Menton : Accusations de vol de documents, de diffamation, démissions contestées… Mais que se passe-t-il à la mairie ?

POLITIQUE Après son élection à 18 voix contre 17 pour succéder à Jean-Claude Guibal, le maire Yves Juhel ne reconnaît pas des démissions qui pourraient entraîner un nouveau scrutin

Fabien Binacchi
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Yves Juhel dans son bureau de maire
Yves Juhel dans son bureau de maire — Ville de Menton
  • A la suite du décès de Jean-Claude Guibal, de nouvelles élections ont eu lieu au sein de la mairie de Menton.
  • Yves Juhel, l’ex-deuxième adjoint au maire, a été élu maire à 18 voix contre 17 le 9 novembre mais selon l’autre candidate à la succession de l’ancien député, Sandra Paire, la grande majorité des élus auraient démissionné.
  • 20 Minutes fait le point sur cette situation floue au sein de la maire mentonnaise.

« Je ne comprends pas. Cela fait 40 ans que je fais de la politique. D’abord à Paris, puis depuis vingt ans sur la Côte d’Azur et je ne pensais vraiment pas pouvoir voir ça ». Depuis qu’Yves Juhel, l’ex-deuxième adjoint de Menton, a été élu maire à 18 voix contre 17, le 9 novembre à la suite du décès de Jean-Claude Guibal, la situation est explosive. Selon Sandra Paire, l’autre candidate à la succession de l’ancien député, la grande majorité des élus aurait démissionné, ouvrant la voie à un nouvel appel aux urnes des Mentonnais. Yves Juhel assure de son côté n’avoir enregistré qu’un seul courrier recevable.

Pire, le maire LR a déposé plainte pour vols de documents. Selon lui, des bureaux auraient été entièrement vidés selon des « méthodes de voyou » : « Le lundi soir, il y avait des dossiers partout et mardi en début d’après-midi, juste après mon élection, tout avait disparu ». L’édile a même commandé un audit de tout le système informatique « pour sécuriser les seules données qui restent », assure-t-il à 20 Minutes. Dans une « lettre ouverte » publiée lundi, il dénonce ces « agissements rendant impossible la continuité du service public » et met en cause « chaque élu » qui « sera responsable aux yeux de la population de cet état de fait ». Sandra Paire, elle, annonce également avoir déposé une plainte « pour des propos diffamatoires ».

Une seule voix de plus avec les six voix de l’opposition

« Rien n’a disparu puisque tous les dossiers sont informatisés », explique-t-elle à 20 Minutes. Mardi après-midi, l’ancienne première adjointe de Jean-Claude Guibal a également demandé au nouveau maire « de transmettre au préfet les vingt et une démissions qu’il a reçues sous 24 heures ». Sans quoi, elle saisira les services de l’Etat.

D’après Sandra Paire, il y a donc eu depuis le vote vingt et une démissions sur les 35 membres que compte le conseil municipal, car le nouveau maire aurait été… mal élu. Elle appuie ainsi sur le fait qu’Yves Juhel n’a obtenu qu’une voix de plus qu’elle en bénéficiant des six votes du groupe d’opposition « Menton demain ». « C’est difficile, parmi les élus de la majorité, de se dire qu’on va devoir continuer à travailler dans ces conditions-là », argumente l’élue LR, également conseillère régionale.

Sauf qu’Yves Juhel assure n’avoir reçu qu’une seule lettre de démission « de manière légale et officielle » qu’il « transmettra au préfet [ce mercredi matin] ». Pour les autres défections annoncées par Sandra Paire, le nouveau maire reste flou. Et indique qu’il va rencontrer le chef de cabinet du préfet pour suivre la situation. Il pourrait s’appuyer sur les textes qui prévoient que « la lettre de démission doit être rédigée en termes non équivoques et ne pas avoir été signée sous la contrainte ». Pour l’instant, sur la page consacrée au conseil municipal sur le site de la ville, seuls dix-huit élus sont mentionnés. « Ce sont uniquement ceux qui sont restés le jour de l’élection. Une mise à jour sera faite dès que la situation sera clarifiée », indique une porte-parole de la municipalité ;

Encore huit membres non encore élus sur la liste de Jean-Claude Guibal

Sollicitée, la préfecture confirmait mardi n’avoir encore reçu aucune démission. Et rappelle la marche à suivre : « Le maire doit transmettre immédiatement une copie intégrale des lettres de démission en application des dispositions du Code général des collectivités territoriales. Si plus d’un tiers des sièges est vacant, il sera nécessaire d’organiser une élection partielle intégrale », « dans les trois mois ». Avec une précision : « L’ensemble des vacances seront constatées lorsqu’il ne sera plus possible de faire appel à un suivant de liste sur [celle] que menait M. Guibal ». Elle compte encore huit personnes qui peuvent intégrer le conseil municipal en cas de démissions.

Les services de l’Etat suivent la situation de près. Parallèlement, la justice a bien été saisie. Le procureur de la République de Nice confirme à 20 Minutes le dépôt de plainte du maire de Menton pour vol de documents. Et indique qu’elle est « à l’étude ».