la mairie de Maincy, qui se sont constituées parties civiles, le mal était déjà fait : des contaminations humaines se sont faites par le biais de l’alimentation (lait, œufs…). Selon elles, une dizaine de riverains sont morts de cancers ces dernières années, notamment de « lymphomes non hodgkiniens », qui se développent à partir de cellules du système lymphatique. Une dizaine d’autres en souffrent aujourd’hui.
Lors du procès, en novembre et décembre, la communauté d’agglomération de Melun Val-de-Seine, propriétaire-exploitant de l’incinérateur, avait comparu pour mise en danger de la vie d’autrui entre 1999 - date d’un premier arrêté préfectoral - et 2002, ainsi que pour poursuite d’une installation classée non conforme.
Toutefois, au dernier jour d’audience, la procureure de la République avait laissé au tribunal le soin de se prononcer sur le délit central du dossier, la mise en danger, estimant qu’un risque « tangible de cancer » lié aux dioxines n’était pas caractérisé dans ce dossier.
S’appuyant sur une étude menée en 2006 par l’Institut national de veille sanitaire (InVS) et l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, elle avait expliqué, rappelle Le Monde, que les dioxines sont un cancérogène « assorti d’un effet de seuil ». Et que même les plaignants ayant largement consommé des produits soumis aux effets du panache de l’incinérateur « ne présentent pas de taux d’imprégnation correspondant à des niveaux susceptibles d’entraîner des effets sanitaires ».
Une peine d’amende pour poursuite d’installation non conforme
La magistrate avait alors requis une peine de 100.000 euros d’amende, pour moitié avec sursis, pour poursuite d’une installation classée non conforme, la préfecture ayant en vain mis en demeure l’exploitant de mettre aux normes l’incinérateur avant mars 2002. Anticipant la déception des parties civiles, la procureure s’était dite « pleinement consciente du décalage » entre sa parole et leur « ressenti douloureux ».
En l’absence d’un lien de causalité formel établi entre dioxines et cancers, l’agglomération n’a pas été poursuivie pour homicides ou blessures involontaires. Sa défense avait demandé la relaxe, affirmant qu’elle n’était pas pénalement responsable. Elle avait aussi fustigé les 11 millions d’euros réclamés par les parties civiles, estimant que « la mort et la maladie » n’étaient pas le « sujet » du procès.