«Dans les transports en commun, le problème, ce sont les agresseurs, les harceleurs, les frotteurs», estime Valérie Pécresse

INFO «20 MINUTES» La présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, dévoile ce lundi pour «20 Minutes» sa campagne de lutte contre le harcèlement sexuel dans les transports...

Propos recueillis par Romain Lescurieux
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La présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, lance le 5 mars sa campagne de lutte contre le harcèlement sexuel dans les transports en commun.
La présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, lance le 5 mars sa campagne de lutte contre le harcèlement sexuel dans les transports en commun. — NICOLAS MESSYASZ/SIPA
  • Selon une étude publiée en décembre, au moins 267.000 personnes, « essentiellement des femmes », ont été victimes d’atteintes sexuelles en 2014 et 2015 dans les transports en commun.
  • « Ne minimisons jamais le harcèlement sexuel. Victimes ou témoins, donnez l’alerte », est le slogan qui va être affiché dans les transports en commun franciliens.
  • « Si on veut arrêter tous les harceleurs, il faut aussi porter plainte », lance Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France.

La présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, lance ce lundi sa campagne de lutte contre le harcèlement sexuel dans les transports en commun. Promise depuis plusieurs mois, cette campagne vise à « sensibiliser chacun au harcèlement dont sont victimes trop de voyageurs, et en particulier les femmes, dans les transports franciliens en rappelant les bons réflexes à adopter et les mesures concrètes mises en place en réponse à ces violences », note la Région.

Selon une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, publiée en décembre, au moins 267.000 personnes, « essentiellement des femmes », ont été victimes d’atteintes sexuelles en 2014 et 2015 dans les transports en commun, une estimation que l'observatoire qualifiait de « basse ». « Il y a urgence », affirme Valérie Pécresse qui dévoile en exclusivité pour 20 Minutes, son plan d’action.


Vous lancez ce lundi une campagne de lutte contre le harcèlement sexuel dans les transports en commun. En quoi consiste-t-elle ?

Le sujet de la sécurité des femmes dans les transports me tient à cœur, depuis longtemps. Et désormais, il y a urgence. Nous avons décidé d’agir de manière commune, il y a plus d’un an, avec la région, Île-de-France Mobilités, en emmenant avec nous la RATP et la SNCF pour lancer du 5 au 27 mars, une campagne choc – avec des affiches, des dépliants, des visuels, des stickers – afin de toucher les victimes et les témoins qui trop souvent se taisent. Avec ce slogan : « Ne minimisons jamais le harcèlement sexuel. Victimes ou témoins, donnez l’alerte ». L’idée c’est de pousser à agir, car il y a actuellement une sous-déclaration. Hommes et femmes doivent tous se sentir concernés.

Quels outils mettez-vous à disposition des usagers pour agir ?

L’application smartphone « Alerte 3117 ». Elle permet de signaler des actes de délinquance 24 h/24, 7 jours/7 et de manière assez discrète. C’est le même service que le numéro d’urgence 3117 ou via le SMS au 31177, géré depuis huit ans par les centres d’appels traitant des problématiques de sûreté, d’assistance et de secours dans les transports, que ce soit métro, bus, RER, TER. Mais l’application est plus complète car elle permet d’être directement géolocalisé et peut permettre une intervention des forces de sécurité à la station suivante.

Sur les 47.000 appels et SMS reçus en 2017 par les centres d’appels d’urgence dans les transports franciliens, 180 concernaient des cas d’agressions et de harcèlements sexuels, selon les opérateurs. Ce numéro est donc encore peu utilisé ?

Le 3117 doit rentrer dans les mœurs et les habitudes. Les appels augmentent d’année en année mais ceux concernant des cas d’agressions et de harcèlements sexuels sont encore faibles. Ce qui prouve surtout que les femmes ne dénoncent pas. Elles sont résignées à subir frotteurs et injures et ne le signalent pas. Pourtant, si on veut arrêter tous les harceleurs, il faut aussi porter plainte. Mais c’est ma faute aussi. Plus jeune, ça m’est arrivé et je ne l’ai pas fait non plus.

Vous évoquiez récemment que sur cette application il y aurait « un bouton harcèlement, spécifique pour les femmes ». C’est toujours d’actualité ?

Je l’ai demandé. Ce sera effectif courant mars. Pour le moment, sur l’application, les cas de harcèlement sexuel se déclarent via le bouton insécurité. Mais j’aimerais que ce soit un bouton spécifique.

Allez vous recruter davantage dans ces centres d’appels mais aussi directement sur le réseau de transports franciliens ?

La présence humaine est indispensable. Ile-de-France Mobilités a donné à la RATP, à la SNCF et pour le réseau de bus, les moyens de recruter 650 agents de sécurité supplémentaire pour 2018-2019. Ce personnel pourra également exercer en civil et armé.

Et qu’en est-il de la vidéoprotection ?

Le métro est très maillé en vidéoprotection. Les trains et les gares commencent aussi à l’être. Les wagons sont vidéoprotégés au fur et à mesure. Certaines lignes sont équipées à 100 % et nous continuons de déployer des caméras sur d’autres. D’ici à 2021, elles le seront toutes. Comme les gares routières ou encore les bus. C’est important car la vidéoprotection, c’est dissuasif.

Toujours sur la sécurité dans les transports, où en est Ile-de-France Mobilités concernant l’arrêt à la demande pour les passagers des bus ?

Nous lançons l’expérimentation ce lundi sur une dizaine de lignes d’Ile-de-France, la nuit, pour que les femmes qui rentrent chez elles, puissent se faire déposer au plus près de leur domicile. Les hommes aussi pourront le demander. Nous évaluerons cette expérimentation et si ça fonctionne, nous la généraliserons à tout le réseau de bus de nuit.

L’été dernier, le « manspreading » (manie masculine qui consiste à écarter les cuisses dans les transports en commun) était pointé du doigt. « Nous n’avons pas eu de remontées de terrain de la part d’opérateurs, RATP et SNCF, ni de la part d’associations d’usagers », indiquait votre entourage à 20 Minutes. Aujourd’hui, allez-vous vous attaquer à cette pratique ?

Nous avons demandé une enquête sur cette question. Mais à ce stade, ce phénomène n’est pas le plus prioritaire pour les femmes en Ile-de-France. Aujourd’hui, le problème ce sont les agresseurs, les harceleurs, les frotteurs. Et nous sommes en l’an 1 de cette lutte pour dénoncer l’ensemble de ces actes.