«Au feu, la pénit’ brûle»: Pourquoi les surveillants pénitentiaires de Fleury-Mérogis sont-ils en colère?

PRISON Quelque 350 agents pénitentiaires ont bloqué lundi soir les portes de la prison de Fleury-Mérogis, dans l’Essonne…

C.Po.
Des surveillants pénitentiaires bloquent la prison de Fleury-Mérogis, le 10 avril 2017.
Des surveillants pénitentiaires bloquent la prison de Fleury-Mérogis, le 10 avril 2017. — AFP

« Au feu, la pénit’brûle. » « Surpopulation, sous-effectifs, danger ! » Ils étaient quelque 350 surveillants pénitentiaires à bloquer, lundi soir, les portes de la prison de Fleury-Mérogis, dans l’Essonne. Les barricades se sont formées vers 19h30, sur l’unique route qui mène au centre pénitentiaire. Les trois syndicats, solidaires dans cette action, avaient mis en garde leur direction : les extractions, permissions de sortie, admissions seraient bloquées le temps de la manifestation. Quelques palettes de bois et des pneus ont été brûlés. Tous réclament une fouille générale de la prison et des effectifs supplémentaires. Une marche était prévue cet après-midi dans la ville. Le point sur le conflit.

Une bagarre dans le quartier des mineurs…

A l’origine de ce mouvement, l’agression jeudi en milieu de journée de six surveillants dans le quartier des mineurs. Hématomes, fracture du bras, ligaments déchirés, entorse du coude… Le bilan est particulièrement lourd. Les fonctionnaires tentaient de séparer deux adolescents qui se battaient dans les coursives de la maison d’arrêt lorsque six autres mineurs détenus se sont jetés dans la mêlée. Les six surveillants ont été conduits aux urgences.

Si une enquête a été lancée pour faire la lumière sur cette rixe, il pourrait s’agir d’une bagarre entre deux bandes rivales. Sept des huit adolescents impliqués ont été placés dans le quartier disciplinaire, a indiqué l’administration pénitentiaire. Le dernier, âgé de moins de 16 ans, était trop jeune pour y être envoyé.

La surpopulation en question

Si cette bagarre a constitué le point de départ de la grogne des fonctionnaires, leur colère tire ses ancrages de dysfonctionnements plus profonds. « Cette agression, c’est la goutte d’eau de trop », estime Olivier Legentil, du syndicat Ufap-Unsa, jugeant la situation « intenable ». La maison d’arrêt, la plus grande d’Europe, est actuellement remplie à 180 % de sa capacité. Une soixantaine de détenus, sur les 4200, dorment sur un matelas posé à même le sol. Une surpopulation carcérale qui s’accompagne d’un manque de personnel : les trois syndicats estiment à quelque 150 le nombre de postes vacants.

La directrice de l’établissement avait elle-même fait part de ses inquiétudes en juillet dernier dans une missive adressée à sa hiérarchie. « Les quartiers arrivants sont saturés et il devient très difficile d’affecter les personnes détenues en tenant compte des profils, vulnérables, récidivistes, etc. » Elle décrivait un personnel épuisé, de plus en plus accaparé par des questions de logistique, moins présents pour les détenus.

Difficulté et spécificité quartiers des mineurs

Néanmoins, le quartier des mineurs jouit d’un statut un peu à part. Au 1er mars, il comptait 87 détenus… pour 94 places. Les jeunes incarcérés – âgés de 13 à 18 ans - jouissent donc d’un encellulement individuel.

Néanmoins, selon les surveillants pénitentiaires, la gestion des détenus est tout aussi difficile dans cette aile. « La violence est permanente dans le quartier des mineurs. Les ados vont systématiquement au conflit », assurait au lendemain de la bagarre, Thibault Cappelle, secrétaire FO de la prison. Même son de cloche chez son homologue de la CGT, Arnaud Arame. « La principale difficulté dans ce secteur vient du fait que les mineurs, prévenus et condamnés, petits délinquants et meurtriers, sont mélangés. Structurellement, on ne peut les différencier. » Un point de vue nuancé par l'administration pénitentiaire qui rappelait que la dernière bagarre d'ampleur dans le quartier des mineurs remontait à 2014.