Montpellier : A l’heure du e-commerce, elle reprend une librairie de droit vieille d’un siècle
LIVRES Les futurs juristes et les avocats s’y rendent pour acheter leurs Codes et leurs manuels
- Bérénice Weil, une ancienne étudiante de la faculté de droit de Montpellier, a repris les rênes de la Librairie juridique des étudiants, une véritable institution.
- Cette boutique, où l’on vend des livres depuis près d’un siècle, a été transformée en librairie de droit depuis les années 1980, par la précédente propriétaire.
- Un défi, à l’heure d’Amazon ? Les manuels de droit, « on veut les voir avant, on veut les feuilleter » avant de les acheter, assure Bérénice Weil.
Rue de l’Université, à Montpellier (Hérault), la Librairie juridique des étudiants est une véritable institution. Cette petite boutique, où l’on vend des livres depuis bientôt un siècle, s’est spécialisée dans le droit et les sciences politiques dans les années 1980. Depuis, les futurs juristes, formés à deux pas d’ici, à la faculté, et les avocats du coin, s’y pressent pour acheter leurs Codes et leurs manuels. Mais si le temps semble s’être arrêté dans cette librairie, quelque chose a changé depuis peu : la propriétaire.
Bérénice Weil, une ancienne étudiante de l’université de droit, a repris les rênes de la boutique. Et c’est, un peu, grâce au Covid-19. Diplômée en Master 2 Droit de l’environnement en 2014, elle a usé ses Codes dans un consulat au Mexique, à la Cour d’appel de Guyane, dans une mairie, puis dans une start-up de la Legal tech. Puis, « pour le plaisir, mais aussi pour le travail », la jeune femme s’est lancée dans le tourisme, en tant que travel planner (organisatrice de voyages). Quand la pandémie a éclaté, « ça a tout arrêté. Puis les réglementations changeaient tout le temps, ce n’était pas agréable, ni pour nous, ni pour les clients », confie Bérénice Weil.
L’ancienne propriétaire est « enchantée »
Elle a alors appris que la librairie de ses années d’étudiante était à vendre. « Je connaissais la faculté, les professeurs, le quartier, la librairie… Je voulais m’investir dans quelque chose qui a trait au droit. J’avais envie d’avoir mon entreprise, mon commerce. Et l’idée de travailler au milieu des livres m’a beaucoup plu. » L’ancienne propriétaire, forcément, était ravie que sa boutique reste une librairie, et ne devienne pas une banque ou un snack. « Je serais restée jusqu’à ce qu’elle soit vendue en tant que librairie ! » sourit celle qui tenait ce commerce depuis 1985. « Je suis enchantée ! »
D’autant que parier sur le livre à l’heure d’Amazon, cela peut paraître sacrément osé. Mais si les étudiants et les avocats sont fidèles à la librairie, c’est, bien sûr, pour le conseil qu’on leur offre. En duo avec Séraphim Herbillon, l’autre libraire de la boutique, Bérénice Weil assure : « Notre gros avantage, c’est que nous sommes tous les deux juristes, confie-t-elle. Nous avons tous les deux fait la faculté de droit. On s’y connaît. »
« Les Codes, c’est un outil de travail pour un juriste. Comme le marteau pour un ouvrier »
Et les livres de droit, « on veut les voir avant, on veut les feuilleter. Les étudiants passent parfois dix, voire quinze minutes à faire un choix entre plusieurs ». « Pour la même matière, il peut exister cinq ou six manuels, qui peuvent tous avoir le même titre, reprend Séraphim Herbillon. Sur Amazon, on ne voit que la page de garde, et la quatrième de couverture. Et c’est tout. » Rien, ou presque, sur la structure des ouvrages.
Quant aux livres numériques, ils sont peu répandus dans le droit. Et, « les livres de droit dématérialisés, c’est compliqué, pour travailler, explique le libraire. Les Codes, c’est un outil de travail pour un juriste. Comme le marteau pour un ouvrier. L’avoir en papier, c’est beaucoup mieux. Quant aux manuels, les étudiants peuvent les feuilleter, surligner… »
La nouvelle propriétaire de la Librairie juridique des étudiants a un autre sacré défi à relever : l’informatisation de la boutique, confie-t-elle, assise devant une magnifique caisse enregistreuse à l’ancienne. « Tout l’inventaire, on l’a fait à la main. Tout ça, là ! » sourit-elle, en pointant son étal. Elle souhaite mettre la librairie à la page, tout « en gardant, bien sûr, son esprit ancien, qui plaît énormément ».